Comme l'observait dès 1835 Alexis de Tocqueville dans De la démocratie en Amérique, « ce qu'un étranger comprend avec le plus de peine aux Etats-Unis, c'est l'organisation judiciaire. Il n'y a pour ainsi dire pas d'évènement politique dans lequel il n'entende invoquer l'autorité d'un juge ; et il en conclut naturellement qu'aux Etats-Unis, le juge est une des premières puissances politiques ».
Ces remarques sont toujours autant d'actualité de nos jours, et il est devenu courant, parmi ceux qui s'inquiètent du pouvoir croissant du pouvoir judiciaire dans la vie publique, de parler de « gouvernement des juges ». Dans cette justice considérée, à tort ou à raison, comme toute puissante, la Cour Suprême occupe une place centrale, et est même devenue au fil du temps une des composantes principales du système politique américain.
Mais, si le judiciaire, et plus précisément la Cour Suprême ont un pouvoir si important dans le domaine politique, on ne peut que se demander si les décisions qui y sont prises peuvent rester totalement neutres, et si ce n'est pas le cas, quels sont les risques que cela entraîne pour la démocratie américaine.
On va donc, dans un premier temps, s'attacher à décrire les pouvoirs et le fonctionnement de la Cour Suprême, avant de s'interroger, à travers le processus de nomination et l'évolution historique de la Cour, sur l'indépendance réelle ou supposée des juges qui la forment.
[...] Les Présidents gardent en effet en tête, au moment de la désignation, qu'il serait politiquement coûteux de présenter un juge qui, par la suite, va les empêcher de mettre en place leur politique, tout comme le parti majoritaire au Sénat va éviter les juges qui seraient susceptibles de paralyser le travail législatif. Tant à la Maison-Blanche qu'au Capitole, on garde en effet un fort mauvais souvenir de la période 1933-1941 ou la Cour Suprême entra souvent en conflit avec Roosevelt et les démocrates. Bien que les juges aient dans leur grande majorité une formation juridique, moins d'un tiers d'entre eux ont eu une expérience antérieure de juge. Comme on l'a dit plus haut, la Cour Suprême doit au mieux coller aux réalités sociales des Etats-Unis. [...]
[...] Et si la Cour Hugues va aux rebours de l'opinion publique dans un sens conservateur, les Cours Stone, Vinson et surtout Warren, de 1941 à 1969, vont se faire avant-gardistes sur le plan des libertés et principalement de la discrimination raciale, jusqu'à ce que les présidents Kennedy (1960-63) et plus encore Johnson (1963-68) ne se saisissent de ce problème. En 1954, la Cour décide que toute séparation sur des bases raciales est contraire à la Constitution, protégeant les noirs du Sud contre la discrimination et défendant le droit de vote pour tous. Depuis 1969, les Cours Burger, Rehnquist puis Roberts sont revenues à des décisions plus conservatrices. Mais elles n'ont pas remis en cause les grandes lignes de l'héritage Warren. [...]
[...] Cette Cour à contribué à élever la Cour Suprême au même rang que la présidence et le Congrès, comme on l'a vu avec l'arrêt Marbury v. Madison, qui lui donna le judicial review, le pouvoir de constitutionnalité de la loi. La Cour Taney (1835-1864), fut surtout confrontée à la question de l'esclavagisme, sur laquelle elle eut une attitude instable : d'abord plutôt favorable aux anti-esclavagistes, elle du, pour protéger les Etats-Unis de la sécession menaçante, rendre en 1857 l'esclavage constitutionnel, refusant donc au Congrès les droits de décider si les nouveaux Etats entrant dans l'Union seraient ou non esclavagistes. [...]
[...] Agissant comme nos cours d'appel, elle ne tient compte dans ses jugements que des dossiers dont elle dispose. Cependant, bien que la Cour ne soit pas sensée juger sur le fond des affaires qui lui sont soumises, ses arrêts correspondent bien souvent à cette catégorie de jugement. En effet, lorsqu'elle décide qu'une pratique ou une loi sont inconstitutionnelles, elle indique ce qui est légitime et ce qui ne l'est pas. Un exemple récent concerne les individus qui peuvent bénéficier de la loi sur les handicaps. [...]
[...] En effet, les juges à la Cour Suprême doivent leur nomination aux deux autres branches du gouvernement fédéral, puisqu'ils sont nommés par le Président et confirmés par le Sénat, un des deux organes du pouvoir législatif avec la Chambre des Représentants. Très logiquement le processus de recrutement est hautement politique. En effet, plus de 80% des juges nommés ont occupé précédemment une fonction politique à un moment ou à un autre de leur carrière avant d'être appelés à la Cour. De plus, une certaine convergence avec la philosophie politique du Président est un critère auquel il convient en général de satisfaire. [...]
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