L'entreprise de tendance - Une entreprise qui fonctionne sur la base d'une doctrine

Extraits

[...] Cet arrêt souvent présenté comme une jurisprudence majeure de la question de l'expression du fait religieux dans l'entreprise privée a en définitive révélé que la majorité des dispositifs aujourd'hui prévus dans les règlements intérieurs étaient potentiellement dépourvus d'efficacité juridique Cass. Asse. Plén juin 2014, 13- À plus haut niveau encore, la Cour européenne des droits de l'Homme a également dans l'arrêt Dalhab contre Suisse en 2003, avancé l'argument du public influençable pour donner raison à l'État suisse concernant le licenciement d'une enseignante arrivée voilée devant des enfants de primaire. Ainsi dans ces deux arrêts, la restriction à la liberté religieuse est justifiée par la qualité du public accueilli. [...]

[...] L'argument avancé consistait à dire que la crèche est une entreprise de tendance dont la doctrine est la laïcité. Plus précisément, la Cour d'appel juge que la crèche peut dans certaines circonstances constituer une entreprise de convictions et peut dès lors se doter d'un règlement intérieur prévoyant une obligation 2 Cour d'appel de Versailles 11ème chambre 27 octobre 2011 Cass. Soc mars 2013 11-28845. Le même jour, le licenciement pour port d'un foulard islamique a été jugé justifié s'agissant d'une employée d'une CPAM, peu important qu'elle soit ou non en contact avec le public (Cass. [...]

[...] Définition L'entreprise de tendance est une entreprise qui fonctionne sur la base d'une orientation particulière qui peut être syndicale, politique, religieuse. Elle impose la doctrine de l'entreprise au salarié y compris dans sa vie privée. Par exemple, un parti politique demande aux personnes recrutées d'adhérer aux valeurs portées par le parti. Dans pareil cas, une différence de traitement fondée sur la religion ou les convictions d'une personne ne constitue pas une discrimination lorsque, par la nature de ces activités ( la religion ou les convictions constituent une exigence professionnelle. [...]

[...] Le licenciement était justifié selon la Chambre sociale. Cependant, aujourd'hui la liberté matrimoniale est une liberté à valeur constitutionnelle selon la Convention Européenne des Droits de l'Homme, donc la décision de 1978 aurait peu de chance de se reproduire aujourd'hui. Une telle décision serait aujourd'hui contraire au bloc de constitutionnalité et à la Convention Européenne des Droits de l'Homme d'une part, et au respect de la vie privée d'autre part. Dans la foulée de cet arrêt, un autre arrêt de 1991 a été rendu adoptant une position différente lorsque le salarié n'a aucun rôle dans la diffusion de la doctrine de l'entreprise. [...]

[...] On ne peut pas empiéter sur sa vie privée. Il est tout à fait possible dans le secteur privé d'avoir ce type d'entreprise et de prévoir une clause dans le contrat de travail qui demande au salarié d'avoir un comportement adapté à la politique, la religion de l'entreprise. Toutefois, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme et la jurisprudence nationale ne sont pas en parfait accord sur un point. En effet, alors que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme est assez favorable à l'influence de l'entreprise identitaire sur la relation de travail, y compris en dehors de la sphère professionnelle, la jurisprudence nationale est à l'inverse plutôt orientée vers une plus grande étanchéité entre vie professionnelle et vie personnelle. [...]