Le modèle américain de justice constitutionnelle

Extraits

[...] De ce fait, elle remplit un rôle de juge régulateur suprême dans l'ordre juridique américain. Ce caractère reste essentiel, bien qu'elle exerce aujourd'hui un tri sur les affaires qui lui sont proposées, pour ne retenir que celles qu'elle juge les plus graves ou les plus significatives sous l'angle de la cohérence de l'ordre juridique. Dans le contentieux qu'elle traite au fond, les questions constitutionnelles ne forment qu'une minorité, mais tout de même significative, puisqu'elle représente environ 40% de l'ensemble. Elles l'amènent à contrôler la conformité à la Constitution, non seulement de lois, mais aussi d'actes de l'Exécutif, et ceci que ces normes émanent du niveau fédéral ou du niveau fédéré (qui représente d'ailleurs la plus grande partie de ce contentieux). [...]

[...] Et ils seront traités immédiatement au niveau le plus haut : du point de vue constitutionnel. La Constitution, au lieu d'être une  Table de la Loi  intangible et lointaine, apparaît ainsi au contraire comme un texte vivant, directement invocable par tout citoyen américain à l'appui de ses requêtes et de ses droits. De ce fait, la Cour suprême, bien qu'elle reste liée par les contraintes de la séparation  stricte  des pouvoirs, joue concrètement un rôle essentiel dans la résolution des grandes controverses politiques et sociales des États-Unis, et se trouve en position, en fixant sa politique jurisprudentielle, de peser sur les grands choix de société de ce pays. [...]

[...] La conséquence de l'existence de ces critères est une limitation intrinsèque de l'activité du pouvoir judiciaire aux États-Unis. Malgré sa réelle puissance, il s'interdit en effet de rendre des avis consultatifs à destination de l'Exécutif comme du Législatif. Son rôle n'est en effet pas de conseiller les autres pouvoirs sur l'interprétation de la Constitution, qu'ils sont habilités à dégager tout comme lui : ce serait une violation de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir judiciaire est seulement habilité à dire le droit dans le but exclusif de résoudre un litige. [...]

[...] ) qui pourront se produire sous l'empire de la présente Constitution, des lois des États-Unis ou des traités conclus .   . En conséquence, la recevabilité des requêtes sera conditionnée par le caractère concret des litiges en cause. La jurisprudence a cependant dû préciser ce qu'il fallait entendre par  cas concret  . En principe, la Cour suprême ne se prononce jamais sur des litiges éventuels et abstraits, mais seulement sur des cas avérés et concrets. La justification de cette position est que, si le juge acceptait de se lancer dans un contrôle abstrait, il serait à même de supplanter le législateur dans sa fonction, ce qui serait une atteinte au principe de séparation des pouvoirs. [...]

[...] Le modèle américain de justice constitutionnelle Le  modèle américain  de justice constitutionnelle est le premier à être historiquement apparu au cours du XIXe siècle. Comme nous l'avons vu, il présente la particularité de n'avoir fait l'objet d'aucune théorisation a priori : il est né de la pratique. Il a pour base la Cour suprême des États-Unis d'Amérique et l'ensemble du système judiciaire américain. Il se présente donc comme un contrôle diffus, par voie d'exception, a posteriori et concret. Un contrôle diffus Le modèle américain se caractérise en premier lieu par un principe d'unité juridictionnelle : en effet, la fonction de juge constitutionnel appartient à chaque juge au sein du système juridictionnel américain, qu'il soit juge fédéral ou juge étatique. [...]