Politique, fait majoritaire, président de la République, Ve République, concentration de pouvoirs, majorité parlementaire, Michel Debré
Michel Debré, principal artisan de la Constitution de 1958, écrivait : « Le président de la République est la clé de voûte de nos institutions ». Il caractérisait ainsi le rôle central que le président occupe dans le régime de la Cinquième République, rôle qui semble se renforcer sous l'effet du fait majoritaire. Dans cette conception, le président, élu au suffrage universel direct depuis 1962, incarne l'autorité suprême de l'État, soutenu par une majorité parlementaire souvent alignée sur ses orientations politiques. Il n'est cependant en rien garanti que cette domination présidentielle, en apparence consolidée par le fait majoritaire, soit sans limites. Il est donc nécessaire de s'interroger quant à la portée et aux conséquences de cette relation institutionnelle.
[...] En effet, l'efficacité présidentielle repose sur la cohésion et la discipline de la majorité parlementaire, un équilibre parfois fragile. Derrière la solidité institutionnelle du fait majoritaire se dessinent ainsi des contraintes et des limites qui révèlent la dépendance du président envers sa propre majorité. II) Une présidence dépendante et limitée par le fait majoritaire Si le fait majoritaire confère au président une large capacité d'action, son influence demeure conditionnée par la gestion de sa majorité, dont la cohésion est indispensable à l'exercice du pouvoir Toutefois, lorsque cet équilibre se brise, que ce soit en période de cohabitation ou à la suite d'un revers électoral, il devient une contrainte qui limite considérablement la présidence A. [...]
[...] Les divergences internes, les fractures idéologiques ou les tensions au sein de la majorité parlementaire, comme l'ont montré les tensions entre le PS et les Verts sous François Hollande, limitent fréquemment son autonomie et peuvent freiner son action. Ainsi, il existe un décalage entre l'apparente toute-puissance présidentielle et les limites institutionnelles et politiques que le fait majoritaire peut entraîner. Il s'agit donc de se demander dans quelle mesure le fait majoritaire place-t-il la présidence sous la Vème République dans une relation de dépendance avec sa majorité parlementaire ? [...]
[...] Par exemple, sous la présidence de Charles de Gaulle, fort de la majorité acquise à l'UNR, le président a pu imposer des décisions majeures comme le référendum de 1962 sur l'élection du président au suffrage universel direct, contournant ainsi les réticences de certains parlementaires. De même, François Mitterrand, lors de son premier mandat (1981-1986), a profité d'une « vague rose » pour mener des réformes d'envergure telles que l'abolition de la peine de mort, soutenu par une majorité socialiste largement favorable. Toutefois, ce fait majoritaire, présenté comme un avantage institutionnel pour la présidence, peut en réalité devenir un facteur de contrainte. [...]
[...] Cela montre que le président ne peut exercer son pouvoir sans tenir compte des équilibres internes de sa majorité, ce qui limite sa capacité d'action. Cette dépendance au soutien parlementaire est encore plus évidente lorsqu'un président ne parvient pas à maintenir une discipline stricte au sein de son camp. Même avec une majorité théorique, un chef de l'État doit composer avec les différents courants de son parti et faire des compromis pour éviter les blocages législatifs. P. Avril, dans « Équilibrer la présidence quinquennale ? [...]
[...] L'autre conséquence majeure du fait majoritaire est qu'il soumet de facto le pouvoir législatif à l'exécutif. L'Assemblée nationale, bien que constitutionnellement indépendante, devient une chambre d'enregistrement des volontés présidentielles. En effet, le gouvernement peut imposer ses décisions grâce à des mécanismes tels que l'article 49-3, qui permet l'adoption d'un texte sans vote, sauf en cas de motion de censure. Cet instrument a été utilisé à plusieurs reprises pour faire passer des réformes importantes, comme sous Édouard Philippe en 2020 pour la réforme des retraites. [...]
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