Qu'est qu'une théorie ? Il s'agit d'un regard, d'une approche constative, d'une inclinaison, d'une déclinaison, d'une anticipation. Ce point de départ, celui de l'observateur, ne doit pas pourtant nous imposer une dimension trop subjective de l'approche théorique. Il faut considérer la théorie comme un préalable constructif à une réalité, à une chose ou à une matière, à une technique comme à une réalité. Ainsi, Raymond Aron a raison d'affirmer que la "théorie précède l'histoire", et ceci se vérifie dans le cadre de l'étude sur le droit et l'Etat, la théorie précédant toujours l'histoire. Il en est ainsi historiquement, tant le droit et l'Etat sont souvent présentés comme relevant de l'empirisme et des aléas de l'histoire (les thèses positivistes) ou comme relevant d'une origine naturelle (les thèses que je qualifierais de fatalistes, quelles soit naturalistes ou néolibérales), alors que le droit et l'Etat ont toujours été introduits et pérennisés par des constructions textuelles essentielles. Nous en retiendrons cinq comme fondamentales, chaque fois mis en contrepoint par les réalités et les ruptures de l'histoire matérielle et/ou des idées :
- la conception aristotélicienne Contrepoint historique : souveraineté à partir de l'imperium romain ;
- la conception hobbesienne Contrepoint : déconstruction idéologique et juridique de la souveraineté ;
- la conception hégélienne Contrepoint : économie politique contemporaine du capital ;
- la conception marxiste Contrepoint 1 : introduction à la complexité contemporaine du pouvoir Contrepoint 2 : le nazisme comme optimum logique et historique de l'État ;
- la conception foucaldienne et deleuzienne Contrepoint : chaque homme comme un mini-Etat (Cf. Wim Wenders).
Chacune de ces conceptions détermine ainsi, et est déterminée en retour par ce qui lui succède, un contrepoint qui peut être sa mise en application, son usage en quelque sorte, ou encore sa déformation par d'autres conceptions, ou par une pratique du pouvoir, par le fracas de l'histoire, pour retrouver les termes de Walter Benjamin.
Il apparaît ainsi que la souveraineté et le capital ne sont pas que les représentations du pouvoir, signifié comme des formulations de l'être et de l'avoir, de l'institution et des moyens de la possession. La souveraineté et le capital apparaissent comme immanent dans un univers social où les pouvoirs se rediffusent dans la multitude humaine. Cette étude porte sur le passage d'un pouvoir institutionnel construit comme une mythologie unitaire, sous le couvert d'une acception historique, qui se transforme et qui apparaît comme une réalité dans le contexte d'une déconstruction de l'objet d'étude même : le droit et l'Etat sont défaits conceptuellement et historiquement par une ontologie mythologique, pour que le capital puisse retrouver sa cohérence capitaliste économique, sociale et politique. L'effacement de l'Etat a pour fondement théorique la conception hégélienne de l'Etat, et pour pendant historique, le fait de la construction de l'économie politique du libéralisme européen. Un parfait mouvement asymétrique entre deux matrices fondamentales de l'organisation de la vie et de la mort (...)
[...] Le catégoriel est dans l'individu est non plus simplement l'inverse. La mondialisation des échanges, ce que je nommerais simplement la mondialisation du pouvoir, est ainsi de ce fait. Oscillant entre une mondialisation économique stricte, ce qui a peu de sens, est l'institution d'un cosmopolitisme kantien, la société mondiale a déjà redessiné ses contours, car l'homme moderne est déjà reconstruit, et apte à subir les transformations de son environnement. Comme l'affirme André-Jean Arnaud, la mondialisation représente une transgression instituée. Ce que l'on évoque ici n'est rien de moins que le remplacement d'un type de société par un autre, d'une philosophie par une autre, d'une épistémologie par une autre. [...]
[...] Habermas, Droit et démocratie. Entre faits et normes, Gallimard L. A. Hart, Le concept de droit, trad. Française, M. van de Kerchove, Bruxelles, FUSL H. Kelsen, Théorie pure du droit, Dalloz, traduction française de la 2ème édition allemande par C. Eisenmann B. Latour, La fabrique du droit. Une ethnographie du Conseil d'État, La Découverte, Armillaire A. [...]
[...] Il a fallu attendre 1997 pour imposer une motivation précise et circonstanciée à cet internement administratif, au regard des impératifs de la loi et de l'article 5 de la convention européenne des droits de l'homme. Cf. Conseil d'État novembre 1997, Ministre de l'intérieur et de la sécurité publique G., D IR, p M. Foucault, Le pouvoir, comment s'exerce-t-il ? in H. L. Dreyfus, P. Robinow, Michel Foucault. Un parcours philosophique, Gallimard p M. Foucault, Surveiller et punir, Gallimard Dans Surveiller et punir, Foucault pose quatre règles générales de la punition (p. [...]
[...] Pour Marx, La puissance publique n'est qu'une manifestation matérielle et contingente, c'est-à-dire relative à un certain degré de développement d'une société, de l'état de domination d'une classe sur une autre. L'État n'est qu'une structure de la domination, il n'est pas la domination sociale. De ce point de vue, l'analyse de Marx est difficilement admissible hors de son contexte historique. Car l'État n'est pas qu'une périphérie superstructurelle, une idéologie, où alors il ne s'agirait que de l'État-nation en gestation que connurent Marx et Engels. L'État est toujours un départ et un aboutissant de la domination sociale, puisqu'il est son instrument. [...]
[...] la nécessité de l'oubli ne doit pas nous faire omettre, que la sélectivité de l'oubli doit être consciente, sous peine d'être toujours à la dérive de son histoire, et de l'histoire. P. Vidal- Naquet, Sur une commémoration in Politiques de l'oubli. Le genre humain, Seuil p Paradoxalement, l'un des maîtres de la pensée libérale contemporaine ne semble avoir influencé que des auteurs post-marxistes. Cf. A. Négri, Le pouvoir constituant, Essais sur les alternatives de la modernité, P.U.F On peut ainsi relever cet embarras envers Spinoza, dans les nombreux travaux de Simone Goyard-Fabre. Voir notamment, S. Goyard-Fabre, philosophie politique. XVIe-XXe siècles, P.U.F., coll. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture