« La reconnaissance par la théorie du droit d'un pouvoir discrétionnaire des juges pose à la théorie politique un problème redoutable, celui de la légitimité de ce pouvoir dans un système démocratique ». Michel Troper résume ici en une phrase le questionnement juridico-politique résultant de l'apparition du juge constitutionnel comme un acteur primordial dans le processus d'application du droit.
La question du rôle du juge dans un système globalement démocratique est d'autant plus prégnante en France, que la tradition politique française est fortement marquée par le légicentrisme. Cette doctrine fondant une limitation drastique du rôle du juge, en ce sens que l'ensemble du pouvoir appartient au législateur, la loi étant la seule expression de la souveraineté. Dès lors, conformément à ce que disposait Montesquieu dans l'Esprit des lois : « le juge est la bouche qui prononce les paroles de la loi ».
[...] Naturellement, ce droit est largement utilisé par la clique des monopoles et des exploiteurs afin d'obtenir une déclaration d'inconstitutionnalité à l'encontre des lois qui vont contre leurs intérêts Si on extrait de l'analyse de Diablo et de Vychinski, la vulgate marxiste, l'interrogation qui peut être transposable dans le contexte occidental et celui de l'Etat de droit, tient quant à l'indépendance du juge mais également quant à sa latitude à aller à l'encontre des volontés politiques. En effet, si on considère que le pouvoir du juge constitutionnel est illimité, il faut également considérer que ce juge peut largement contrevenir aux intérêts de la classe politique au pouvoir. [...]
[...] Ce nouveau rapport aux faits tend à l'assimiler à un ingénieur social. Un rôle d'ingénieur social : L'exemple le plus caractéristique mettant en évidence, le pouvoir du juge de déterminer les comportements d'autrui, et sa capacité à exercer un rôle créateur de droit, est cristallisé dans le rôle du juge constitutionnel nord américain, où tant l'école de la sociological jurisprudence que l'école réaliste estime que le droit est ce qu'en fait le juge Selon cette école, le droit, la constitution, leur signification est le fruit de la société et notamment de l'action du juge constitutionnel. [...]
[...] C'est ici dans cette capacité pour le juge constitutionnel à appréhender la réalité sociale afin de faire évoluer le droit positif que s'exprime, le plus manifestement la réalité du pouvoir du juge constitutionnel. Cependant ce pouvoir, cette capacité, au travers de l'analyse de la réalité sociale, à déterminer les comportements des justiciables et des pouvoirs publics, se trouve encadré et par conséquent limité, soit de manière exogène soit de manière endogène, qui fait que le pouvoir du juge est à la mesure de sa modération II- Le pouvoir du juge est à la mesure de sa modération : S'il est indubitable que le juge constitutionnel est détenteur d'un pouvoir créateur de norme qu'il utilise parfois à des fins de transformation sociale ou d'adaptation du droit positif à l'évolution de la société, cette capacité de création malgré le fait qu'elle découle d'une interprétation libre, ne confère pas au juge constitutionnel un pouvoir totalement libre et discrétionnaire. [...]
[...] La question de la méthodologie qui est prépondérante dans les théories des écoles mixtes est également un facteur privant le juge constitutionnel de libre arbitre. A titre d'exemple, pour Friedrich Muller, le processus de concrétisation n'est pas pour autant libre, arbitraire ou ajuridique la concrétisation d'une norme signifie la construction d'une norme juridique, de laquelle il reste encore à dériver la norme-décision. L'élaboration de la norme juridique à partir du texte de norme et des circonstances de l'espèce n'est pas arbitraire au regard du droit. [...]
[...] Michel Troper qui représente indubitablement les juristes faisant du juge un acteur prépondérant dans le processus d'élaboration de la norme juridique et dans la détermination de sa signification, pose tout de même l'existence de contraintes juridiques sur le juge, le privant, donc aisni, de libre arbitre. En effet, sa théorie des contraintes renvoie à l'idée qu'il existe des règles d'interprétation que le juge constitutionnel doit respecter et s'y soumettre. Au nombre de ces règles il énumère notamment l'obligation pour le juge de motiver sa décision, de fonder son interprétation sur des éléments juridiques du fait de la collégialité, ou encore l'obligation pour le juge de rédiger ses décisions de manière pédagogique. [...]
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