« C'est une période sombre pour notre justice ». C'est en ces termes que l'ancien président de l'institution, Robert Badinter, a dénoncé le 22 février dernier le défi lancé par le chef de l'Etat au Conseil constitutionnel. Mécontent de la décision des « Sages » qui ont jugé inconstitutionnelle la rétroactivité de la loi sur la rétention de sûreté, Nicolas Sarkozy a en effet demandé au premier président de la Cour de Cassation, de lui « faire des propositions en vue d'une application immédiate de la loi de sûreté censurée » soit, en d'autres termes, de contourner la décision. Ce coup d'éclat n'est pas sans précédents dans l'histoire de la Vème République et s'inscrit même dans la droite ligne des contestations et reproches faits dans le passé au Conseil par le monde politique, et notamment par deux présidents de la République –François Mitterrand et Jacques Chirac, et un Premier ministre -Lionel Jospin.
Paradoxalement, ce regain d'hostilité intervient alors même que le rayonnement du Conseil constitutionnel n'a jamais été aussi fort sur la scène institutionnelle française. Il n'en a pas toujours été ainsi : en créant le Conseil constitutionnel, les auteurs de la Constitution poursuivaient en effet des objectifs assez modestes. Certes, en application de l'article 61.2, le Conseil avait pour mission de contrôler la constitutionnalité des lois mais ce contrôle était dans les faits doublement limité. Le Conseil ne pouvait d'une part être saisi que par de hautes personnalités –Président, Premier ministre...- qui n'étaient à priori pas très enclines à faire contrôler le pouvoir qu'elles incarnaient. D'autre part, la conformité à la Constitution était comprise par référence au texte proprement dit et donc à l'exclusion du préambule, ce qui écartait par là même les grandes normes protectrices des libertés et des droits de 1789 et 1946. Deux événements ont permis la montée en puissance du Conseil Constitutionnel : le premier est dû à la seule volonté du Conseil, qui a décidé dans sa célèbre décision du 16 juillet 1971, de viser « notamment » le préambule et a ainsi reconnu la valeur constitutionnelle de la Déclaration de 1789, du préambule de 1946 et des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Le second événement tient au vote le 29 octobre 1974 d'une révision constitutionnelle modifiant l'article 61 pour permettre à soixante députés ou à soixante sénateurs de saisir le Conseil, ce qui ouvrait sa barre aux groupes parlementaires d'opposition. Dans ces conditions, le nombre de recours a rapidement plus que décuplé cependant que le contrôle, désormais effectué pour l'essentiel par rapport aux grands textes de 1789 et de 1946, orientait la jurisprudence du Conseil vers la protection des libertés publiques et des droits fondamentaux.
Pourquoi, dès lors, le Conseil constitutionnel a-t-il fait l'objet de contestations si régulières ? Le Conseil constitutionnel dispose d'une compétence d'attribution dans plusieurs domaines, de natures électorale et consultative notamment. Pour comprendre la véhémence des critiques qui lui ont été adressées, il faut cependant s'attacher à sa fonction principale qui consiste à contrôler un certain nombre de normes, dont les lois, par rapport à la Constitution. Plusieurs questions peuvent à cet égard être posées : le Conseil constitutionnel dispose-t-il d'une légitimité suffisante pour exercer un contrôle de constitutionnalité qui, depuis 1971, ne cesse d'accroître son ampleur ? Permet-il de garantir le contrôle effectif des normes? Ces questions ne sont pas anodines : il s'agit, à travers elles, de savoir si les faiblesses du Conseil peuvent être jugées telles à justifier l'abandon de l'institution. Faut-il, en un mot, supprimer le Conseil constitutionnel ?
[...] Faut-il supprimer le Conseil Constitutionnel ? C'est une période sombre pour notre justice C'est en ces termes que l'ancien président de l'institution, Robert Badinter, a dénoncé le 22 février dernier le défi lancé par le chef de l'Etat au Conseil constitutionnel. Mécontent de la décision des Sages qui ont jugé inconstitutionnelle la rétroactivité de la loi sur la rétention de sûreté, Nicolas Sarkozy a en effet demandé au premier président de la Cour de Cassation, de lui faire des propositions en vue d'une application immédiate de la loi de sûreté censurée soit, en d'autres termes, de contourner la décision. [...]
[...] Mais des progrès importants restent encore à faire Le Conseil constitutionnel, troisième Chambre du processus normatif ? Le Conseil constitutionnel, co-législateur ou troisième Chambre La question de la légitimité de l'action du Conseil constitutionnel s'exprime avec le plus de prégnance dans la critique de son rôle dans le processus normatif. La fonction exercée par le Conseil constitutionnel le fait par nature participer au processus normatif, serait-ce que négativement ; mais sa légitimé à le faire peut être mise en cause lorsque celui-ci recourt à la notion d'erreur manifeste ou assortit ses décisions de réserves d'interprétations. [...]
[...] La jurisprudence a permis d'assurer le respect des prérogatives respectives du gouvernement et du Parlement, afin qu'aucun de ces deux pouvoirs ne domine l'autre et ne que l'équilibre institué par les constituants ne soit pas compromis. De nombreuses décisions ont ainsi sanctionné les pratiques parlementaires tendant à la restauration des propositions de résolution, à la pratique abusive du droit d'amendement, à la limitation du pouvoir d'initiative du Parlement, à la mise en jeu de la responsabilité gouvernementale en dehors des procédures prévues par la Constitution. Mais, en sens inverse, le Conseil constitutionnel veille à la sauvegarde des droits du Parlement. [...]
[...] La tension des rapports entre le Conseil constitutionnel et le monde politique. Il n'est pas étonnant, puisque le Conseil constitutionnel sans fondement- a pu être perçu comme «troisième Chambre que les rapports aient si souvent été tendus avec le monde politique dans le passé. Un cas notable est celui de d'octobre 1981, lorsque le Conseil constitutionnel –alors majoritairement à droite- a modéré par sa décision du 16 janvier 1982 beaucoup de la loi de nationalisation, ce qui a fait dire à l'époque à Lionel Jospin que Jamais, dans l'histoire, les grands courants de réforme ne se sont laissés arrêter par les Cours suprêmes B. [...]
[...] - seconde proposition : admettre les questions préjudicielles de constitutionnalité avec un ensemble de précautions. Le juge de fond doit pouvoir rejeter les questions manifestement mal fondées, comme le fait le juge a quo italien. La disposition de la loi contestée doit répondre à deux conditions impératives : ne pas avoir été déjà déclarée conforme par le Conseil constitutionnel lors du contrôle a priori et commander l'issue du litige, la validité de la procédure ou en matière pénale, le fondement des poursuites, conditions qui avaient déjà été proposées en 1990 lors de la première tentative pour créer un tel système. [...]
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