Le Conseil Constitutionnel, dont la première apparition dans les institutions françaises date de 1958, est une innovation de la Ve République. Son rôle n'est pas, selon la confusion courante, d'être le gardien de la Constitution. En effet, ce rôle est dévolu au seul chef de l'État à l'article 5 de la Constitution française : « Le Président de la République veille au respect de la Constitution ». En réalité, la fonction première du Conseil Constitutionnel est la protection du texte des débordements, voire des violations, du législatif. Il est donc chargé de veiller à ce que la loi n'empiète pas sur le pouvoir réglementaire qui revient au gouvernement et respecte les limites du seul domaine normatif. Mais le Conseil possède également d'autres prérogatives par exemple le contrôle et la proclamation des résultats des élections et référendums. La composition et les attributions relatives au Conseil font l'objet du titre VII de la Constitution, et correspondent aux articles 56 à 63 du texte.
En créant le Conseil constitutionnel, les auteurs de la Constitution poursuivaient en effet des objectifs assez modestes. Certes, en application de l'article 61.2, le Conseil avait pour mission de contrôler la constitutionnalité des lois, mais ce contrôle était dans les faits doublement limité. Le Conseil ne pouvait d'une part être saisi que par de hautes personnalités (Président, premier ministre, Président de l'Assemblée nationale ou du Sénat) qui n'étaient à priori pas très enclines à faire contrôler le pouvoir qu'elles incarnaient. D'autre part, la conformité à la Constitution était comprise par référence au texte proprement dit et donc à l'exclusion du préambule, ce qui écartait par là même les grandes normes protectrices des libertés et des droits de 1789 et 1946. Au cours de la Ve République, cet organe s'est également attribué d'importantes compétences qui ne lui étaient pas dévolues à l'origine par les constituants.
[...] Par ailleurs, il est important de constater ici une autre évolution portant sur les liens qu'entretiennent les pouvoirs exécutifs et législatifs avec le Conseil Constitutionnel. Durant les premières années de la Vème République, les positions du Conseil étaient pratiquement systématiquement favorables au pouvoir en place. Au fil du temps, il a cependant affirmé des décisions en claire opposition avec le gouvernement, à commencer justement par la décision du 16 juillet 1971. La question de la nécessité du Conseil est donc liée à l‘évolution de ses fonctions sous la Vème République. [...]
[...] Ceci renvoie au fait que le Conseil Constitutionnel n'est pas en droit une instance juridictionnelle. D'autre part, les anciens Présidents de la République sont membres à vie du Conseil constitutionnel. Or, au vu de l'exercice de la fonction de Président sous la Ve République, qui tient aujourd'hui plus un rôle de chef du gouvernement qu'un rôle «d'arbitre», on juge combien l'exigence d'impartialité «politique» a peu de chances d'être respectée. Certains parlent de gouvernement des juges, d'autres diront que le Conseil Constitutionnel, sous une apparente volonté d'indépendance, n'est qu'un instrument politique stratégique. [...]
[...] Ce principe est absolu dans l'ordre interne: le Conseil étant une juridiction souveraine, il n'existe aucune voie de recours (appel ou cassation) contre ses décisions. Dès qu'elles ont été rendues, celles-ci bénéficient donc de l'autorité de la chose jugée, ce qui signifie qu'elles ne peuvent être remises en cause ni par lui-même, ni par une autre autorité administrative ou juridictionnelle. Il en résulte que lorsque le Conseil constitutionnel déclare une loi conforme à la Constitution sous certaines réserves d'interprétations, celles-ci s'imposent à toutes les autorités chargées d'appliquer la loi. [...]
[...] La jurisprudence a permis d'assurer le respect des prérogatives respectives du gouvernement et du Parlement, afin qu'aucun de ces deux pouvoirs ne domine l'autre et ne que l'équilibre institué par les constituants ne soit pas compromis. De nombreuses décisions ont ainsi sanctionné les pratiques parlementaires tendant à la restauration des propositions de résolution, à la pratique abusive du droit d'amendement, à la limitation du pouvoir d'initiative du Parlement, à la mise en jeu de la responsabilité gouvernementale en dehors des procédures prévues par la Constitution. Mais, en sens inverse, le Conseil constitutionnel veille à la sauvegarde des droits du Parlement. [...]
[...] Or, l'exigence principale que l'on attend d'un juge constitutionnel est son indépendance. Certes, la loi organique du 19 janvier 1995 a rendu la fonction de juge constitutionnel incompatible avec l'exercice de tout mandat électoral, mais il n'en reste pas moins que les autorités de nomination disposent d'une entière liberté dans le choix des personnes : aucune exigence d'expérience, de compétence juridique, de limite d'âge, ce qui renforce le caractère politique de l'institution en permettant la désignation de proches du Président de la République et des Présidents des Assemblées, plus pour leur fidélité politique que pour les qualités requises en vue de l'exercice des fonctions à venir. [...]
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