Conseil Constitutionnel, gouvernement des juges, légicentrisme, pouvoir normatif, politique, troisième chambre législative, Michel Debré, direction politique
« La Constitution est ce que les juges disent qu'elle est. » Cette phrase de Charles Evans Hughes à propos de la Cour Suprême des États-Unis semble, selon certains auteurs, être de plus en plus applicable au Conseil Constitutionnel français. Celui-ci était conçu dans la Constitution de 1958 comme une arme de rationalisation. En plus de ses compétences en matière notamment de contentieux électoral, le Conseil Constitutionnel avait la fonction de « chien de garde de l'exécutif » selon la formule de Michel Debré. Il avait pour rôle d'empêcher le législateur de dépasser le champ de ses compétences. Son évolution cependant, opérée par le développement de sa jurisprudence et par plusieurs réformes constitutionnelles l'a conduit à devenir une institution de plus en plus indépendante avec des prérogatives étendues. C'est la raison pour laquelle il a pu être reproché au Conseil Constitutionnel d'établir un « gouvernement des juges ».
[...] Considérant l'essor des prérogatives, le Conseil Constitutionnel pourrait donc devenir un organe de pouvoir. La pratique montre cependant qu'il s'efforce de garder un rôle de garant des droits fondamentaux et d'équilibre institutionnel sans entrer dans les décisions politiques. II) Une institution d'équilibre plus que de pouvoir Considérant la liberté normative du Conseil Constitutionnel, le reproche qui lui est fait d'instaurer un gouvernement des juges peut être justifié. En effet, de par sa composition et son fonctionnement, il pourrait être qualifié d'organe politique Mais dans la pratique cependant, le Conseil se montre modéré dans ses décisions et évite de rentrer dans le jeu politique Un organe à tendance politique Si le Conseil Constitutionnel est souvent critiqué comme le détenteur d'un pouvoir politique illégitime, c'est d'abord à cause de l'originalité de sa composition. [...]
[...] Il est d'ailleurs à souligner que le décret du 13 novembre 1959 régissant le statut des membres du Conseil constitutionnel leur impose un devoir de réserve, et interdit notamment l'activité au sein des partis politiques. Il semble donc difficile de soutenir, malgré une certaine liberté normative, que le Conseil Constitutionnel ait un véritable rôle de « gouvernement ». [...]
[...] La Constitution de 1958 a opéré une rupture : dans une optique de rationalisation, elle a donné à l'exécutif la compétence de principe en matière normative par ses articles 34 et 37 et a institué, par le Conseil Constitutionnel un contrôle de constitutionnalité des lois véritablement contraignant. Par la suite, la suprématie parlementaire étant sortie des mœurs politiques, la justice constitutionnelle a pu se développer. C'est ainsi que le Conseil Constitutionnel a acquis des compétences supplémentaires et s'est imposé face aux autres pouvoirs. [...]
[...] En effet, la déclaration de conformité à la Constitution n'est pas binaire : en plus de déclarer le texte intégralement constitutionnel ou intégralement inconstitutionnel, le Conseil a pu formuler des réserves d'interprétation ou demander au législateur d'élaborer un autre texte qui poursuivrait les mêmes buts. Cette influence sur la production législative ne peut être politiquement neutre et a des conséquences directes sur la politique menée. Ainsi, les critiques formulées à l'encontre du Conseil Constitutionnel sont effectivement fondées dans la mesure où, vu ses prérogatives actuelles, il ne peut avoir une action dépourvue d'idées politiques. Cependant, une telle position mérite d'être nuancée. [...]
[...] Ainsi, on ne peut véritablement affirmer qu'il instaure un « gouvernement des juges ». Par ailleurs, sa distance par rapport au pouvoir politique se manifeste par le fait que la suite de la saisine ne dépende plus des saisissants. Ces derniers n'ont plus en effet de droit de remords, le Conseil se considérant toujours comme saisi de l'ensemble de la loi et se réservant le droit de statuer ultra petita, avec une substitution des motifs. Ainsi, il est indépendant des pressions politiques et peut se prononcer en véritable constitutionnel, le terme impliquant et l'impartialité, et l'impossibilité de diriger l'action politique. [...]
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