"La loi est l'expression de la volonté générale". Cette formule énoncée à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et empruntée à Jean Jacques Rousseau, comporte deux niveaux de lecture. Elle désigne d'une part l'auteur même de la loi et d'autre part la légitimité qui s'y attache.
Nous n'étudierons pas ici les procédés de démocratie directe et semi-directe tels qu'ils ont cours dans certains cantons suisses ou certains États fédéraux des États-Unis (droit de révocation populaire des élus, véto populaire...), procédés par lesquels le pouvoir législatif est confié directement au peuple, mais trop peu répandus pour faire l'objet d'une étude.
La loi sera entendue ici dans son sens étroit comme l'acte voté par le peuple agissant soit directement par référendum soit par représentation par le biais du parlement. La loi, en tant que produit de la volonté exprès des administrés, présente une très forte légitimité qui en a fait pendant longtemps une norme au sommet de la hiérarchie consacrant ainsi le principe dit de "légalité".
Cette affirmation, valable pendant plus d'un siècle et demi est-elle toujours d'actualité ? En d'autres termes, la loi est-elle encore et toujours la norme juridique par excellence, la "source des sources" du droit ?
[...] En effet, le contrôle exercé par le Conseil constitutionnel est à l'origine un contrôle a priori. L'article 61 alinéa 2 de la Constitution indique que les lois peuvent être déférées au Conseil constitutionnel après leur vote, mais en tout état de cause avant leur promulgation. Le Conseil ne connaît ainsi des lois qu'avant leur entrée en vigueur et à condition qu'il ne s'agisse pas d'une loi référendaire (Conseil constitutionnel 06 novembre 1962). L'importance du contrôle de constitutionnalité des lois a été accrue par la réforme du 29 octobre 1974, laquelle a étendu la possibilité de saisine outre au Président de la République, au Premier Ministre et aux Présidents des assemblées à soixante députés ou sénateurs. [...]
[...] La Cour de cassation était la première à répondre à cette invitation implicite dans un arrêt du 24 mai 1975 Société des cafés Jacques Vabre Elle a été suivie quelques années plus tard par le Conseil d'État dans son arrêt du 20 octobre 1989 Nicolo arrêt faisant prévaloir un traité sur une loi même postérieure et procédant à un revirement de la jurisprudence dite des semoules (CE 01 mars 1968 Syndicat des fabricants de semoule La loi, par le biais de cette exception de conventionnaliste ne paraît donc plus souveraine, celle-ci étant désormais soumise au droit international. Néanmoins, force est de constater qu'il appartient toujours au législateur dans la plupart des cas d'autoriser la ratification ou la dénonciation des traités et que les traités internationaux produisent en principe des normes importantes, mais de façon ponctuelle aucun organe normatif n'étant mis en place. Toute autre est la situation du droit européen à cet égard. [...]
[...] Conclusion : La loi au sens strict semble avoir perdu sa caractéristique première exprimée par JJ Rousseau dans le contrat social. Sa soumission à la Constitution via le contrôle de constitutionnalité d'une part et sa place dans la hiérarchie des normes au regard du droit international et notamment européen d'autre part, ne permettent plus au législateur d'incarner à lui seul la volonté des administrés. La loi au sens strict n'est désormais l'expression de la volonté générale que dans la mesure où elle respecte la loi au sens large entendue comme la règle de droit apparue au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec la reconnaissance de droits et principes fondamentaux de valeur constitutionnelle et internationale. [...]
[...] Le droit communautaire par son foisonnement et son applicabilité directe dessaisis de fait le législateur de ses prérogatives de catalyseur de la volonté générale. Ainsi à du droit des États membres est directement ou indirectement d'origine communautaire et la loi censée incarner l'expression de la volonté générale n'est qu'une norme que le parlement doit adopter s'il veut éviter un éventuel procès en carence qui aboutirait à la condamnation de l'État par la Cour de justice des communautés européennes. C'est pourquoi la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a tenté de renforcer le rôle du Parlement national en mettant en place une saisine systématique du parlement pour les projets d'actes de l'Union européenne (article 88-4) et la possibilité de saisir les institutions communautaires si le parlement estime qu'un projet d'acte communautaire est en contradiction avec le principe de subsidiarité. [...]
[...] Le Conseil constitutionnel défenseur des libertés publiques Le conseil constitutionnel dans sa décision liberté d'association du 16 juillet 1971 est allé au-delà de ce à quoi le destinait le pouvoir constituant. Par cette décision le Conseil constitutionnel s'est érigé en défenseur des libertés publiques en considérant que le préambule de la Constitution faisait partie intégrante du bloc de constitutionnalité. La loi expression de la volonté générale est donc non seulement soumise à la Constitution stricto sensu, mais aussi à son préambule. [...]
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