Si l'on en croit Jean-Jacques Rousseau, théoricien du Contrat Social et chantre de la démocratie directe, « la souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu'elle ne peut être aliénée; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point ». Ainsi, selon la philosophie rousseauiste, le pouvoir souverain ne peut résider que dans le Peuple, lequel est considéré comme étant l'unique détenteur du pouvoir législatif. Telle est la raison pour laquelle tout acte émanant du Parlement doit selon Rousseau être nécessairement soumis à la ratification populaire. De cette manière, les citoyens ont la possibilité de contrôler les lois élaborées par leurs représentants. Cette participation directe du Peuple à l'exercice du pouvoir tient également une place essentielle dans le projet de Constitution présenté à la Convention par le Marquis de Condorcet, le 15 février 1793. Ce projet prévoyait en effet que les révisions de la Constitution soient systématiquement approuvées par le Peuple Souverain : ainsi le Marquis de Condorcet est-il considéré comme le père du référendum constitutionnel, lequel est actuellement prévu par de nombreuses Constitutions (art. 138 de la Constitution italienne, art. 138 de la Constitution suisse, art. 128 de la Constitution australienne et art. 46 de la Constitution italienne). La Constitution Française de 1958 prévoit quant à elle que sa propre révision « est définitive après avoir été approuvée par référendum » (art. 89). Nonobstant la valeur normative de cette disposition constitutionnelle, il convient de se demander si l'article 89 a véritablement permis au Peuple français d'exercer le pouvoir constituant dérivé. Ainsi, s'il est vrai que le référendum prévu à l'article 89 donne théoriquement la possibilité aux citoyens d'accepter ou de rejeter les réformes constitutionnelles, il est à noter que les responsables politiques ont le plus souvent eu recours à d'autres procédures de révision: l'analyse à laquelle nous nous livrerons mettra ainsi en exergue l'existence de contraintes politiques et constitutionnelles qui tendent à limiter l'usage du pouvoir constituant dérivé par le Peuple.
[...] De Gaulle prit donc la décision de recourir à l'article 11, qui stipule que le Président de la République [ . ] peut soumettre au référendum tout projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics Face à une telle fraude à la Constitution Gaston Monnerville, alors Président du Sénat, saisit le Conseil Constitutionnel afin que soit examinée la loi référendaire adoptée par les électeurs le 28 octobre 1962. La juridiction constitutionnelle refusa de contrôler la conformité de la procédure suivie, sous motif que les lois adoptées par le peuple, à la suite d'un référendum, constituent l'expression directe de la souveraineté nationale Dans son ouvrage, Claude Klein écrit que la crise constitutionnelle de 1962 met en évidence la fonction magique du pouvoir constituant l'approbation du Peuple français a permis de couvrir l'irrégularité initiale de la procédure de révision. [...]
[...] Or, s'il est vrai que ces deux pouvoirs sont de nature différente, ils ne peuvent être exercés que par des représentants élus, lesquels sont chargés d'appliquer toute cette portion de la volonté commune qui est nécessaire pour le maintien d'une bonne administration (Qu'est-ce que le Tiers-Etat?). Les représentants de la Nation, uniques titulaires du pouvoir constituant dérivé sous les régimes antérieurs à 1946. La théorie sieyèsienne du pouvoir constituant, qui est intrinsèquement liée au principe de représentation, a longtemps été l'un des piliers de la conception juridique française. Comme cela a été précisé plus haut, aucune des Constitutions antérieures à 1946 - à l'exception de celles de 1793 et de 1795 - ne prévoyait que le Peuple puisse exercer directement le pouvoir constituant dérivé. [...]
[...] Les modalités de révision fixées à l'article 89 de la Constitution du 4 octobre 1958. Le référendum constituant sous la République Gaullienne: une question de confiance qui permet au Président d'engager sa responsabilité politique. II) La «décadence du référendum constituant (Frédéric Rouvillois), un élément qui met en exergue l'affaiblissement de la démocratie semi-directe française. Les contraintes d'ordre constitutionnel susceptibles de limiter l'exercice du pouvoir constituant par le Peuple. Le droit de veto sénatorial, une disposition qui peut faire obstacle à l'expression directe de la souveraineté nationale. [...]
[...] L'analyse à laquelle nous venons de nous livrer met en exergue l'importance du référendum constitutionnel dans la vie politique française. D'une part, celui-ci permet au Peuple français d'exercer, en vertu de sa Souveraineté, le pouvoir constituant dérivé, et d'autre part, il établit un dialogue direct entre le Chef de l'état et la Nation. Néanmoins, certains auteurs, à l'instar de Frédéric Rouvillois, estiment que la démocratie semi- directe française s'est considérablement affaiblie, notamment depuis le départ du Général de Gaulle. Ainsi, il importe de préciser quelles sont les raisons, juridiques et politiques, qui permettent d'expliquer l'actuelle désuétude du référendum constitutionnel II) La «décadence du référendum constituant (Frédéric Rouvillois), un élément qui met en exergue l'affaiblissement de la démocratie semi-directe française Les contraintes d'ordre constitutionnel susceptibles de limiter l'exercice du pouvoir constituant par le Peuple Le droit de veto sénatorial, une disposition qui peut faire obstacle à l'expression directe de la souveraineté nationale. [...]
[...] La mise en application de l'article 11 en matière de révision constitutionnelle, une procédure qui permet au Président de passer outre le veto sénatorial. Le veto parlementaire, parce qu'il empêche le Chef de l'état d'entrer en dialogue direct avec le Peuple Souverain, constitue un obstacle à l'avènement d'une démocratie semi-directe. C'est précisément la raison pour laquelle le Général de Gaulle eut recours, en 1962 et en 1969, à la procédure de l'article 11. En effet, en 1962, le Président de la République ne disposait plus d'une majorité de soutien à l'Assemblée, comme en atteste la motion de censure déposée le 5 octobre, et par laquelle était renversé le premier gouvernement Pompidou. [...]
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