Les gouvernants connaissent, ou non, deux types de responsabilité : la responsabilité politique, ils ont alors à répondre des actes entrepris dans l'exercice de leurs fonctions et pour lesquels ils ont été choisis à leur poste, et surtout des résultats de leur action ; et la responsabilité pénale, c'est-à-dire leur responsabilité dans des crimes et délits, dans des actes détachables ou non de leurs fonctions. Récemment, en 1999, trois membres du gouvernement ont vu leur responsabilité pénale mise en cause et ont eu à répondre de leurs actes dans l'affaire dite du "sang contaminé" devant la Cour de Justice de la République. Ce régime de la responsabilité pénale des ministres n'est pas nouveau : il était déjà connu sous la IIIème et la IVème République. Sous la Vème République, c'est l'article 68 de la Constitution qui le met en place, tout du moins jusqu'en 1993, date à laquelle le régime a changé, suite notamment à cette affaire du "sang contaminé" qui a créé le scandale en 1991. Avant cette révision, la responsabilité pénale d'aucun ministre n'a été mise en cause et il n'y eut jamais aucun jugement.
[...] La valeur du nouveau régime de responsabilité pénale des ministres La Cour de Justice de la République, trop politique dans sa composition et impunitive La Cour de Justice de la République comprend en son sein trois magistrats professionnels. La composition de la Haute Cour de Justice, anciennement compétente pour juger les ministres était uniquement composée d'hommes politiques ; le but de la révision de 1993 était de créer un compromis entre justice ordinaire et justice politique. Cependant, la présence de trois magistrats seulement, sur les quinze juges présents, serait insuffisante pour lever le doute sur une justice uniquement politique. [...]
[...] Le risque de cette pénalisation de la responsabilité des ministres est que cette responsabilité pénale se substitue à la responsabilité politique individuelle d'un ministre. En effet, la responsabilité politique aujourd'hui est collective. La responsabilité pénale permettrait d'individualiser la responsabilité politique. Déjà, l'usage veut qu'un ministre en examen ou susceptible de l'être, pour des faits détachables de l'exercice de son ministère, démissionne du gouvernement, ou ne soit pas reconduit dans ses fonctions. Ce fut le cas par exemple pour Bernard Tapie dans le gouvernement Bérégovoy ou encore de Dominique Strauss-Kahn en 1999 dans le gouvernement Jospin. L'usage n'est cependant pas toujours respecté. [...]
[...] Pour être saisie, un acte d'accusation doit être voté en termes identiques par les deux assemblées par la majorité absolue de leur membre, au scrutin public. Cette juridiction est compétente pour les actes des ministres commis dans l'exercice de leurs fonctions. La jurisprudence de la Cour de Cassation va encore plus loin en se refusant à faire une distinction entre les infractions pénales détachables de l'exercice des fonctions des ministres et celles non détachables. La Haute Cour se voit donc conférer une compétence exclusive pour connaître de la responsabilité pénale des ministres. [...]
[...] Alors que seuls les parlementaires pouvaient déposer des mises en accusation, aujourd'hui les simples particuliers et le ministère public, par l'intermédiaire du procureur général près la Cour de Cassation, peuvent désormais le faire. C'est pourquoi a été mise en place une commission des requêtes, chargée de filtrer les plaintes. Elle est composée de 7 magistrats, provenant de la Cour de Cassation, du Conseil d'Etat et de la Cour des Comptes. Si la requête est acceptée, la commission des requêtes la transmet au procureur général près la Cour de Cassation pour qu'il saisisse la Cour de Justice de la République. [...]
[...] Cette régression de la protection des ministres est très contrastée avec la progression de celle du chef de l'Etat. En effet, le Président de la République ne peut être poursuivi sur le plan pénal (sauf cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de ses fonctions) pendant la durée de son mandat (arrêt du Conseil Constitutionnel du 22 janvier, arrêt de la Cour de Cassation du 10 octobre 2001 consacrés par la révision de février 2007) alors que les ministres peuvent être poursuivis au plan pénal quelque soit la nature des actes concernés. [...]
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