Les liens entre la NC et la république sont appelés à s'affaiblir dans le cadre de ce nouveau statut. En prévoyant la rétrocession de nombreuses compétences de l'Etat vers la NC, et la création d'un organe législatif autonome, ce statut se rapproche d'une solution fédéraliste et contredit la centralisation républicaine (I). Les nombreuses dérogations aux principes républicains qu'autorisent les accords et la loi organique sont verrouillées par un bloc de constitutionnalité interne à la Nouvelle-Calédonie, ce qui a valut à ce statut la qualification de monstruosité constitutionnelle (II)
[...] La souveraineté partagée Avec son nouveau statut, la Nouvelle-Calédonie jouit d'une souveraineté partagée. Bien sûr, l'attribution du pouvoir législatif en dehors de la représentation nationale est une extrême nouveauté qui fonde cette souveraineté partagée, mais en partie seulement. En effet, des situations analogues de législation infra nationale existent ailleurs (Espagne) sans que l'on parle de souveraineté partagée. Ce qui permet de parler de souveraineté partagée c'est la création de la citoyenneté calédonienne. Celle-ci permet d'opérer une distinction entre les habitants de la Nouvelle- Calédonie en fonction de leur durée de résidence sur le caillou. [...]
[...] Mais les français habitants en Nouvelle-Calédonie ne sont pas tous citoyens calédoniens. Au nom de cette citoyenneté, le nouveau statut rompt avec le principe d'égalité entre les citoyens français en autorisant des discriminations entre les habitants du territoire sur des questions aussi fondamentales que le droit de vote et le droit à l'emploi. Le droit de vote Pour voter aux élections locales (Congrès, assemblées de province, scrutin d'autodétermination) il faut être citoyen calédonien, c'est à dire qu'il faut être résident sur le territoire depuis 1988 (date des accords de Matignon) ou être né sur le territoire. [...]
[...] Mais, comme le souligne Régis Fraisse (Magistrat au Tribunal Administratif de Nouméa) dans son article sur la hiérarchie des normes en NC, on ne sait pas encore ce qu'il en sera des recours posé devant le tribunal administratif de Nouméa pour des lois de pays qui n'auront pas valeur constitutionnelle, car l'arrêt Sarran n'exclut du contrôle de la conventionnalité que les textes de nature constitutionnelles. L'affaiblissement des principes républicains est conçu comme une dérogation qui ne s'applique qu'à la Nouvelle-Calédonie car celle-ci serait sur la voie de l'indépendance. Reste que ce statut remet en cause les liens de la NC avec une république dont elle fait encore partie, et que ce statut fait des émules notamment chez les polynésiens. Ainsi, la place nouvelle de la Calédonie dans la république risque par le précédent qu'elle constitue d'entraîner l'Etat vers le fédéralisme. [...]
[...] L'Etat n'est pas totalement absent de la procédure. Cependant son rôle est réduit. Le Conseil d'Etat rend obligatoirement un avis sur chaque texte de loi de pays avant qu'ils ne soient votés. Mais comme tout avis, celui ci n'a pas d'effets impératifs. En outre, le Conseil Constitutionnel peut intervenir pour un texte ayant été l'objet d'une nouvelle délibération, à la demande du Haut Commissaire, du président d'une assemblée de province, ou d'un tiers des membres du Congrès. Si la loi de pays est contraire à la constitution, elle ne peut être promulguée. [...]
[...] La nouvelle donne institutionnelle calédonienne risque donc d'entraîner un conflit normes en NC. Ainsi, un recours a porté devant le Conseil d'Etat concernant la restriction du corps électoral. Les requérants soutenait la contradiction de ces dispositions avec le pacte de New York et la convention européenne des droits de l'homme. Le CE a rejeté le recours en posant dans son arrêt Sarran le principe selon lequel la suprématie ainsi conférée aux engagements internationaux ne s'applique pas dans l'ordre interne aux dispositions de nature constitutionnelles Donc, puisque les textes réglant le statut de la NC ont valeur constitutionnelle, les recours concernant les dispositions de la loi organique seront rejetés. [...]
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