IIIe République, volonté générale, volonté nationale, philosophie politique, droit constitutionnel, Bill of Rights, Jean-Jacques Rousseau, régime républicain, Carré de Malberg
La IIIe République, après un retour en grâce du régime républicain en 1770 après vingt-huit ans de régime impérial via le Second Empire (1852-1870), réhabilite directement ces grandes figures de l'épopée républicaine a priori que représente Rousseau. Quant aux institutions de la IIIe République, elles présentent une particularité dans la mesure où l'édifice constitutionnel de ce régime est « composé de trois lois constitutionnelles du 24 février, du 25 février et 16 juillet 1875 » et devaient en premier lieu aboutir au rétablissement de la monarchie du fait de l'élection d'un président de la République favorable à la monarchie, Patrice de Mac-Mahon. Dans cette réhabilitation de la IIIe République toutefois, des notions philosophiques sont expurgées du simple domaine de réflexion pour devenir des normes et des références législatives, voire constitutionnelles. Ainsi en est-il du concept de volonté générale ancré au coeur de la conception légicentrée du pouvoir dans la IIIe République. Or cette conception est elle-même héritière de 1789, où « la loi est l'expression de la volonté générale en trois sens » : la loi est produite ; la loi est générale ; la loi est totale (dans le sens où « tout le droit sera compris dans la loi »). La volonté générale apparait donc comme une source mystérieuse de la loi en tant que la norme législative incarne le droit.
[...] Or le pouvoir « doit être au moins ordonné et limité sur le plan matériel et formel de telle manière que le règne de la véritable volonté générale soit réalisé le plus fidèlement et loyalement possible, par l'intermédiaire de son activité et de son interaction ordonnée avec le pouvoir de gouvernement ». Cette limitation matérielle et formelle est un préalable à la rationalisation de toute entreprise politique et juridique et, finalement, à la rationalisation de l'activité parlementaire elle-même dans le contexte de la IIIe République. En effet, « la volonté générale n'existe qu'en s'exprimant sous forme de lois, et la première de ces lois est la constitution que le peuple se donne ». Logiquement, donc, le peuple doit pouvoir avoir accès à cette loi fondamentale qu'il s'est lui-même donnée. [...]
[...] Pour Sieyès, par exemple, « le sujet de la souveraineté est la volonté nationale enracinée dans les volontés individuelles » et pour s'exprimer, la nation « a besoin d'institutions pour s'objectiver ». Dans la volonté nationale exprimée par la souveraineté nationale, la nation « constitue une personne juridique distincte des individus qui la composent » ; en revanche, dans la volonté générale exprimée par la souveraineté populaire, « la souveraineté ( . ) doit pouvoir se déduire à partir de la volonté des individus qui lui sont soumis », d'où l'accent mis sur l'éducation au sein de la IIIe République et la formation de « citoyens » tout à la fois républicains. [...]
[...] Dès lors, dans quelle mesure la volonté générale est-elle effectivement un concept fondamental au sein des institutions constitutionnelles de la IIIe République ? Si le concept de volonté générale est une notion fondamentale des institutions démocratiques qu'entend progressivement dessiner la IIIe République au sein de sa « constitution politique » il l'est également au regard de sa « constitution juridique » au sens propre, c'est-à-dire par rapport aux sources et au fonctionnement constitutionnel de la IIIe République entre 1870 et 1940 (II). [...]
[...] Constitution juridique se confond avec constitution politique. Tout d'abord, le Parlement est la garantie fondamentale de ne pas retrouver un « exécutif fort » dans le logiciel républicain, cet exécutif fort ayant, pour les républicains, amené à la présidentialisation à outrance des régimes institutionnels - ainsi en était-il du Second Empire. « La loi, expression de la volonté générale, est l'œuvre du Parlement qui en fixe seul le domaine et qui détermine lui-même la limite entre la loi qu'il édicte, et le règlement qui relève de la compétence de l'exécutif ». [...]
[...] La volonté générale promue par Rousseau est celle de la démocratie, qui ne peut être que totale ; la volonté nationale in fine promue par la République est celle d'une démocratie libérale. Car la république, « c'est au départ la `chose publique' ( . ) où les lois sont guidées par la volonté générale et l'intérêt public ». La volonté générale de la IIIe République n'est pas un agrégat de volontés individuelles, ce qui aboutit au fait « que le légicentrisme de la Troisième République [qui] a contribué au renforcement des libertés publiques » a également consacré « l'absence de dispositions constitutionnelles [protégeant les] droits et libertés ». [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture