Entrée en application depuis le 1er mars 2010, la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) a été introduite, par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Désormais, le nouvel article 61-1 de la Constitution de 1958 stipule que : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. » La création de la QPC, en France, a permis un alignement sur les voisins européens tels que l'Espagne, l'Italie ou encore l'Allemagne, dotés d'une Cour constitutionnelle exerçant un contrôle a posteriori sur les lois ordinaires. En effet, le contrôle sur les lois opéré par le Conseil constitutionnel a jusqu'à présent été limité à un contrôle par voie d'action, fermé aux justiciables. La révision du 23 juillet 2008 s'inscrit dans une mouvance d'élargissement des compétences du Conseil constitutionnel et dans un souci de veiller au respect des droits et libertés individuels.
[...] En revanche QPC n'a pas été transmise (environ 60% pour la Cour de cassation et 40% pour le Conseil d'Etat). Ces chiffres mettent en exergue l'appropriation du dispositif par les citoyens. De plus, la Cour de cassation et le Conseil d'Etat statuent dans un délai inférieur à trois mois, à l'instar du Conseil constitutionnel (deux mois, en moyenne). En cas de renvoi, le juge devant lequel a été soulevée la QPC sursoit à statuer sur le litige en cours. Le respect des délais montre que cette procédure ne retarde pas l'issue des procès ; ce qui dénote un bon fonctionnement procédural. [...]
[...] La Cour de cassation a saisi à titre préjudiciel la Cour de Justice de l'Union européenne, afin de savoir si le caractère prioritaire de la QPC ne contrevenait pas au droit de l'Union européenne (16/04/2010, M. Melki). Avant même que la Cour de Luxembourg ne se soit prononcée, le Conseil constitutionnel (décision du 12 mai 2010) et le Conseil d'Etat (14 mai 2010, Rujovic) ont relativisé le caractère prioritaire de la procédure. Il résulte de l'arrêt Rujovic que la QPC ne fait pas obstacle à ce que le juge administratif, juge de droit commun de l'application du droit de l'Union européenne, en assure l'effectivité soit au terme de la procédure de question prioritaire de constitutionnalité, soit à tout moment de cette procédure, lorsque l'urgence le commande, pour faire cesser immédiatement tout effet éventuel de la loi contraire au droit de l'Union. [...]
[...] Le juge a quo, après la remise d'un écrit distinct et motivé par les parties, doit statuer sans délai Il évalue le caractère sérieux de la question, vérifie que le Conseil constitutionnel n'a pas déjà statué sur ce thème, et s'assure que la disposition législative critiquée est applicable au litige. En cas de transmission, les cours suprêmes ont trois mois pour se prononcer sur le renvoi au Conseil constitutionnel, qui dispose de trois mois pour rendre sa décision, en cas de renvoi. C'est le mécanisme du double filtrage. [...]
[...] Ainsi, le Conseil constitutionnel a pu abroger les dispositions relatives aux pensions militaires de retraite, dont le montant versé aux anciens combattants étrangers était inférieur à celui versé aux anciens combattants français (28/05/2010, 2010-1 QPC), en les déclarant contraires au principe d'égalité L'abrogation a été différée au 1er janvier 2011, accordant ainsi au législateur le temps nécessaire pour modifier les textes. La sécurité juridique a donc été maintenue. De même, le Conseil constitutionnel a abrogé les dispositions régissant le régime de droit commun de la garde à vue (30/07/2010, n°2010-14/22 QPC). Dans ce cas également, l'abrogation a été reportée au 1er juillet 2010, pour permettre au législateur de préparer une réforme en ce domaine Malgré le dépassement des inquiétudes relatives au fonctionnement de la QPC, le dispositif n'est pas sans limites A. [...]
[...] Conséquemment, si un juge a des doutes concernant la constitutionnalité d'une disposition législative qui s'applique au litige, il se verra contraint de l'appliquer. Par ailleurs, la condition du procès pour le déclenchement du mécanisme de la QPC exclut les citoyens qui ne sont pas en situation de litige. De même, le cantonnement au domaine des droits et libertés limite les possibilités de saisine du Conseil constitutionnel. Néanmoins, au vu de l'actuel succès rencontré par la QPC, on peut envisager son élargissement à d'autres domaines, la QPC étant un mécanisme juridictionnel encore très récent. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture