Dès 1748, s'inspirant du régime britannique, Montesquieu préconisait le bicamérisme, c'est-à-dire l'existence de deux chambres distinctes détenant ensemble le pouvoir législatif. Ce bicamérisme faisait partie du dispositif visant à assurer la séparation des pouvoirs, qui seule garantit de la tyrannie. En somme, le partage de la fonction législative entre deux chambres découlait parfaitement du principe fondateur de Montesquieu : « Pour qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir ». Le but de Montesquieu n'est pas de permettre un fonctionnement démocratique des institutions, mais bien plutôt de diviser le pouvoir, et son conseil quant au bicamérisme vient aussi de son souhait de préserver le pouvoir de l'aristocratie dont il fait partie. Le pouvoir de cette aristocratie s'incarnait en effet déjà dans la Chambre des Lords britannique.
Les régimes bicaméraux font donc coexister une chambre basse populaire et une Chambre Haute, censée détenir une fonction de gardien de la Constitution et d'enrichissement du travail législatif. On associe toujours à la Chambre Haute certains traits de caractère : stabilité, conservatisme (Duhamel parle de « Sénat conservateur »)… Pourtant, la plupart des régimes libéraux d'aujourd'hui connaissent le bicamérisme, sans pour autant que ce soit l'aristocratie qui gouverne.
Aussi convient-il de s'interroger sur l'utilité desdites chambres hautes : participent-elles au fonctionnement démocratique des institutions, ou, au contraire, le freinent-elles ?
Dans un premier moment, il apparaît que la Chambre Haute a une fonction originaire de tempérance d'un fonctionnement démocratique jugé potentiellement dangereux, mais les chambres hautes d'aujourd'hui semblent plus participer au processus démocratique.
[...] Une représentation élitiste pour faire pendant à la représentation populaire de la chambre basse Le bicamérisme consiste bien souvent à surreprésenter une catégorie de la population dont l'influence est jugée positive sur le fonctionnement des institutions, et ce afin de contrebalancer la représentation populaire qui caractérise la chambre basse. a. Le bicamérisme aristocratique consiste à surreprésenter l'aristocratie. C'est le bicamérisme souhaité par Montesquieu, dans un souci évident de ne pas laisser trop de pouvoir aux représentants du bas peuple A l'origine la Chambre Haute pouvait être composée non de représentants élus mais d'aristocrates nommés par le monarque et disposant éventuellement d'un fief héréditaire. Un tel bicamérisme est celui qui existe au Royaume-Uni. La chambre des Lords compte environ 600 membres, mais aucun n'est élu. [...]
[...] Pour O. Duhamel, Le bicamérisme britannique atteint des records dans l'archaïsme ; Aristocratique à son origine, oligarchique en son recrutement, conservatrice en son âme, gérontocratique en son corps les deux seules attributions encore valables de la Chambre des Lords sont la magistrature morale et la possibilité, par un droit de veto suspensif, de retarder un an l'adoption d'une loi (sauf en ce qui concerne les budgets). Certaines chambres hautes aristocratiques ne fonctionnaient pas avec un recrutement héréditaire (l'hérédité des Lords a été supprimée par le Gouvernement Blair) mais se composaient de hauts dignitaires (Par exemple : Sénat du Second Empire). [...]
[...] A l'inverse, si le pouvoir exécutif est responsable devant la Chambre Basse, l'existence d'une seconde chambre peut garantir son indépendance vis-à-vis de celle-ci et donc permettre au pouvoir exécutif de contrecarrer l'influence de la Chambre Basse. Ainsi, l'existence d'une Chambre Haute semble particulièrement importante pour équilibrer et répartir les influences du pouvoir exécutif et du pouvoir législatif. En Allemagne, par exemple, le Bundesrat cède devant le Bundestag, hors l'hypothèse de l'état de nécessité qui permet exceptionnellement au Chancelier de s'appuyer sur la Chambre Haute. Sources Droit constitutionnel t & O. Duhamel Institutions politiques Droit Constitutionnel P. Pactet Droit constitutionnel contemporain t D. Chagnollaud Dictionnaire constitutionnel O. [...]
[...] La Chambre Haute modère la chambre basse également dans le cadre du processus législatif Dans certains Etats, le rôle de la Chambre Haute est de modérer le travail législatif de la chambre basse, par le recours aux amendements ou au droit de veto. a. Par la possibilité d'amender les lois (prérogative dont dispose aussi, dans la plupart des cas, la chambre basse), la Chambre Haute peut retarder l'adoption d'une loi. Le Sénat de la Vème dispose ainsi des mêmes possibilités de contrôle que l'Assemblée Nationale, moins la mise en jeu de la responsabilité du gouvernement. En outre, la Chambre Haute participe à la mise au point de la loi en tant qu'elle en effectue une lecture, voire plusieurs. [...]
[...] Ainsi, les régimes fédéraux ont une Chambre Haute qui permet la représentation égalitaire des Etats fédérés. Si la Chambre Basse représente le peuple en fonction de la taille de l'Etat fédéré (ou du Land), la Chambre Haute rétablit l'égalité entre les Etats. C'est ce système qui existe aussi bien en Allemagne qu'aux Etats-Unis, mais les Etats-Unis ont institué une égalité stricte (deux représentants pour chaque Etat fédéré, quelque soit sa population), alors que l'Allemagne prévoit au minimum 3 délégués pour les Länder de plus de deux millions d'habitants pour ceux qui en comptent plus de 6 millions, et 6 pour ceux qui en comptent plus de 7 millions. [...]
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