« Je ne connais aucun pays ayant développé une autorité judiciaire aussi impressionnante que celle des États-Unis » écrivait, en 1837, Alexis de Tocqueville. La Cour suprême – plus haute instance juridictionnelle des États-Unis – trouve son origine, en grande partie, dans l'engagement profond du peuple américain envers l'autorité de la loi et la préservation de sa Constitution écrite, la plus ancienne toujours en vigueur. Malgré ce prestige, la Cour suprême est longtemps restée l'institution américaine la plus imperméable à l'esprit juridique français. Élevés dans une culture de défiance à l'égard du pouvoir judiciaire, les Français y voyaient avant toute chose une institution antidémocratique : le « gouvernement des juges ». La jurisprudence de la Cour ayant considérablement évolué, les idées ne sont plus aussi négatives. Mais la Cour suprême reste encore une institution mal connue. Contrairement à l'opinion commune, elle n'est pas vraiment comparable aux cours constitutionnelles européennes, même pas à la Cour allemande de Karlsruhe, qui pourtant lui doit tant, et encore moins à notre Conseil constitutionnel.
Le Conseil constitutionnel français, lui, n'est pas la plus haute instance juridictionnelle de France et, s'il bénéficie d'une autorité très importante, il a néanmoins un pouvoir plus restreint que la Cour suprême. Sa qualification même est plus complexe que celle de la Cour suprême : il est une juridiction politique. Ces termes expriment le caractère ambigu de l'institution : son rôle est celui d'un juge, mais il est exercé dans des matières politiques et plus encore dans des buts politiques ; ses membres doivent avoir l'indépendance de magistrats mais leur recrutement est politique. En dépit de nombreuses différences marquées entre la juridiction constitutionnelle française et la Cour suprême des États-Unis, l'on peut tirer des leçons communes de l'expérience riche de la Cour américaine en matière de contrôle de constitutionnalité des lois. Le premier enseignement est lié à la finalité même de ce contrôle : il s'inscrit clairement dans le long terme et les membres des juridictions constitutionnelles, en France comme aux États-Unis, au-delà des préoccupations conjoncturelles, s'appuient sur des valeurs durables. La seconde idée concerne plus spécifiquement l'attitude du juge constitutionnel : libre de ses convictions, ce juge se doit néanmoins d'observer une certaine réserve (« self restraint »). Il lui appartient, en effet, à travers chacune de ses décisions, de concilier le respect de la souveraineté du peuple avec les notions de suprématie de la Constitution et d'État de droit. Enfin, un autre enseignement est apporté sur l'évolution des juridictions constitutionnelles : ni les premiers constituants américains, ni les quatre juges formant la première Cour suprême, en 1790 à New York, ne pouvaient imaginer ce que deviendrait cette Cour des années plus tard. De la même manière, le constituant français de 1958 ne pouvait pas exactement mesurer l'impact de la création en France d'un système de contrôle de la loi.
[...] Comme celle des ambassadeurs, des autres ministres et consuls, et celle de tous les autres hauts fonctionnaires des États-Unis, la nomination des juges de la Cour suprême fait l'objet d'une procédure en deux temps. Ils sont désignés par le Président et doivent être confirmés par le Sénat (article II, Section 2 de la Constitution). Le Président des États-Unis a une très grande liberté de choix dans la désignation des candidats qu'il souhaite proposer au Sénat pour exercer les fonctions de juges ou, si le siège est vacant, celle de président de la Cour suprême. La Constitution n'impose aucune qualification particulière, ni d'âge, ni même de formation. [...]
[...] Enfin, un autre enseignement est apporté sur l'évolution des juridictions constitutionnelles : ni les premiers constituants américains, ni les quatre juges formant la première Cour suprême, en 1790 à New York, ne pouvaient imaginer ce que deviendrait cette Cour des années plus tard. De la même manière, le constituant français de 1958 ne pouvait pas exactement mesurer l'impact de la création en France d'un système de contrôle de la loi. S'intéresser aux cours constitutionnelles française et américaine invite inévitablement à les comparer. Mais jusqu'à quel point cette comparaison est-elle possible ? [...]
[...] Pour assurer la continuité, le Conseil constitutionnel se renouvelle par tiers tous les trois ans. Le Président de la République nomme l'un des membres du Conseil comme président. Les anciens présidents de la République sont membres de droit, à vie. Mais jusqu'à aujourd'hui, seuls trois anciens présidents ont siégé en cette qualité : au début des années 1960, Vincent Auriol et René Coty, tous deux présidents sous la Quatrième République et, depuis avril 2004, Valéry Giscard d'Estaing, chef de l'État sous la Cinquième République. [...]
[...] Celle-ci est née de ce qu'un juge du fond a déclaré qu'il souhaitait disposer des enregistrements des conversations qui ont eu lieu dans le Bureau ovale entre le président Richard Nixon et ses conseillers et que ces éléments de preuve sont nécessaires à la poursuite du procès pénal en cours. Ainsi, un tribunal de première instance a enjoint le Président de présenter les bandes d'enregistrement en cause. Le Président était-il tenu de se conformer à cette injonction ? La question fut tranchée par la Cour suprême. La Cour confirma en effet la décision des juges du fond selon laquelle les enregistrements étaient nécessaires aux fins de la procédure pénale et devaient être fournis. Le Président remit les enregistrements à la Cour. [...]
[...] Le développement de la jurisprudence du Conseil constitutionnel a entraîné des critiques. Compte tenu de sa marge d'appréciation dans le recours aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et de sa technique de la constitutionnalité sous réserve, consistant à déclarer la loi inconstitutionnelle dans la mesure où elle sera appliquée telle qu'il l'interprète, l'épouvantail d'un gouvernement des juges a été agité. Cependant, le Conseil prend bien soin d'éviter tout contrôle de l'opportunité de la loi. De plus, en 1993, la révision constitutionnelle, faisant suite à la décision du Conseil sur le droit d'asile, a bien montré que le pouvoir constituant, s'il était en désaccord avec une décision du Conseil, gardait le dernier mot. [...]
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