Sieyès déclare à l'avènement de la République, en 1794 : « Une Constitution est un corps de lois obligatoires ou ce n'est rien. Si c'est un corps de lois, on se demande où sera le gardien, où sera la magistrature de ce code ? ». Cette interrogation va tarauder les constituants successifs qui l'ignoreront simplement jusqu'à la Ve République qui instaure pour la première fois ce « gardien » tant attendu.
Pourtant, les critiques pleuvent autour de cette institution considérée comme dangereuse : Charles de Gaulle déclare lui-même que « La Cour Suprême, c'est le peuple », entendant cantonner le Conseil constitutionnel à un rôle subalterne. Cette allusion au système américain témoigne bien évidemment d'une hostilité bien française face au « gouvernement des juges » : on craint alors que le juge constitutionnel ne se substitue au législateur –alors que la loi est considérée comme intouchable, car expression de la « volonté générale » chère à Rousseau –et encore pire, au constituant.
Cette crainte paraît de prime abord injustifiée. En effet, le pouvoir constituant est un pouvoir souverain qui élabore (pouvoir constituant originaire) ou révise (pouvoir constituant dérivé) la Constitution. Or le Conseil constitutionnel ne possède aucune de ces fonctions, mais uniquement une compétence d'attribution par définition limitée par la Constitution. Toutefois, certaines pratiques, comme la décision du 16 juillet 1971 ou l'abondance des « réserves d'interprétation » induisent un doute quant à la réelle limitation des pouvoirs du Conseil constitutionnel.
Il convient alors de se demander si le CC ne surpasse pas sa compétence d'attribution à travers une jurisprudence audacieuse, et si celle-ci ne se rapprocherait pas d'un pouvoir constituant.
[...] Le Conseil constitutionnel a-t-il un pouvoir constituant ? Introduction Sieyès déclare à l'avènement de la République, en 1794 : Une Constitution est un corps de lois obligatoires ou ce n'est rien. Si c'est un corps de lois, on se demande où sera le gardien, où sera la magistrature de ce code ? Cette interrogation va tarauder les constituants successifs qui l'ignoreront simplement jusqu'à la Vème République qui instaure pour la première fois ce gardien tant attendu. Pourtant, les critiques pleuvent autour de cette institution considérée comme dangereuse : Charles de Gaulle déclare lui-même que La Cour Suprême, c'est le peuple entendant cantonner le Conseil constitutionnel à un rôle subalterne. [...]
[...] Comment ne pas penser alors que ce pouvoir s'apparente à un pouvoir constituant ? Véritable médiateur constitutionnel, c'est lui aussi qui concilie tous les principes à valeur constitutionnelle. La pratique des réserves d'interprétation est révélatrice de ce quasi- pouvoir constituant : absentes de l'article 61, elles sont pourtant devenues monnaie courante depuis leur apparition dans la décision Sécurité et Liberté du 20 janvier 1981. Au lieu de déclarer la non-conformité de la loi, le CC déclare qu'elle ne doit être interprétée que d'une seule manière (la sienne) pour être conforme à la Constitution. [...]
[...] Leur ratification n'étant possible qu'à partir d'une loi, le CC peut contrôler la conformité d'un traité à la Constitution. Par exemple, le Traité de Maastricht (1992), puis le Traité établissant une Constitution pour l'Europe (2004) et enfin le Traité de Lisbonne ont été taxés d'inconstitutionnalité ce qui a nécessité une révision constitutionnelle afin de pouvoir les ratifier. Cet exemple des Traités nous permet d'arriver à une question primordiale : à quoi le CC se réfère-t-il lors de son contrôle de constitutionnalité ? À la Constitution stricto sensu ? [...]
[...] En effet, ce large pouvoir d'interprétation accordé au CC n'est-il pas lui aussi un signe manifeste d'un quasi-pouvoir constituant ? Un pouvoir de décision étendu qui s'apparente à un pouvoir constituant Avant de considérer le point primordial des réserves d'interprétation, il convient d'évoquer ce que Henry Roussillon nomme le pouvoir d'autosaisine du CC. a priori un tel pouvoir n'existe pas puisque le CC n'intervient que sur saisine d'une partie justement. Mais on peut en dénombrer des formes limitées. D'abord, le CC donne souvent des avis ou recommandations facultatifs aux pouvoirs publics lors des élections par exemple, et ses suggestions sont souvent prises en compte (redécoupage des circonscriptions avec la conformité de la loi déclarée le 18 février 2010, décalage du vote au samedi en Polynésie De plus, en ce qui concerne la saisine obligatoire du CC pour les lois organiques et les règlements des assemblées, il y a fort à parier qu'en cas de carence du Premier Ministre le CC s'autosaisirait. [...]
[...] Il intervient surtout en cas de litiges (les recours contre l'élection doivent être déposés dans les 6 jours qui suivent la proclamation) : au niveau des plafonds de dépenses électorales, on peut noter l'annulation de l'élection de Bernard Tapie dans les Bouches-du-Rhône en 1988 pour de multiples irrégularités. Le CC préfère généralement refaire voter les électeurs plutôt que de désigner un autre candidat vainqueur, ce qui assoit sa légitimité. Toujours au niveau du contentieux électoral, il convient d'aborder les opérations de référendum elles aussi contrôlées de près par le CC (art 60). En réalité, il détient plutôt un pouvoir d'avis conforme pour l'organisation préliminaire du référendum et ne statue que sur tout ce qui peut entacher gravement l'exercice référendaire tout le reste étant dévolu au juge administratif. [...]
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