Que les choses soient claires : l'idée d'organiser les pouvoirs publics de manière à ce que l'assemblée législative représentant le peuple soit l'organe prépondérant est très ancienne. C'était la conception des démocrates sous la révolution, qui s'inspiraient de Rousseau pour dire que l'organe exécutif devait être subordonnée, ne faire qu'exécuter les ordres de l'assemblée. D'autres critiquaient cette idée, en disant que l'assemblée serait toute-puissante ; et à l'appui de cette thèse, ils avançaient que cela reviendrait à organiser un « régime conventionnel ». Mais il ne faut pas s'y tromper, ils ne faisaient ainsi que se référer à la pratique concrète de la Convention nationale de 1792. Ils ne parlaient donc pas d'une classe de régimes, mais de ressemblances avec un régime concret (celui ayant existé en France entre 1792 et 1795).
Ce qui nous intéresse ici, c'est de savoir quand on a commencé à parler du régime d'assemblée comme d'une « catégorie » de régimes, en tant qu'elle s'oppose aux deux autres. Or, cette création remonte tout simplement à la naissance de la classification traditionnelle : celle-ci comprenait en effet non pas deux, mais trois régimes. On examinera d'abord la manière dont cette idée (qui ne va pas de soi !) de classer les régimes par "catégorie" est apparue (A), avant d'analyser le rôle, la fonction, que jouait la notion de « régime d'assemblée » dans cette classification (B).
[...] Chacun d'entre eux justifie ainsi l'existence des règles ou institutions correspondantes (présidence de la République, droit de dissolution, bicamérisme) dans le régime parlementaire et donc dans celui de la IIIe République. Ainsi apparaît nettement la fonction remplie par la notion de régime d'assemblée * * * Bibliographie : ARDANT Ph., Institutions politiques et droit constitutionnel, L.G.D.J. CHAGNOLLAUD D., Tome II, Le régime politique français, A. Colin. CHANTEBOUT B., Droit constitutionnel et science politique, A. Colin. - Brève histoire politique et constitutionnelle de la Vème République, A. Colin. [...]
[...] En effet, les auteurs sont évidemment en désaccord sur les garanties en question : si ériger une disposition constitutionnelle en critère de distinction entre ces deux types de régimes revient à démontrer qu'elle doit subsister, l'identification desdits critères devient un enjeu idéologique et doctrinal essentiel. Il n'est dès lors pas étonnant de voir les auteurs se déterminer à cet égard selon les options théoriques ou leurs opinions respectives. Si Adhémar Esmein insiste par exemple particulièrement, pour caractériser le “régime d'assemblée”, sur l'absence d'un chef de l'État irresponsable, Léon Duguit souligne plutôt l'inexistence de moyens d'action réciproques entre l'Exécutif et le Législatif, tandis que pour Maurice Hauriou, le régime d'assemblée se résume pour ainsi dire au monocamérisme. [...]
[...] Elle est apparue à la fin du XIXe siècle, sur l'idée semble-t-il d'Adhémar Esmein (Éléments de droit constitutionnel, 1896). Avant cela, au cours du XIXe siècle, on se contentait de décrire des pratiques concrètes. Et l'une des choses qui frappait le plus les observateurs, c'était précisément que deux pratiques (celle des États-Unis et de la Grande-Bretagne) se sont éloignées l'une de l'autre, à partir de systèmes institutionnels assez proches l'un de l'autre. Au départ, en Angleterre, il y avait un système balance des pouvoirs, c'est-à-dire que le pouvoir législatif était partagé. [...]
[...] Au moment où elle apparaît, la classification des régimes politiques comprend donc non pas deux mais trois catégories, et le “régime d'assemblée” y remplit une fonction fondamentale. Il est destiné à justifier le régime parlementaire et à en souligner le caractère “libéral” (c'est-à-dire non-despotique, respectueux de la règle de séparation des pouvoirs). Cette justification opère en fait doublement. D'une part, le concept de “régime d'assemblée” ainsi spécifié permet de présenter le régime parlementaire comme étant par définition un régime de séparation des pouvoirs puisque c'est précisément ce qui différencie celui-ci de celui-là. [...]
[...] Il le fait de façon très efficace, mais aussi fort simple. Plutôt que de prouver le respect de la séparation des pouvoirs par le système institutionnel français, son idée consiste précisément à intégrer l'idée que le régime parlementaire est respectueux du principe de séparation des pouvoirs dans le critère même d'une distinction théorique entre des classes de régimes. Ainsi, Esmein propose de concevoir les régimes anglais et américains comme deux applications différentes de la règle de la séparation des pouvoirs. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture