À l'aube de la Révolution, et en fait avant même la tenue des Etats-Généraux en mai 1789, les élites françaises ont déjà en tête l'idée d'une constitution pour la France. S'il est vrai que la plupart des protagonistes de l'époque s'accordent globalement sur ce point, le consensus n'est pas pour autant total. Pour parler de manière sans doute un peu caricaturale, il y a les partisans d'une constitution - les constitutionnels - et parmi eux les partisans d'une monarchie constitutionnelle - appelés les monarchiens - qui vantent les mérites de certains aspects du modèle anglais, mais il y a aussi les partisans du modèle américain qui prônent une république. Et enfin, face aux constitutionnels, il y a bien sûr les monarchistes qui ne souhaitent pas voir s'achever la monarchie absolue de droit divin. Il s'agit des trois formes de gouvernement théorisées par Montesquieu dans De l'Esprit des Lois. Au de-là de son aspect social, la Révolution française est donc avant tout une mutation politique puisqu'avec la suppression d'une société d'ordres obsolète l'heure est venue pour la France de redéfinir la nature de son gouvernement. Comme chacun le sait Montesquieu avait estimé que le régime le plus démocratique qui puisse exister était la monarchie constitutionnelle et il était de ce fait favorable au bicamérisme. Cependant les monarchiens sont très critiques quant à sa conception de la seconde Chambre puisqu'il apparait dans De l'Esprit des lois qu'il l'envisage comme une protection de l'entité nobiliaire. Or dans leur idéal démocratique, les monarchiens ne confèrent pas un quelconque rôle de défense sociale à la deuxième Chambre. Pour eux, elle n'a pas pour vocation la conservation des intérêts particuliers d'une classe. C'est pourquoi le chef de file des monarchiens, Jean-Joseph Mounier, critique âprement le modèle de ce qu'il nomme la Monarchie de Montesquieu, modèle auquel il reproche donc de légitimer une aristocratie fondée sur les privilèges. Les monarchiens ne souhaitent pas que la création d'une seconde Chambre porte atteinte à l'unité de la représentation nationale, mais désirent qu'on attribue à une portion de celle-ci la faculté de s'exprimer au nom des entités locales, tels donc des représentants des provinces.
Cette thèse monarchienne favorable à l'installation du bicamérisme dans les institutions françaises est décriée par la Constituante ; d'abord parce que l'utilité d'une seconde Chambre ne semble pas évidente en cette période de troubles, mais également parce cette idée va à l'encontre des postulats fondamentaux de 1789 (...)
[...] Obsédés par les souvenirs de Robespierre et de sa sanglante tyrannie, les constituants vont vouloir créer une seconde Chambre avant tout dans l'espoir de faire barrage à la dictature d'une assemblée unique. Le nouveau régime établi par la constitution de l'an III (22 août 1795) va donc instituer un système bicaméral : le Conseil des Cinq-Cents qui constitue la Chambre basse et le Conseil des Anciens, la chambre haute. En réalité, il s'agit moins d'une reconnaissance du bicamérisme par la Convention thermidorienne qu'une façon pour elle de diviser le pouvoir législatif en deux entités distinctes, officiellement indépendantes. [...]
[...] Le Consulat attribue en effet pour résidence le Palais du Luxembourg au Sénat, siège depuis 1795 du Directoire. Par ailleurs, même si le Sénat conservateur se trouve être bien éloigné du système parlementaire et qu'il se caractérise par une soumission totale envers le Premier consul puis envers l'Empereur, la deuxième Chambre continue toutefois d'avoir pour prérogative la préservation de la Constitution, ce qui était déjà le cas du Conseil des Anciens. L'asservissement du Sénat, vous l'aurez compris, ne nous permet finalement pas d'assimiler cet organe à une véritable chambre parlementaire même s'il constitue incontestablement un pas de plus vers la consécration du bicamérisme en France. [...]
[...] Quant aux pouvoirs de la Seconde chambre, ils sont renforcés en matière législative. Mais malgré ce renforcement apparent, la Chambre haute va en fait perdre de son influence. En effet, ainsi transformée par la révision de la Charte, la chambre devient plus bourgeoise ; elle cesse peu à peu d'être une assemblée nobiliaire, elle perd de son indépendance et de son influence face au gouvernement et à la Chambre des députés. Peu à peu la nouvelle génération siège au Palais Bourdon, c'est-à-dire à la Chambre des Députés, et elle mène le jeu politique. [...]
[...] Pour eux, elle n'a pas pour vocation la conservation des intérêts particuliers d'une classe. C'est pourquoi le chef de file des monarchiens, Jean-Joseph Mounier, critique âprement le modèle de ce qu'il nomme la Monarchie de Montesquieu, modèle auquel il reproche donc de légitimer une aristocratie fondée sur les privilèges. Les monarchiens ne souhaitent pas que la création d'une seconde Chambre porte atteinte à l'unité de la représentation nationale, mais désirent qu'on attribue à une portion de celle-ci la faculté de s‘exprimer au nom des entités locales, tels donc des représentants des provinces. [...]
[...] II) Vers une consécration progressive de la Haute Assemblée (1814 1871). Les Pairs de la Restauration : une assemblée nobiliaire au service de l'équilibre institutionnel (1814 1830). Après l'abdication de Napoléon à Fontainebleau, Louis XVIII s'apprête à monter sur le trône de France et la question qui se pose alors est assez limpide : va-t-il aussi procéder, en plus de la restauration de la monarchie, à la restauration de l'Ancien Régime ? Même si la question fait débat entre les ultras, partisans de l'absolutisme, et les libéraux, favorables à la souveraineté nationale, un nouveau texte, baptisé "Charte constitutionnelle", sera finalement élaboré par le roi lui-même, avec le concours d'une délégation parlementaire, texte octroyé le 4 juin 1814. [...]
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