"Le juge n'est que la bouche qui prononce les paroles de la loi". Cette fameuse citation de Montesquieu, issue de L'Esprit des Lois (1748), semble au premier abord avoir conservé sa pertinence. En effet, notre système, dit de Civil Law, sous-entend que le juge ne fait qu'appliquer mécaniquement ce que la loi proclame : c'est l'instrument neutre de la réalisation du droit. Il n'a aucun pouvoir de création du droit, dans la mesure où ce pouvoir est entièrement dévolu au corps législatif, qui fonde sa légitimité dans l'expression de la volonté générale qu'il est sensé incarner. L'article 5 du Code Civil interdit ainsi au juge de se prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les cas particuliers qui lui sont soumis. Néanmoins cette vision du juge comme agent neutre de l'application de la loi peut être facilement mise à mal. En effet, il semble qu'aujourd'hui le juge occupe une place bien plus importante que la théorie veut bien lui accorder. Le politique s'adresse de plus en plus souvent au juge pour résoudre des questions majeures, le citoyen a de plus en plus tendance à solliciter le juge en cas de conflit, et les décisions des juges (la jurisprudence) font de plus en plus autorité. Ce phénomène s'observe en France, mais aussi en Italie, en Espagne, ou encore aux Etats-Unis.
[...] Au final, on assiste bien à une montée en puissance du juge puisque son point de vue est de plus en plus pris en compte. Un juge est un professionnel qui participe au fonctionnement de la justice et dont la situation est réglée par le Statut de la Magistrature. On distingue les magistrats du siège des magistrats du parquet et du ministère public. Dans ce sujet, nous évoquerons surtout les juges judiciaires, administratifs et constitutionnels. La constitution de 1958 qui instaure la Vème République instaure un tournant dans le rôle des juges dans la mesure où elle affirme la constitutionnalité et le pouvoir du juge. [...]
[...] On passe en fait progressivement d'une primauté indéniable des droits objectifs à la montée en puissance des droits subjectifs. Ce mouvement va de pair avec la montée en puissance du juge, à la place du législateur. Ex de l'affaire Perruche : la CEDH intervient dans deux arrêts du 6 octobre 2005 et parvient à briser la loi Kouchner de 2002 en dégageant chez l'enfant des droits subjectifs à l'indemnisation étant entré directement dans son patrimoine. On voit bien comme cette judiciarisation et cette subjectivisation accroît la marge de manœuvre du juge, et par là, sa puissance. [...]
[...] On trouve dans cette expression l'idée que le juge veut à tout prix accroître sa puissance. Or, sa puissance s'accroît parce qu'il se retrouve seul face à des questions non réglées par la législation. Les juges sont donc investis de nouvelles fonctions par défaut. Au final ce qu'il faut craindre c'est l'erreur commise par tous de croire que le vrai danger repose dans une trop grande puissance des juges et non dans son abandon. [...]
[...] Mais cette extension ne s'est pas accompagnée de l'augmentation du nombre de juges. Du coup, la montée en puissance du juge que cette extension des fonctions semble invoquer n'est en fait pas vérifiée à cause des dysfonctionnements judiciaires qui se multiplient. Cela nous amène à réfléchir sur la légitimité de la crainte planant autour de la menace d'un gouvernement des juges II) La crainte souvent injustifiée du gouvernement des juges Une puissance du juge mesurée Aujourd'hui encore dans la Constitution de 1958, la Justice est considérée comme une autorité administrative et non pas comme un pouvoir à part entière tel que le serait l'exécutif ou le législatif. [...]
[...] Cela donne un pouvoir considérable au Conseil Constitutionnel. Le Conseil d'Etat lui aussi a su manipuler la hiérarchie des normes. Dans un arrêt dit du conseil national des barreaux du 10 avril 2008, il a su empêcher l'application d'un traité sur la déclaration de soupçons en montrant qu'il était contraire à la CEDH en ce qu'il porte atteinte au secret professionnel, ce qui le rend contraire au droit communautaire. ( La judiciarisation et la subjectivisation de la société : Tout d'abord, on observe une sollicitation croissante du juge. [...]
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