Laurent Cohen-Tanugi défend une nouvelle vision de l'Etat en France, une vision qui laisserait plus de place au droit, à l'autorégulation de la société tout en réduisant l'omniprésence d'un Etat sclérosant, à la mesure de son expansion, le dynamisme et les forces vives de la société française. C'est en fait en analysant à la manière de Tocqueville le système américain d'autorégulation de la société ou plutôt de régulation par le droit et l'implication de tous les citoyens au sein d'une société contractuelle mais aussi 'juridicisée' qu'il entrevoie les changements nécessaires dans la société française en 1985
[...] En témoignait le refus du Sénat d'accéder à la proposition fait par François Mitterrand d'élargir la saisine du Conseil constitutionnel aux justiciables. Pourtant il est aujourd'hui possible de tenter une reformulation du constat que faisait Cohen-Tanugi quant à la situation de la société française en 1992. En effet, à la lueur des dernières élections, et de l'arrivée au pouvoir de gauche socialiste de nouvelles orientations semblent avoir été prises. Les réformes politiques engagées apparaissent ainsi dans de nombreux cas comme l'application d'un libéralisme modéré qui pourrait correspondre aux recommandations faites par l'auteur. [...]
[...] Outre Atlantique en effet, ce sont les humanités classiques ou liberal arts qui sont mises en valeur dans la formation des élites. A ce titre ce sont les law school qui sont le couronnement de ce système. Comme le précise Cohen-Tanugi, aux Etats-Unis, le droit "imprègne tout et mène à tout". Les plus grands juristes ou lawyers sortis de Harvard de Yale ou de Stanford constituent certes le "personnel" des cabinets d'avocats du pays (law firms) mais ils se retrouvent très souvent dans les tribunaux fédéraux, dans l'administration, la finance, l'industrie et, bien sûr, dans la politique. [...]
[...] La construction européenne favorise et se trouve également à la source de telles évolutions. En effet, l'auteur montre comment la Commission procède par des règlement et des décisions de justice applicables à tous les pays de l'Union ce qui rapproche fortement son fonctionnement du système juridique américain. Bruxelles établit des directives d'ordre juridiques et les conflits entre la Commission et les Etats ou entre les citoyens et leurs Etats respectifs qui sont également d'ordres juridiques sont réglés devant l'instance juridique européenne. [...]
[...] témoignent de l'actualité du débat qui le préoccupe. I. Société américaine et Etat à la française constituent l'envers et l'endroit d'un modèle d'organisation et de régulation de la vie politique, économique et sociale Décalage dont l'enjeu principal tient dans la place et le rôle que le noyau juridique joue des deux côtés de l'Atlantique : A. De la régulation contractuelle à la régulation étatique Les Etats-Unis et la France présentent un lien entre la société et l'Etat radicalement différent et bien visible dans la formation des élites au service de l'Etat : 1. [...]
[...] L'analyse de Laurent Cohen-Tanugi participe aussi d'une critique de l'enseignement du droit en France et de la place qui lui est en général accordé au sein de la société. Cette analyse distingue en fait une profonde différence de culture juridique entre la France et le monde anglo-saxon, notamment les Etats-Unis. L'auteur montre ainsi une France dont le droit est bloqué, figé dans des textes, des lois et des règlements innombrables qui l'empêchent d'évoluer de façon rapide et dynamique. Il décrit alors la France comme une société "bloquée" alors que les Etats-Unis formeraient une société "ouverte" contraste qui, selon lui, se trouve d'abord inscrit dans le droit. [...]
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