« Il doit être évidemment entendu que l'autorité indivisible de l'Etat est confiée tout entière au Président par le peuple qui l'a élu, qu'il n'en existe aucune autre, ni ministérielle, ni civile, ni militaire, ni judiciaire, qui ne soit conférée ou maintenue par lui… Il lui appartient d'ajuster le domaine suprême qui lui est propre avec ceux dont il attribue la gestion à d'autres ». Cet extrait d'un discours du général de Gaulle, lors d'une conférence de presse du 31 janvier 1964, résume bien la pensée du principal investigateur de la révision constitutionnelle de 1962. Rappelons que la révision constitutionnelle désigne « l'opération qui consiste à modifier, compléter ou supprimer des dispositions d'un texte constitutionnel existant », et que l'étude du processus de révision n'est pertinente que dans le cas de Constitution rigide, comme celle de la France.
Se déroulant dans un contexte de grande tension politique, la révision de 1962 est considérée comme étant une des révisions les plus importantes de l'histoire de la Vème République. En effet, elle semble avoir provoqué de changements institutionnels profonds, si bien que l'on a pu parler de « constitution bis » ou de « nouvelle Vème République ».
On peut alors se demander en quoi la révision constitutionnelle de 1962 est-elle à l'origine d'une profonde mutation du système politique et des institutions de la Vème République.
[...] Ainsi, la victoire de la révision constitutionnelle de 1962 fait entrer la Vème République dans une ère de présidentialisme absolu dominée par le général de Gaulle. Mais on peut se demander si ce système peut survivre à la disparition de son créateur. Nous allons voir que l'élection du président au suffrage universel a eu pour conséquence d'enraciner une mutation certaine des institutions. II. Les conséquences de la révision constitutionnelle : l'affirmation du chef de l'état dans les institutions Si de Gaulle a longtemps été critiqué d'avoir utilisé l'article 11 de la Constitution pour la révision de 1962, il faut cependant remarquer que la révision ne modifie en rien les prérogatives du président de la République, et en particulier, ne lui en ajoute aucune. [...]
[...] La légitimité accrue du Président de la République Tout d'abord, abordons la question de la légitimité. Avant la révision de 1962, le président étant élu indirectement par un collège, seule l'Assemblée nationale bénéficiait de la légitimité issue des urnes, en tant que représentants de la nation. Même si de Gaulle exerçait du fait de son autorité l'essentiel du pouvoir, il était encore privé de la légitimité consacrée par les institutions. Mais après la révision constitutionnelle, le chef de l'exécutif se voit élire dans une seule circonscription, la France, à la majorité absolue des suffrages exprimés. [...]
[...] C'est ce système institutionnel que de Gaulle, ses collaborateurs et son parti souhaitent bouleverser, ce qui entraine l'élaboration d'un projet de révision constitutionnelle qui porte sur une modification des articles 6 et 7 de la Constitution : le Président de la République devra être élu au suffrage universel direct. Article 6 : Le Président de la République est élu pour 7 ans au suffrage universel direct Article 7 : Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. [...]
[...] L'utilisation de l'article 11 : une interprétation présidentialiste de la Constitution La révision constitutionnelle va se dérouler d'une manière parfaitement atypique, et l'étude de la procédure est déterminante pour comprendre l'importance de la révision. En effet, il existe une voie habituelle pour réviser la constitution. Il s'agit de l'utilisation de l'article 89, qui énonce que l'initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République sur proposition du premier ministre et aux membres du Parlement. Le projet ou la proposition de révision doit être voté par les deux assemblées en termes identiques ( ) Cet article prévoit donc la nécessité d'un accord entre le Président et le Parlement, puisque le projet est irrecevable s'il n'a pas été voté par les Chambres. [...]
[...] Il est la condition du présidentialisme absolu Le fait majoritaire, en réponse au multipartisme éclaté, est une des conditions de la stabilité de l'exécutif et de la réalisation d'une véritable politique unitaire par le gouvernement. Il est peu probable que le premier ministre soit renversé par une majorité acquise au président, et dès lors le Parlement ne représente plus un véritable contrepoids aux directives présidentielles. La révision constitutionnelle consacre donc, du point de vue du fonctionnement des institutions, une double victoire pour le Président. D'une part, il assoit sa domination sur le premier ministre, s'affirmant comme le seul et unique chef de l'exécutif, et se dote d'une assemblée à la majorité stable sinon acquise. [...]
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