La question du statut de l'opposition a véritablement émergé dans les années 1970 pour se concrétiser en particulier sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing avec l'élargissement de la saisine du Conseil Constitutionnel et l'instauration des « questions au gouvernement ». La première alternance entre majorité et opposition en 1981, lors de l'élection du socialiste François Mitterrand, a fait prendre conscience que la majorité d'aujourd'hui est la minorité de demain et donc qu'elle doit préparer sa condition future. Pour cela et en accord avec un exercice démocratique du pouvoir, l'opposition doit être reconnue et dotée d'un véritable statut.
Toutefois il y a toujours eu une sorte de répugnance à reconnaître l'opposition en tant qu'acteur normal, légitime de la vie politique, comme en atteste cette phrase lancée par une députée de la majorité après les élections législatives de 1981 : « Vous avez juridiquement tort, parce que vous êtes politiquement minoritaire ! ». Jusqu'alors ni la Constitution, ni le droit parlementaire (qui ne reconnaît que les groupes) n'admettaient de notion d'opposition. Pour la première fois, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 l'inscrit dans la Constitution tant à l'article 48, al. 5 qui réserve aux groupes d'opposition la détermination de l'ordre du jour d'un jour de séance par mois, et l'article 51-1 qui précise que le règlement de chaque assemblée reconnaît des droits spécifiques aux groupes d'opposition.
[...] Avec la constitutionnalisation de l'opposition, la première étape pour la création d'un statut de l'opposition est franchie. Le passage par la constitutionnalisation était nécessaire pour éviter un nouveau rejet du Conseil Constitutionnel qui dans sa décision du 22 juillet 2006 établissait que les différences de traitement injustifiées entre les groupes étaient contraires à la constitution (art. 4). Toutefois, la constitutionnalisation étant inachevée, ce n'est qu'à travers le droit parlementaire et donc les règlements intérieurs des assemblées qu'un véritable statut de l'opposition pourra émerger. [...]
[...] C'est l'opposition au pouvoir en place que l'on va retenir ici. Selon la définition de Pascal Jan Les oppositions Pouvoirs nº 108, p et elle se présente comme une position reconnue d'un groupe au sein d'un régime politique en compétition pour l'accession légale au pouvoir et son exercice pacifique Mais cette première approche ne permet pas de définir parfaitement l'opposition qui n'est pas une notion juridique. C'est une notion liée à la vie politique, à la pratique politique, elle n'est mentionnée nulle part ailleurs que vaguement dans le corps électoral qui évoque les groupes parlementaires n'appartenant pas à la majorité de l'Assemblée nationale et dans la jurisprudence du Conseil supérieur de l'audiovisuel relative à la détermination du temps de parole à la radio/télévision. [...]
[...] D'autre part : Le rôle joué par l'opposition dans la nouvelle procédure de nomination est faible puisque celle-ci ne peut être bloquée que par un veto à la majorité des trois cinquièmes Le contrôle de la mise en oeuvre de l'article 16 implique la saisine par soixante députés ou soixante sénateurs Le référendum d'initiative conjointe est quasiment impossible à mettre en place, car il nécessite qu'1/5e des parlementaires soit soutenu par 1/10 du corps électoral (c'est énorme, environ 4,5millions de personnes) Enfin quant au rôle de l'opposition dans le cadre de la discussion législative, les réalisations de la loi constitutionnelle sont inexistantes : Si le droit d'amendement a été précisé sur plusieurs points, peu de garanties sont offertes à l'opposition La procédure du vote bloqué de l'article 44-3 n'a pas été modifiée. Cet article, particulièrement facile à mettre en oeuvre, ne sera-t-il pas utilisé comme un moyen pour lutter contre les amendements déposés par l'opposition et l'obstruction parlementaire ? La fonction de contrôle accordée à l'opposition découle du constat qu'il est impossible de s'opposer et d'ailleurs, à aucun moment la fonction d'opposition n'a été revalorisée. Dans sa facette négative, la plus classique, cette fonction d'opposition est une fonction d'empêchement. [...]
[...] Mais ces dispositions s'adressent au Parlement tout entier et pas spécifiquement à l'opposition. On a fait valoir la future possibilité pour l'opposition de créer des commissions d'enquête et de contrôle parlementaires. De même, la fonction de contrôle serait revalorisée par le rôle de l'opposition dans les questions au gouvernement Une revalorisation de la fonction législative L'article 23 de la loi de révision constitutionnelle ajoute un 5e alinéa à l'article 48 de la Constitution : Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour arrêté par chaque assemblée à l'initiative des groupes d'opposition de l'assemblée intéressée ainsi qu'à celle des groupes minoritaires Le rôle joué par l'opposition dans la fonction législative est légèrement revalorisé puisque l'opposition se voit désormais reconnaître une place dans la détermination de l'ordre du jour (lutte contre l'accaparement de l'ordre du jour par le gouvernement). [...]
[...] Toutefois, la révision constitutionnelle se cantonne à définir un cadre juridique pour l'établissement d'un statut de l'opposition. Les droits spécifiques qu'elle évoque pour opposition ne sont pas précisés, aux règlements de les déterminer. Une réforme inachevée qui ne consacre pas de véritable statut de l'opposition C'est aux règlements des assemblées que va revenir la faculté de déterminer les groupes et les prérogatives particulières dont ils disposeront Des difficultés pratiques : le problème de définition et d'identification L'idée même d'un statut pour l'opposition suppose de pouvoir la définir et l'identifier afin de pouvoir lui accorder des droits spécifiques. [...]
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