Séparation des pouvoirs, Constitution, Ve République, Indépendance des autorités, Etat de droit, IGPN Inspection générale de la police nationale, Code européen d'éthique de la police, BEI Bureau des enquêtes indépendantes, lien de subordination, Ministre de l'Intérieur, Montesquieu
Parmi les différentes critiques auxquelles fait face l'IGPN, c'est sa fonction d'investigation des infractions commises par les policiers qui ne suscite plus les débats. « Ceux-ci ont été fortement alimentés par un certain nombre d'affaires médiatisées au cours des dernières années : Théo Luhaka, Cédric Chouviat, Michel Zecler, ou encore le maintien de l'ordre au cours des manifestations des gilets jaunes » . Les critiques concernant l'IGPN ont pris une ampleur sans précédent ces derniers temps, à tel point que fleurissent aujourd'hui de nombreuses propositions de réforme de l'instance de contrôle interne, depuis son « toilettage » évoqué par le ministre de l'Intérieur actuel, Gérald Darmanin jusqu'à sa suppression pure et simple réclamée par Jean-Luc Mélenchon.
Au-delà de toutes ces critiques, c'est la question fondamentale de l'indépendance de l'IGPN qui interpelle plus. Les menaces qui pèsent sur l'indépendance de l'IGPN remettent en cause, non seulement son statut, mais aussi l'exercice de ses fonctions. Au demeurant, Jean-Marc Varaut dans le Dictionnaire de la justice appréhende l'indépendance comme « la situation d'une collectivité, d'une institution ou d'une personne qui n'est pas soumise à une autre collectivité, institution ou personne. Il faut que son titulaire n'ait rien à attendre ou à redouter de personne ». C'est donc la qualité d'une collectivité, d'une institution ou d'une personne qui est libre de toute sujétion hiérarchique. Au regard de cette définition, l'on observe clairement que la « police des polices » pâtit de son fonctionnement et en particulier du fait d'appartenir à l'institution qu'elle est censée contrôler. Pour l'opinion publique, l'IGPN est trop proche des policiers pour être impartiale dans l'exercice de ses fonctions.
[...] Elle précise par ailleurs que « toutes les professions disposent d'un contrôle interne et elles ne sont pas remises en question, les avocats, les médecins, les journalistes . ». La question fondamentale qu'on pourrait se poser à ce niveau d'analyse est celle de savoir si l'indépendance de l'inspection générale de police nationale est un leurre ou demeure-t-elle simplement moins garantie ? Une tentative de réponses à cette question conduit à envisager dans un premier temps que l'indépendance de l'IGPN est hypothéquée par la subordination hiérarchique au ministère de l'Intérieur et dans un second temps, l'existence d'une certaine indépendance de l'IGPN induite par son fonctionnement (II). [...]
[...] C'est d'ailleurs la critique la plus virulente adressée à son endroit par bon nombre d'observateurs. Ce rattachement entraine des effets pervers notables. De prime abord, il expose l'IGPN à des pressions éventuelles pouvant provenir de la direction générale de la police ou même du ministre de l'Intérieur. De plus, les membres de l'IGPN sont soumis à l'autorité hiérarchique du directeur général de la police et du ministre de l'Intérieur. C'est le directeur général de la police qui nomme et révoque opportunément le directeur de l'IGPN. [...]
[...] Le soubassement pratique de l'indépendance de l'IGPN réside donc dans l'offre d'un service public pertinent, efficace et efficient. Les mécanismes de contrôle en vigueur contrastent malheureusement avec les garanties effectives d'indépendance. Ils contrastent aussi avec les attentes légitimes des individus. Lorsque l'indépendance d'une institution comme l'IGPN n'est pas clairement et suffisamment garantie, le risque inéluctable est de constater sa partialité et son manque de neutralité dans l'exercice de ses fonctions essentielles. C'est l'une des raisons pour lesquelles, l'IGPN souffre d'une « crise de légitimité » auprès de l'opinion publique. [...]
[...] L'affectation des agents au sein de l'IGPN est pilotée par le directeur général de la police nationale. Ils savent pertinemment que leur attitude bienveillante et docile envers le directeur général de la police à l'IGPN est une condition essentielle dans l'avancement de leur carrière dans la police. Pis encore, aucun audit ne peut être réalité par l'IGPN sans une demande explicite formulée aux autorités supérieures, en l'occurrence le directeur général de la police ou le ministre de l'Intérieur. Ce rattachement place ensuite l'IGNP dans une situation où elle est à la fois « juge et partie » lorsqu'il s'agit de contrôler la conduite et les actes des policiers placés sous sa responsabilité et de déclencher corrélativement des sanctions administratives ou l'action en justice contre ces derniers. [...]
[...] On voit bien aujourd'hui qu'avec ce positionnement politique du ministère de l'Intérieur, il existe de fortes suspicions sur le fait qu'on demande à l'IGPN de ne pas faire d'excès de zèle ». Cette dénonciation ne veut nullement signifier que l'approche envisagée est sans pertinence, même si au fond, elle ne permettrait certainement pas d'apporter des solutions satisfaisantes aptes à assurer un contrôle indépendant des fonctionnaires de la police. Il serait alors judicieux de se demander si face à tous ces débats et toutes ces critiques qui abondent concernant l'effritement de l'indépendance de l'IGPN dues essentiellement à son rattachement au pouvoir exécutif et au fait qu'elle soit à la fois « juge et partie » dans sa mission de contrôle des fonctionnaires de police, l'exigence démocratique ne serait-elle comblée que dans la mesure où un contrôle externe est mis en place ? [...]
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