Les actes émanant du pouvoir exécutif, intervenant dans des matières où se manifeste la fonction de « gouverner » plus que celle d' « administrer », leur contentieux échappe à raison de leur nature à la compétence des juridictions administratives, judiciaires et constitutionnelle. C'est en quelque sorte la survivance de la « raison d'État ».
Selon l'article 56 de la Constitution de 1958, le Président de la République a la possibilité de nommer trois membres du Conseil constitutionnel. Le 21 février 1998, le Président nomme M. Pierre Mazeaud comme membre du Conseil constitutionnel. Une personne, Mme Ba, a attaqué cette décision devant le Conseil d'État.
Mme Ba a saisi le Conseil d'État d'une requête tendant à l'annulation de la décision du 21 février 1998.
Le problème posé est de savoir qui est compétent pour juger de la légalité de l'usage par le Président de la République d'une de ses prérogatives constitutionnelles. Le Conseil d'État rappelle qu'il ne lui appartient pas de connaître de la décision par laquelle le président nomme un membre du Conseil constitutionnel. Il rejette le recours en invoquant son incompétence.
[...] Ainsi, de nombreux auteurs ne reconnaissent pas les termes actes de gouvernement et en font la négation. B. Inexistence de l'acte de gouvernement Une doctrine encore importante entend démontrer que l'acte de gouvernement n'existe pas en droit positif et que la jurisprudence peut parfaitement s'expliquer sans recourir à cette notion. Cette thèse a été vigoureusement défendue par Michel Virally dans son article L'introuvable acte de gouvernement D'autres auteurs expliquent l'incompétence du Conseil d'État pour ce type d'acte par son caractère mixte où intervient, outre le gouvernement, le Parlement ou l'État étranger. [...]
[...] Ainsi, une nomination au Conseil Constitutionnel a une influence dans les rapports entre l'exécutif et le Parlement, puisque c'est un moyen pour l'exécutif de bloquer les décisions du Parlement. Cette qualification d'acte de gouvernement à la décision de nomination d'un membre du Conseil constitutionnel a pour conséquence de fermer par avance à tout justiciable de droit au recours pour excès de pouvoir. Ce recours n'est recevable que contre un acte administratif, ne concernant pas cette décision. La requête de Mme Bas ne peut donc pas être portée devant le Conseil d'État. [...]
[...] Le Conseil d'État n'a pas donné son avis sur ce point, il se borne à un considérant de rejet pur et simple, la requête ( ) doit être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente Le juge cherche, ici, à respecter une certaine autonomie du gouvernement et à ne pas s'impliquer dans des conflits sortant de la sphère administrative. Le Conseil d'État ne veut pas d'immixtion dans les rapports entre les pouvoirs publics constitutionnels. Si le Conseil d'État n'est pas la juridiction compétente, quelle autre juridiction pourrait être compétente. La seule susceptible d'être admise comme étant compétente serait le Conseil constitutionnel. Une juridiction compétente ou une immunité juridictionnelle ? Les actes de gouvernement, par leur contenu et leur dimension politique, bénéficient d'une totale immunité juridictionnelle. [...]
[...] Avec l'extension progressive de ce principe, la notion d'acte de gouvernement s'est, donc, restreinte. Bien qu'il soit difficile de voir en quoi la nomination au Conseil constitutionnel est un acte de gouvernement, il est évident que cette décision est de nature particulière. La Constitution de la 1958 a délibérément voulu qu'aucune question ne soit posée à la désignation d'un membre du Conseil. Aucune qualité n'est requise ; aucun critère n'est exigé, ni d'âge ni de formation universitaire ni de compétence, ni d'expérience professionnelle ou politique. [...]
[...] Dans un second temps, nous étudierons la juridiction qui est compétente pour contrôler cette décision. Le Conseil d'État : une juridiction incompétente pour les actes du Président Le Conseil d'État est une juridiction incompétente pour juger de la légalité de la décision du Président de la République dans la nomination d'un membre constitutionnel. En effet, des litiges échappent à la compétence des juges administratifs et cet acte de nomination se définit comme un acte de gouvernement. Néanmoins, cet acte de gouvernement existe-t- il vraiment ? [...]
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