« Le Premier ministre est un collaborateur, le patron c'est moi ». Cette phrase a été prononcée par Nicolas Sarkozy lors d'un entretien accordé à la presse régionale fin août 2007, soit au début de son mandat présidentiel. Certes, il n'a jamais qualifié le Premier ministre de collaborateur dans une déclaration officielle, mais lors d'une conversation devant une dizaine de journalistes. Son affirmation dénuée de nuance en dit néanmoins beaucoup sur la façon dont, à peine élu, il conçoit l'organisation du pouvoir exécutif. François Fillon, le Premier ministre de l'époque, a lui-même affirmé plus tard à la télévision que Sarkozy était « l'amiral » et lui « le commandant qui fait tourner le bateau et son équipage ». Ainsi, le Premier ministre acceptait pleinement sa position de simple exécutant, dans l'ombre du Président. De même, cette hiérarchie ne choque guère les non-juristes, car la conception d'un Président fort est ancrée dans les esprits depuis la naissance de la Vème République. Pourtant, il est intéressant de constater que même si la Constitution de 1958 élargit les pouvoirs du Président, elle ne fait pas de lui un chef de l'exécutif à l'américaine. Le pouvoir exécutif français est bicéphale : il se partage entre le président de la République et le Premier ministre. Les rapports entre ces deux protagonistes ne sont pas explicitement prévus par la Constitution et c'est d'ailleurs ce qui a entre autres permis l'élargissement du rôle du Président en pratique.
[...] Le premier ministre acteur du jeu politique Le rôle du premier ministre est lui défini dans les articles 20 et 21 de la Constitution. Il est précisément dit que le premier ministre dirige l'action du Gouvernement et qu'il détermine et conduit la politique de la nation Le premier ministre a donc un rôle prépondérant dans le régime parlementaire de la Vème République, il est le véritable détenteur du pouvoir gouvernant, ce qui a évidemment pour contrepartie la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement. [...]
[...] Par exemple, lorsqu'Édouard Balladur a été nommé premier ministre en 1993, il a souhaité rétablir les essais nucléaires que François Mitterrand avait décidé d'arrêter. Le fait est que le Chef d'état-major a refusé en disant qu'il n'obéirait qu'au Président, et ce, alors même que le responsable de la défense nationale est le premier ministre. Enfin, il est important de préciser que la réforme du quinquennat en 2002 a eu pour effet de faire les élections législatives se dérouler juste après les présidentielles et contribue donc à quasiment assurer la primauté du Président au sein de l'exécutif. [...]
[...] Le Président est alors contraint d'accepter un changement de statut, car en tant que membre d'un parti qui n'est pas celui du Président, le premier ministre a alors de bonnes raisons partisanes et personnelles pour s'imposer plus que ne le ferait un premier ministre membre du même parti. Nous pourrions penser que la cohabitation constitue la bonne lecture de la Constitution écrite, mais même si d'une certaine façon nous en revenons à la Constitution d'origine, ce n'est pas totalement le cas. La cohabitation laisse davantage place à un bras de fer entre le Président et le premier ministre qu'à un rétablissement de la Constitution ou à une simple subordination du Président au premier ministre. [...]
[...] En effet, le président de la République s'avère être dans les faits à la fois chef de l'État et chef du Gouvernement. II) Des rapports hiérarchisés, voire conflictuels, dans la pratique constitutionnelle En pratique, la Vème République s'est caractérisée par des rapports hiérarchiques entre le premier ministre et le président de la République. Alors que le Président est le plus souvent le véritable chef de l'exécutif, le premier ministre semble reprendre le dessus en période de cohabitation. La conception présidentialiste du pouvoir exécutif La présidence du Général de Gaulle et les circonstances particulières dans lesquelles il est arrivé au pouvoir vont façonner profondément la pratique de la Vème République. [...]
[...] Les propos de Nicolas Sarkozy affirmant la subordination du premier ministre au Président sont-ils pleinement représentatifs de la Vème République ? Les rapports entre le président et le premier ministre varient selon que l'on se place sous l'angle de la Constitution telle qu'elle a été écrite ou sous l'angle de sa pratique et selon que l'on soit en période de cohabitation ou non. Nous verrons qu'alors que le premier ministre et le Président devraient en théorie avoir une relation complémentaire, leurs rapports sont dans les faits hiérarchiques, voire conflictuels. [...]
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