« La Constitution supporte la cohabitation mais elle n'a pas été faite pour cela » a déclaré Guy Carcassonne.
Sortant de la IIIe et IVe Républiques qui ont mis en place une prépondérance du Parlement au point de parler de régime d'Assemblée, les constituants de 1958 ont voulu rompre avec ce régime en instituant à la tête de l'exécutif, un Pr. fort. La Ve République présente tout de même dans ses principes, tous les caractères d'un régime parlementaire puisque le pouvoir exécutif est bicéphale, que le gouvernement est responsable devant l'Assemblée, et qu'il existe un droit de dissolution de l'Assemblée nationale. Toutefois, il est incontestable que c'est l'exécutif qui a tiré profit en 1958 du rééquilibrage institutionnel, profit renforcé par la révision constitutionnelle de 1962, instituant l'élection du Pr. de la République au suffrage universel direct. Cet exécutif fort supposait une majorité parlementaire soutenant la politique du Président et donc une concordance avec le 1er Ministre. Une discordance entre les 2 têtes de l'exécutif n'avait donc pas été prévue par la Constitution. Elle fut ainsi redoutée jusqu'en 1986, date de la 1ère cohabitation. Les élections législatives de mars 1986 ont en effet mis en place une majorité parlementaire différente de la majorité présidentielle élue 5 ans plus tôt. On avait donc à faire à un Pr. de Gauche, François Mitterrand, et à un 1er Ministre de Droite, Jacques Chirac. Cette 1ère cohabitation est apparue comme conflictuelle car les 2 hommes étaient tous 2 candidats virtuels à l'élection présidentielle. La 2ème cohabitation (1993-1995) apparut beaucoup plus paisible, sans doute en raison de la personnalité d'Edouard Balladur qui a toujours pris soin d'éviter la confrontation politique mais aussi parce que les 2 hommes n'étaient pas, au départ, candidats à l'élection présidentielle. En effet, François Mitterrand, 1er Président réélu au suffrage universel dans l'histoire de la Ve République, accomplissait son 2nd mandat et il apparaissait évident qu'il s'arrêterait là. Edouard Balladur, en tant que 1er Ministre, n'avait pas, au départ, de visée sur l'élection présidentielle et n'a dévoilé son ambition que sur le tard. Ces 2 cohabitations n'ayant duré que 2 ans, de nombreux hommes politiques les ont considérés comme une parenthèse à une forte présidence connue de 1958 à 1986. La 3ème cohabitation, quant à elle, fut différente. En accédant le 21 avril 1997, à la demande de dissolution de l'Assemblée nationale, le Chef de l'Etat, Jacques Chirac, a précipité le retour de la cohabitation, au point d'affecter cette fois-ci la Ve République. Cette dissolution a affaibli le Président, cela d'autant plus que la durée de cette cohabitation (5ans), permettait au 1er Ministre de mettre en œuvre sa politique. Cette 3ème cohabitation, au contraire des 2 premières, n'apparaît pas comme une parenthèse et semble mettre fin au prince-président. Allant à l'encontre de l'esprit des constituants qui avaient voulu instaurer un Pr. fort, la cohabitation, par les difficultés qu'elle a crée, a relancé la tentation présidentialiste. Cette tentation se concrétisa par la révision constitutionnelle du 2 octobre 2000, relative au quinquennat. Désormais, les élections présidentielles et législatives sont concomitantes, ce qui permettrait, en principe, d'éviter tout risque de cohabitation. Cependant, ce risque n'est pas à exclure. C'est en ce sens que l'on peut s'interroger sur les éventuels risques institutionnels qu'engendrerait une nouvelle cohabitation. Pour cela, on peut s'appuyer sur l'expérience des précédentes pour en dégager les éventuels dangers inhérents à ces dernières, tout en prenant en compte que si une nouvelle cohabitation était amenée à apparaître, celle-ci durerait 5ans, en raison de l'instauration du quinquennat. Ces 3 cohabitations ont été marquées par des caractéristiques communes avec un effacement temporaire de la fonction présidentielle au profit du 1er Ministre bénéficiant du soutien parlementaire. On reviendrait alors à une lecture stricte de la Constitution, établissant un régime parlementaire, le caractère présidentialiste de celui-ci étant effacé. On pourrait alors aboutir à un risque de paralysie institutionnel, avec un exécutif où le Pr. et le 1er Ministre s'empêcheraient mutuellement d'agir et un risque de retour vers un régime parlementaire. Toutefois, ces risques doivent être atténués puisque, même en cette période, le Pr. demeure garant des institutions et conserve son rôle d'arbitre, dépositaire de l'intérêt général. En conséquence, une nouvelle cohabitation présenterait probablement des risques de paralysie institutionnelle (I), mais ces risques sont tout de même à nuancer (II).
[...] Cependant, la pratique institutionnelle qui s'est ouverte en 1997, lors de la troisième Cohabitation, a présenté également des avantages. En effet, aucune crise importante n'a affecté le fonctionnement des différents rouages de l'Etat. On assiste même à un renforcement des équilibres au sein des institutions, à une séparation des pouvoirs plus importante, à l'existence d'un contre-pouvoir ; bref aspects tous fidèles aux principes de Montesquieu renforçant l'idée de démocratie. La pratique des Cohabitations permet finalement d'approfondir l'interprétation d'une Constitution qui portait encore l'empreinte de son promoteur. [...]
[...] Le Président garde aussi un pouvoir non négligeable en matière de révision constitutionnelle. Il est vrai qu'en vertu de l'article 11, il ne peut déposer de projet sans une proposition du premier Ministre, mais de son côté, le premier Ministre, s'il veut faire aboutir ses projets, ne peut que gagner à la participation du Président. Enfin, concernant les pouvoirs propres du Président, il ne faut pas oublier que ce dernier nomme trois des neuf membres du Conseil constitutionnel (art al. [...]
[...] Allant à l'encontre de l'esprit des constituants qui avaient voulu instaurer un Président fort, la Cohabitation, par les difficultés qu'elle a créées, a relancé la tentation présidentialiste. Cette tentation se concrétisa par la révision constitutionnelle du deux octobre 2000, relative au quinquennat. Désormais, les élections présidentielles et législatives sont concomitantes, ce qui permettrait, en principe, d'éviter tout risque de Cohabitation. Cependant, ce risque n'est pas à exclure. C'est en ce sens que l'on peut s'interroger sur les éventuels risques institutionnels qu'engendrerait une nouvelle Cohabitation. [...]
[...] Néanmoins ces risques sont à nuancer puisqu'on revient à une lecture plus stricte de la Constitution confiant tout de même au Président des prérogatives importantes. De plus, l'expérience des Cohabitations a montré que la France demeurait gouvernée. Des risques à nuancer Ces risques sont en effet à nuancer puisque le Président de la République demeure garant des institutions et qu'un certain nombre de réformes ont été adoptées Un Président garant des institutions En dépit de ses handicaps précédemment évoqués, le Président conserve malgré tout des prérogatives incontournables. [...]
[...] Le premier Ministre a obtenu une grande liberté d'initiative. François Mitterrand, lors de la première Cohabitation, devait d'ailleurs se référer à l'article 20, insistant sur le fait que Jacques Chirac avait la charge de déterminer et de conduire la politique de la nation, aussi déclara-t-il le 18 mai 1986 : Je n'ai pas dans la tête d'empêcher le Gouvernement de gouverner. Je n'ai pas à m'opposer à sa politique. Les Cohabitations ne se ressemblent pas toutes, il faut tenir compte des deux protagonistes. [...]
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