« Depuis le 6 mai 2007, il est écrit dans les faits que le Président gouverne et que le Premier Ministre coordonne l'application de la politique présidentielle par les ministres » a déclaré Dominique Rousseau dans un article du Monde paru le 13 juin 2007, soit un mois après l'élection présidentielle de Nicolas Sarkozy. Le texte de la V° République, promulgué le 4 octobre 1958, est le fruit d'un compromis. En effet, la commission chargée en théorie de réviser la Constitution de la IV° République, mais en pratique de rédiger une nouvelle Constitution pour la V° République, est mixte. Elle est composée de piliers de la IV° République qui incarnent le régime parlementaire, et d'hommes « neufs », qui s'illustreront sous la V° République, adhérant à la volonté de Charles de Gaulle de restaurer l'autorité de l'Etat. Pourtant, à cette époque, la volonté n'était pas de concentrer les pouvoirs entre les mains du Président de la République. A mixité de la commission a donné lieu à un régime semi-parlementaire, semi-présidentiel.
Mais le résultat du compromis Constitutionnel est un texte flou. La libre interprétation est alors possible, mais cette thèse est très controversée. La V° République a mis en place un organe de contrôle, le Conseil Constitutionnel. Mais face à l'immense légitimité du Général de Gaulle, le Conseil Constitutionnel a refusé d'interpréter la Constitution, ou de contrôler ses interprétations par son fondateur. L'interprète premier a donc été le Général de Gaulle, élu dès le premier tour par le collège de 80.000 électeurs le 21 décembre 1958, réélu au suffrage universel direct le 19 décembre 1965. Durant onze ans, en plus d'avoir été l'auteur intellectuel de ce texte, il en a été l'interprète. Il a donc marqué le pli de la pratique constitutionnelle pendant onze ans pour ses successeurs, de par sa lecture présidentialiste de la Constitution du 4 octobre 1958. Sa pratique et celles de ses successeurs ont été qualifiées de coutume constitutionnelle. Mais le jeu de la présidentialisation d'un régime est un engrenage irréversible.
[...] La répartition des pouvoirs entre le Président de la République et le Premier ministre s'organise de façon verticale. Normalement, le Président de la République définit les grandes orientations, et le Premier ministre s'occupe des conjonctures. Mais, encore une fois, la pratique veut que tous les Présidents de la République sous la République aient été investis dans les affaires de la grande politique, mais aussi de la conjoncture. C'est une dérive monarchique de la République. Concernant l'article 8 alinéa qui confère au Président le pouvoir de nommer les membres du gouvernement avec le contreseing du Premier ministre, en période de coïncidence, le choix du Président de la République est déterminant, sans qu'il y ait de concertation entre les deux têtes de l'État. [...]
[...] De plus, au terme d'un délai de soixante jours, le Conseil Constitutionnel pourra se prononcer de plein droit sur les conditions d'exercice de ces pouvoirs exceptionnels. Néanmoins, la disposition de la révision du 23 juillet 2008 ne précise pas si le Président de la République est lié par cette décision. À côté de ces pouvoirs dits propres du Président de la République, qui connaissent des limites en période de cohabitation des majorités parlementaires et présidentielles, le Président dispose de pouvoirs partagés. C'est dans l'exercice de certains de ces pouvoirs partagés que le Président de la République devient un contre-pouvoir très fort, en période de cohabitation. [...]
[...] Mais le jeu de la présidentialisation d'un régime est un engrenage irréversible. Par la suite, tous ses successeurs ont gardé une lecture présidentialiste de la Constitution instaurant la République. De plus, la République a vu naitre des réformes qui l'ont véritablement présidentialisé. Ainsi en est-il de la réforme du 6 novembre 1962, qui modifie le mode d'élection présidentielle ; désormais, le Président de la République sera élu au suffrage universel, et non plus par un collège de 80.000 électeurs. Ceci confère une légitimité populaire aux Présidents de la République, permettant ainsi de justifier leur lecture présidentialiste de la Constitution. [...]
[...] L'article 16 confère au Président des pouvoirs de crise, c'est-à-dire le cumul des pouvoirs exécutif et législatif, soit une dictature provisoire, puisqu'elle ne respecte pas le principe de la séparation des pouvoirs. Cette prérogative est très encadrée, elle ne peut avoir lieu que dans certains cas : menace grave et immédiate sur l'intégrité du territoire français, guerre, ou interruption du fonctionnement des pouvoirs publics. Le Président doit au préalable consulter le Premier ministre, les Présidents du Séant et de l'Assemblée Nationale, ainsi que le Conseil Constitutionnel, et informer la nation. [...]
[...] Le Premier ministre est alors obligé de se soumettre au Président de la République, il n'a pas de marge de manœuvre. Le Premier ministre n'est que le premier des collaborateurs du Président de la République. Selon François Fillon, cette subordination du Premier ministre au Président permet de renforcer l'exécutif et de le rendre plus efficace, grâce à l'unité du couple formé par le chef de l'État et le Premier ministre L'effacement du rôle du Premier ministre est à double tranchant. [...]
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