La déclaration Schuman qui institue la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier en 1950 constitue une première étape de la construction européenne. Celle-ci s'est poursuivie grâce à la conclusion de nouveaux traités entre les états européens (au nombre de six en 1950 mais vingt sept aujourd'hui) : la série des traités permettant la construction européenne débute avec le traité originaire de Rome de 1957, se poursuit notamment avec l'Acte Unique européen de 1986, les traités de Maastricht (1992), d'Amsterdam (1997) et de Nice (2001).
Cette série aurait dû se conclure avec l'entrée en vigueur du Traité Etablissant une Constitution pour l'Europe, également appelé traité de Rome II, le 1er novembre 2006, si celui-ci avait été ratifié par chacun des vingt cinq états signataires, ce qui n'a pas été le cas (refus de ratification par voie référendaire par les français et les néerlandais).
Ce traité avait notamment pour objectif de simplifier le fonctionnement de l'Union Européenne par un document unique et de doter l'Union Européenne d'une Constitution, ambition déjà exprimée par le traité de Maastricht.
C'est de ce traité signé à Rome en 2004 que nous avons à connaître.
En effet, le jour même de sa signature par les vingt cinq états membres de l'Union Européenne, ce traité a été déféré devant le Conseil Constitutionnel sur saisine de Jacques Chirac, président de la République, dans le cadre de l'article 54 de la Constitution, afin de se prononcer sur la nécessité ou non de réviser la Constitution française avant d'obtenir l'autorisation de ratifier le Traité établissant une Constitution pour l'Europe.
Cet article énonce que si le Conseil Constitutionnel, saisi par le Président de la République, par le Premier Ministre, par les présidents des deux assemblées ou par soixante députés ou soixante sénateurs, déclare qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver l'engagement international en cause ne peut intervenir qu'après révision de la Constitution.
Le Conseil Constitutionnel, premier juge à se prononcer sur la conformité du Traité Etablissant une Constitution pour l'Europe à la Constitution nationale, a alors redu sa décision moins d'un mois après sa saisine.
Si dans l'extrait que nous commentons, toutes les analyses de la haute juridiction concluent à la conformité du traité à la Constitution et donc à l'absence de nécessité de la réviser, il a été estimé, relativement à d'autres dispositions du traité, que l'autorisation de ratification ne pouvait intervenir que postérieurement à une révision constitutionnelle.
Cette décision, bien que portant sur un ensemble de textes qui n'entreront jamais en vigueur, n'en demeure pas moins très importante, notamment au regard des constats de conformité à la Constitution qu'elle affirme, encore plus qu'au regard des constats de non-conformité.
Dans sa décision du 19 novembre 2004, le Conseil Constitutionnel s'est penché sur deux problèmes majeurs (dont l'enjeu va bien au-delà du droit) qui sont la conformité à la Constitution d'une part de l'affirmation par le traité du principe de primauté du droit de l'Union Européenne et d'autre part de la Charte des droits fondamentaux.
En effet, le Conseil Constitutionnel se trouvait face à la problématique suivante : l'article I-6 du Traité établissant une Constitution pour l'Europe et la Chartre des droits fondamentaux sont-ils en contrariété avec les dispositions de la Constitution française ou bien la loi d'autorisation de ratification peut-elle intervenir sans révision constitutionnelle ?
La révision des dispositions constitutionnelles est-elle nécessaire face à ces normes de droit international ?
Afin de répondre à cette problématique, le Conseil Constitutionnel procède à l'analyse des sept cent pages comprenant le corps du projet de constitution composé de quatre grandes parties, ses annexes et ses protocoles.
Il a alors, dans les considérants que nous développerons ici, vérifié de manière classique -mais avec des conséquences majeures- le respect de la Constitution française par l'article I-6 du Traité établissant une Constitution pour l'Europe (I) et par la Chartre des droits fondamentaux (II).
[...] En somme, le Conseil Constitutionnel, par cette décision affirme donc que la place de la Constitution française est au sommet de la hiérarchie des règles de droit. La haute juridiction a donc dans cet arrêt analysé dans un premier temps la conformité du principe de primauté du droit communautaire affirmé par le traité au regard de la Constitution française et conclu à la supériorité de la Constitution française sur la Constitution européenne Mais son travail ne s'est pas limité à cela : il a également eu à se pencher sur la conformité de la Chartre de Droits Fondamentaux insérée dans le Traité établissant une Constitution pour l'Europe. [...]
[...] C'est la première fois que le Conseil Constitutionnel s'appuie ouvertement sur un arrêt de la Cour Européenne des Droits de l'Homme. Aussi, le Conseil Constitutionnel s'attache à vérifier que la Charte ne porte pas atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la Souveraineté nationale : pour cela il se réfère, ici encore, aux explications du praésidium pour estimer que l'Union respecte toujours les fonctions essentielles de l'Etat de telle sorte que la souveraineté de l'Etat n'est pas remise en cause. En somme, le Conseil Constitutionnel a donc ici écarté toute révision constitutionnelle sur deux points qui faisaient beaucoup débat : la question du respect du principe de laïcité et celle de la remise en cause de la souveraineté étatique. [...]
[...] En effet, les états transfèrent à l'Union Européenne un certain nombre de leurs compétences et dans ces domaines transférés, l'Union dispose du pouvoir de légiférer, pouvoir qu'elle exprime par les règlements et directives communautaires. Et, ce droit communautaire prime sur le droit national uniquement là où l'Union européenne a reçu compétence. Cela a été affirmé par la Cour de Cassation et le Conseil d'Etat dans les arrêts Jacques Vabre et Nicolo. En revanche, selon les mêmes juridictions, le droit communautaire ne prime pas sur la Constitution française. Mais, en la matière, c'est au Conseil Constitutionnel que revient la compétence de se prononcer. [...]
[...] Le Conseil Constitutionnel, premier juge à se prononcer sur la conformité du Traité Etablissant une Constitution pour l'Europe à la Constitution nationale, a alors redu sa décision moins d'un mois après sa saisine. Si dans l'extrait que nous commentons, toutes les analyses de la haute juridiction concluent à la conformité du traité à la Constitution et donc à l'absence de nécessité de la réviser, il a été estimé, relativement à d'autres dispositions du traité, que l'autorisation de ratification ne pouvait intervenir que postérieurement à une révision constitutionnelle. [...]
[...] Conseil Constitutionnel novembre 2004: Traité Etablissant un Constitution pour l'Europe La déclaration Shumann qui institue la Communauté Européenne du Charbon et de l'Acier en 1950 constitue une première étape de la construction européenne. Celle-ci s'est poursuivie grâce à la conclusion de nouveaux traités entre les états européens (au nombre de six en 1950 mais vingt sept aujourd'hui) : la série des traités permettant la construction européenne débute avec le traité originaire de Rome de 1957, se poursuit notamment avec l'Acte Unique européen de 1986, les traités de Maastricht (1992), d'Amsterdam (1997) et de Nice (2001). [...]
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