démocratie participative, démocratie libérale contemporaine, révision constitutionnelle, utopie, Thomas More, bon fonctionnement de la représentation, démocraties contemporaines
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, modifiant l'article 11 de la Constitution, y introduisit la possibilité de recourir à un référendum dit d'initiative populaire. Cette procédure ne contraint pas à la tenue d'une consultation directe du peuple, l'examen de la proposition de loi concernée par le Parlement étant suffisant. En outre, l'initiative de la proposition de loi n'appartient non pas aux électeurs, mais bien à un cinquième des membres du Parlement. Au total, il ne s'agit donc ni d'un référendum obligatoire ni d'une initiative populaire. Pourtant, plus de cinq ans furent nécessaires pour que soit promulguée la loi organique permettant l'application de cette nouvelle disposition. Les précautions prises par le législateur illustrent la réticence de la classe politique française à confier au peuple la possibilité d'intervenir dans l'action publique en dehors des élections. La démocratie serait dès lors résolument indirecte, élective et représentative.
[...] Puisque le citoyen ordinaire ne dispose que de peu de compétence politique et recherche avant tout à protéger ses libertés individuelles, la démocratie participative comporte le risque de reproduire les effets de l'élection et de la représentation, auxquels elle vise précisément à remédier. Guy Hermet constate ainsi que les expériences de démocratie participative peuvent être accaparées à leur tour par des militants professionnels. Le recours au tirage au sort ne suffit pas ; au cours des délibérations d'un jury citoyen ou d'une conférence de consensus, les participants à fort capital culturel se retrouvent favorisés et avancent leur intérêt privé. [...]
[...] Or, les préférences de ces élites élues ne se confondent pas forcément avec celles des citoyens ordinaires. Le manque de confiance et de légitimité que placent les citoyens dans leurs représentants dérive en partie de l'accaparement des postes de décision publique par une classe sociale bien déterminée. Or, la démocratie participative permet aux citoyens non professionnels de la politique de réinvestir le champ de celle-ci et concourir à son élaboration. Pour Yves Sintomer, la démocratie participative s'apparente à la notion de contre-factuel. [...]
[...] La réunion de citoyens dits ordinaires ne saurait statistiquement constituer un salon du Siècle des Lumières, cette meilleure école d'expression et d'idées qu'ait connue le monde moderne selon Édith Wharton. Dès les années 1950, Lazarsfeld, Berelson et McPhee mettaient en évidence la faiblesse de la compétence politique du citoyen, confirmée depuis par la sociologie politique française. À cette incompétence politique s'ajoute le manque d'intérêt des citoyens pour l'action publique. Pierre Bourdieu évoquait ainsi la remise de soi des citoyens à d'autres. Certes, la démocratie participative n'ignore pas ce manque de compétence et d'intérêt pour la politique, qui caractérise le citoyen ordinaire. [...]
[...] Ainsi, la démocratie participative, en réintroduisant le citoyen à l'action publique, relève d'une logique née avec le principe même de démocratie. Elle brise le monopole de l'élu pour associer directement le citoyen au processus décisionnel, sans tomber dans une démocratie d'opinion. Ce faisant, elle apporte à la démocratie un nouveau souffle susceptible de contribuer à sa pérennisation. Pour autant, elle n'est pas un horizon inéluctable de la démocratie résultant d'une égalisation des conditions tocquevillienne. Ne pouvant remplacer la démocratie représentative dans la société contemporaine, elle s'y combinerait en revanche utilement. [...]
[...] Sans aller aussi loin, la volonté de succès et de réélection, entretenue par la médiatisation accrue du politique, guide au quotidien l'action du représentant. La démocratie participative propose à l'inverse un cadre alternatif à la discussion, dégagé des intérêts privés du système politique. Plus généralement, les conflits d'intérêts des politiques qu'ils existent ou soient soupçonnés, affectent gravement le modèle représentatif, ou du moins la perception qu'en ont les citoyens. En introduisant des politiques occasionnels la démocratie participative institue les conditions d'une délibération saine. [...]
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