Selon P. Avril, la Présidence de la République est l'étai sur lequel peut s'appuyer le Premier ministre prenant en charge la fonction exécutive. La Vème République a ainsi mis en place un bicéphalisme de l'exécutif dyarchique complexe dont il convient d'étudier les rouages.
Le Président de la République est défini comme étant le Chef de l'Etat. Son statut est le premier à être défini dans la Constitution de 1958 par les articles 5 à 19. Selon l'article 5, il « veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et la continuité de l'Etat. Il est le garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire et du respect des traités ». Le Président de la République sera d'ailleurs défini par M. Debré comme la « clef de voûte » du régime. G. Burdeau avancera que le chef d'Etat a pour fonction « de maintenir la cohésion et la grandeur française », d'exprimer « l'énergie de la nation », « le vouloir vivre de la France toute entière ». Le Président est donc la personnification de l'Etat, en continuité avec la tradition monarchique française. Les constituants ont par conséquent souhaité lui donner d'importantes prérogatives afin de lui assurer la stature qui convient à son rôle de représentant de la Nation. Les exigences de la démocratie pourront justifier son élection au suffrage universel direct (depuis le 6 novembre 1962) et la limitation de son mandat à 5 ans (depuis le 2 octobre 2000).
Le Premier ministre se définit comme le chef du Gouvernement. Il porte la responsabilité politique que le Président n'a pas. Comme dans tout régime parlementaire, l'autorité appelle la responsabilité. Par conséquent, l'article 21 de la Constitution lui confère la direction de l'action du Gouvernement qui « détermine et conduit la politique de la nation ». Ainsi, le chef du Gouvernement dispose de nombreuses prérogatives, certaines partagées avec le chef d'Etat.
Tout au long de l'histoire constitutionnelle française, de nombreux régimes ont tenté de placer plusieurs hommes à la tête du pouvoir exécutif. Les régimes qui ont suivi de peu la Révolution ont vidé de sa substance la fonction exécutive. Sous le Consulat, le triumvirat ne servait que de façade à la prise de pouvoir personnel du 1er consul. La Restauration a imité sans succès le régime britannique avant de tomber de nouveau dans les travers monarchiques du passé. La IIème République servit finalement de tremplin à Louis-Napoléon Bonaparte qui accapara toutes les compétences de l'exécutif sous le IInd Empire. La IIIème République ne reconnaissait pas l'existence du Président du Conseil. Mais la pratique fit de ce chef du Gouvernement l'écran entre des parlementaires renversant sans cesse le Gouvernement. Le Président de la République qui, depuis Jules Grévy, avait renoncé à son pouvoir, jouait finalement un rôle mineur. La IVème République fit les mêmes erreurs. Les constituants de 1958 avaient donc pour mission de mettre en place un bicéphalisme de l'exécutif efficace. Le Président a ainsi obtenu d'importants pouvoirs, certains lui étant exclusivement réservés si bien que la Vème République fut qualifiée de « coup d'Etat permanent » par François Mitterrand et de monarchie républicaine. Si la personne du Premier ministre est restée assez effacée durant la période gaulliste et giscardienne, l'arrivée au pouvoir de Mitterrand et les différentes cohabitations qui ont suivi ont mis en valeur la complexité des liens entre le Président et le chef du Gouvernement.
La constitution prévoit une collaboration entre le Chef d'Etat et son Premier ministre. Ils forment les deux têtes du pouvoir exécutif. Mais, comme tout organe, ils tendent à étendre leurs prérogatives et compétences. Les rapports de force se modifient constamment et la frontière entre le pouvoir présidentiel et le pouvoir du chef du Gouvernement n'est pas étanche, comme l'a montré l'histoire de la Vème République. Ces modifications vont se faire en fonction de la correspondance entre l'orientation politique du Président et celle de la majorité parlementaire, entraînant ainsi un déplacement du lieu de pouvoir et transportant les questions partisanes au sommet de la fonction exécutive.
Est-ce que le fait d'associer deux entités politiques différentes à la tête de l'exécutif est la meilleure solution pour obtenir une fonction exécutive efficace et respectueuse du parlementarisme rationalisé ?
Dans un premier temps, nous verrons qu'une collaboration entre le Président et le Premier ministre était prévue par la Constitution. Mais une hiérarchie à géométrie variable va se mettre en place (I). Cette hiérarchie s'explique par la place importante prise par la majorité parlementaire, plaçant au centre du pouvoir les querelles de partis. La nature du régime variera sensiblement en fonction des rapports créés entre le Président et le Premier ministre et la cohabitation, symbolique selon certains d'un mauvais fonctionnement des institutions, va alors être pointée du doigt (II).
[...] Constitutionnellement, le régime reste parlementaire, mais dans la pratique, le Président dispose d'un pouvoir considérable et mène la politique intérieure et extérieure en s'appuyant sur la majorité parlementaire. Le Présidentialisme est donc de rigueur. Le déplacement du lieu du pouvoir exécutif se fait au profit du Président. D'ailleurs le Premier ministre faisant de l'ombre à son Président est écarté. Ainsi De Gaulle ne reconduira pas Pompidou dans ces fonctions suite à la dissolution de 1968, voyant en son chef du Gouvernement un concurrent potentiel. La cohabitation va en revanche rétablir le parlementarisme rationalisé. [...]
[...] Le Président n'a donc jamais refusé l'inscription d'un projet de loi à l'ordre du jour du Conseil des ministres pour ne pas bloquer le mécanisme d'initiative législative. Le chef d'Etat a toujours promulgué les lois adoptées définitivement par le Parlement et n'ayant pas été déclarées inconstitutionnelles. Si le Président a les moyens de gêner ou ralentir l'action du Gouvernement, il ne l'a jamais définitivement bloqué, même en ce qui concerne les pouvoirs partagés ne mettant pas en cause directement l'exercice du pouvoir législatif comme le pouvoir de nomination par exemple. [...]
[...] La IIème République servit finalement de tremplin à Louis-Napoléon Bonaparte qui accapara toutes les compétences de l'exécutif sous le IInd Empire. La IIIème République ne reconnaissait pas l'existence du Président du Conseil. Mais la pratique fit de ce chef du Gouvernement l'écran entre des parlementaires renversant sans cesse le Gouvernement. Le Président de la République qui, depuis Jules Grévy, avait renoncé à son pouvoir, jouait finalement un rôle mineur. La IVème République fit les mêmes erreurs. Les constituants de 1958 avaient donc pour mission de mettre en place un bicéphalisme de l'exécutif efficace. [...]
[...] Il mènera sa campagne au travers d'un parti politique, aura un véritable programme politique intérieur. Alors qu'il était censé jouer le rôle d'arbitre et se placer au-dessus des partis, il va à présent être amené à mettre en œuvre le programme pour lequel il a été élu. Ainsi, en cas de non-cohabitation, la majorité parlementaire est l'expression de la majorité présidentielle. Le Président devient alors le leader de fait de cette majorité. Il entre ainsi de plain-pied dans l'arène de la représentation politique partisane selon Eric Desmons. [...]
[...] Le Président de la République collabore avec lui, et notamment avec le Premier ministre qu'il nomme mais ne peut révoquer. Ainsi, l'article 19 dispose que le chef d'Etat, lorsqu'il n'utilise pas ses pouvoirs dits propres, doit faire contresigner ses actes par le Premier ministre et, le cas échéant, par les ministres responsables Le Gouvernement contrôle ainsi la légalité des décisions prises par le Président et endosse la responsabilité politique qui ne saurait revenir à celui représentant la continuité de l'Etat. [...]
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