Arrêt Nicolo, conventionnalité d'une loi, article 55 de la Constitution, lois postérieures à un traité, primauté du droit communautaire, Conseil d'Etat, arrêt Sarran, Conseil constitutionnel
En l'espèce, une élection des représentants français au Parlement européen s'est déroulée le 18 juin 1989. Ont participé à ces élections les citoyens de France métropolitaine ainsi que ceux des départements et territoires d'outre-mer (DOM-TOM). Monsieur Nicolo, un ingénieur guadeloupéen, considérait que la participation de ces derniers aux élections était contraire au traité de Rome du 25 mars 1957, qui "s'applique à la République française", et à la loi française de 1977, qui dispose que "le territoire de la République forme une circonscription". Selon lui, ces textes ne concernent que le territoire "européen" de la République française et les citoyens français des DOM-TOM ne font pas partie, par définition, du continent européen. Ces derniers n'auraient donc pas dû, selon Monsieur Nicolo, participer à l'élection des représentants français au Parlement européen. Il a ainsi déposé un recours devant le Conseil d'État afin de faire annuler les résultats de ces élections.
[...] Pour le Conseil constitutionnel, l'application des dispositions de l'article 55 de la Constitution n'en demeurait donc pas moins sans sanction mais celui-ci estimait que la compétence de contrôle de conformité de la loi avec une norme internationale revenait aux juges ordinaires. Dans son arrêt "Cafés Jacques Vabre" du 24 mai 1975, la Cour de cassation répondra à "l'invitation" du Conseil constitutionnel : elle s'est reconnue compétente pour contrôler la compatibilité d'une loi avec un traité alors même qu'elle était postérieure à celui-ci. [...]
[...] Conseil d'État octobre 1989, Nicolo - L'application de l'article 55 de la Constitution aux lois postérieures à un traité Montesquieu (1689-1755) écrivait dans L'Esprit des lois (1748) que "Les juges de la nation ne sont que la bouche qui prononce les paroles de la loi, des êtres inanimés, qui n'en peuvent modérer ni la force ni la rigueur". Cette affirmation semble-t-il, été appliquée rigoureusement pendant plusieurs années par le juge administratif jusqu'à ce que la plus haute juridiction administrative opère un revirement majeur à la fin des années 1980. [...]
[...] L'arrêt Nicolo consacre donc l'article 55 de la Constitution selon lequel un acte international, telle qu'une norme du droit communautaire, est supérieur à la loi nationale. Cet arrêt permet par ailleurs l'intégration du droit interne dans le droit communautaire. Avec l'arrêt Nicolo, la France sort donc du rang des États membres européens qui méconnaissent la primauté du droit communautaire. Depuis cet arrêt, le droit international prime sur la loi, de même que les engagements internationaux pris par la France sur la Constitution. [...]
[...] S'il est en mesure de contrôler la conformité d'une loi à un traité antérieur, il peut contrôler la compatibilité d'un acte administratif pris en vertu de cette loi. Le juge administratif ne s'interdit donc plus désormais d'écarter les dispositions d'une loi qui seraient incompatibles avec les stipulations d'un traité, même si celui-ci est antérieur à la loi. L'arrêt Nicolo a ainsi permis au Conseil d'État de se mettre au diapason avec le juge constitutionnel et le juge judiciaire. Cet arrêt a également permis de consacrer la primauté du droit communautaire sur le droit interne. [...]
[...] Mais le rapprochement entre le contrôle de constitutionnalité et le contrôle de conventionalité a fait craindre un empiètement entre les deux. La doctrine a notamment reproché au Conseil d'État d'exercer un contrôle de constitutionnalité "déguisé", implicite ou indirect. Sur cette problématique, il faut se référer à l'arrêt du Conseil d'État du 8 février 2007, dit arrêt Arcelor. Il était question pour le Conseil d'État de déterminer le pouvoir du juge administratif en matière de modalités du contrôle de constitutionnalité des dispositions réglementaires transposant une directive communautaire. [...]
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