S' il est constant que les décisions du Conseil Constitutionnel « s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles » (art 62 al 3 C), il n'en demeure pas moins que ces autorités en l'absence de contrôle a postériori précisément définit dans la Constitution ont dû en forger les mécanismes à travers la pratique, étant d'une part entendu que si le juge constitutionnel dispose du pouvoir de bloquer la promulgation de la disposition en cause, et d'ici à quelques semaines du pouvoir d'abroger la disposition déclarée inconstitutionnelle, il ne dispose pas d'un monopole d'interprétation du texte suprême, et que d'autre part, le juge (judiciaire comme administratif) ne peut se retrancher derrière une éventuelle « obscurité de la loi » pour refuser de rendre la justice (art 4 du Code Civil). Par autorités juridictionnelles, la Constitution fait sans nul doute référence aux deux cours suprêmes instituées en France, à savoir la Cour de cassation et le Conseil d'Etat.
Il convient de s'intéresser plus particulièrement au Conseil d'Etat, dans la mesure où cette cour instituée par la Constitution du Consulat (art 52 de la Constitution du 22 frimaire de l'an VIII) a une double mission. Effectivement, il jouit d'une compétence pleine et entière en matière de contentieux administratif (juge de premier ressort et de cassation) et ce, dans le cadre d'une justice déléguée depuis la loi du 24 mai 1872 consacrant la fin de la théorie du ministre juge. En outre - et c'est là un rôle important- il doit être consulté sur les projets de loi du gouvernement au sens des dispositions de l'article 39 alinéa 2 de la Constitution. Bien évidemment, le Conseil d'Etat lors de sa fonction consultative assure un contrôle de Constitutionalité des projets de loi à la Constitution, tout comme les décrets, qui - en cas d'avis défavorable - si le Gouvernement décide de passer outre, verra ses actes probablement annulés au contentieux pour des motifs de légalité. Dès lors, il convient de nous interroger sur les rapports existants entre la loi, acte législatif émanant du Parlement et voté dans les domaines définis par l'article 34 de la Constitution et le Conseil d'Etat, cour suprême de l'ordre administratif en France.
Pour ce faire, il semble plus particulièrement intéressant de traiter le sujet uniquement d'un point de vue juridique, et de ne n'étudier ce sujet que dans le cadre de la fonction contentieuse du Conseil d'Etat.
Peut-on parler de contrôle de constitutionnalité des lois du Conseil d'Etat statuant au contentieux ?
[...] Ceci n'est pas sans poser certaines difficultés. Si cela est fait dans le but avoué par le pouvoir politique de renforcer les droits des justiciables, par un meilleur respect de la Constitution, il n'en résulte qu'en pratique, les choses changeront peu. Effectivement, il ne faut pas oublier que c'est le juge administratif qui jouera le rôle de filtre, et nous savons tous qu'il aura toujours la possibilité pour tel ou tel motif d'estimer qu'il n'y'a aucun doute sérieux quant à l'atteinte par la loi aux droits des justiciables. [...]
[...] Effectivement, l'on voit mal le Conseil Constitutionnel se déjuger a postériori. Enfin, se profile le spectre de la divergence de jurisprudence, lors du contrôle de conventionalité ou constitutionnalité, ce qui pourrait - si tel cas se produit - amener les requérants à faire preuve de pragmatisme en fonction de la libéralité plus ou moins grande des jurisprudences sur tel ou tel droit ou liberté - dans le cas ou aucune saisine du Conseil n'aurait été faite dans le cadre de l'article 61 C C'est probablement la raison pour laquelle le professeur O.Dord estime que derrière le terme de question prioritaire de contrôle de constitutionnalité pourrait-être instituée une procédure faisant prévaloir le contrôle de constitutionnalité au profit de l'assemblée des neufs sages sur le contrôle de conventionalité lorsque la méconnaissance par une disposition législative d'un droit contenu à la fois dans une convention internationale et la constitution sera mise en cause. [...]
[...] A ce sujet, les propos de R. Latournerie (dans ces conclusions sous l'arrêt CE Sect 6 novembre 1936 Arrighi) sont édifiants. En substance, il estime que le juge administratif serait mal avisé de contrôler la loi, loi qui reste l'acte du Parlement, en conséquence, l'expression de la volonté générale et ne relève à ce titre que de lui-même et de cette volonté La haute assemblée suivra son rapporteur public posant ainsi le principe du non-contrôle de la constitutionnalité d'un décret intervenant en application d'une loi, théorie que d'aucuns nomment loi-écran (CE Sect 6 novembre 1936 Arrighi précité). [...]
[...] Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler de quelque manière que ce soit les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs à raison de leurs fonctions - comme le décret du 16 fructidor an III qui défend aux tribunaux de connaître des actes d'administration et annule toute procédure de jugement intervenu à cet égard - les complètent. Par ces dispositions, volonté est faite de séparer d'une part les fonctions administratives et d'autre part les fonctions législatives. [...]
[...] S' il est constant que les décisions du Conseil Constitutionnel s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles (art 62 al 3 il n'en demeure pas moins que ces autorités en l'absence de contrôle a postériori précisément définit dans la Constitution ont du en forger les mécanismes à travers la pratique, étant d'une part entendu que si le juge constitutionnel dispose du pouvoir de bloquer la promulgation de la disposition en cause, et d'ici à quelques semaines du pouvoir d'abroger la disposition déclarée inconstitutionnelle, il ne dispose pas d'un monopole d'interprétation du texte suprême, et que d'autre part, le juge (judiciaire comme administratif) ne peut se retrancher derrière une éventuelle obscurité de la loi pour refuser de rendre la justice (art 4 du Code Civil). Par autorités juridictionnelles, la Constitution fait sans nul doute référence aux deux cours suprêmes instituées en France, à savoir la Cour de Cassation et le Conseil d'Etat. [...]
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