Voici, selon Y. Gaudemet, "un débat […] sur le terrain des principes, arbitrés par le Conseil constitutionnel". La preuve en est dans cette décision du Conseil constitutionnel rendu le 14 janvier 1983.
En l'espèce, une loi fixant le statut général des fonctionnaires a été déférée devant le Conseil constitutionnel pour un examen de conformité. L'article de la loi soumise à vérification n'est autre que la disposition ajoutant un article 20 bis à l'ordonnance du 4 février 1959, article relatif à l'instauration d'une troisième voie d'accès à l'Ecole Nationale d'Administration (ENA). La saisine du Conseil constitutionnel par le Sénat porte sur une inconstitutionnalité probable de l'article 20 bis, eu égard aux dispositions de l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme. En effet, cet article dispose de l'égale admissibilité des citoyens face aux emplois publics.
Or, la loi soumise à examen semble manifestement inconstitutionnelle aux yeux des Sénateurs, en ce qu'elle prévoit un concours ouvert à des catégories de personnes prédéfinies par avance, qui verraient leur formation et leur classement diverger de celui originairement dispensé par l'ENA. Le Sénat, opposant la loi du 14 janvier 1983 aux principes énoncés en l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme, espère donc bien faire ressortir l'inconstitutionnalité de la loi. Et, de fait, le Conseil constitutionnel se voit poser la question de savoir si les diverses dispositions énoncées à travers l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme ont une influence dans le droit de la fonction publique.lo
[...] Son raisonnement s'appuie sur le fait que les personnes rentrant dans les diverses catégories de la loi sont des représentants élus et que tout citoyen peut être élu. De ce fait, selon le Conseil constitutionnel, il ne peut y avoir ici une restriction à l'accès de la fonction publique. Or, sur la question d'une éventuelle distinction au sein de ces personnes élues (exclusion d'adjoint au maire par exemple) la motivation est des plus faibles : le Conseil admet que le législateur ne choisisse dans sa loi que les citoyens qui sembleraient le plus à même de concourir. [...]
[...] La saisine du Conseil constitutionnel par le Sénat porte sur une inconstitutionnalité probable de l'article 20 bis eu égard aux dispositions de l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme. En effet, cet article dispose de l'égale admissibilité des citoyens face aux emplois publics. Or, la loi soumise à examen semble manifestement inconstitutionnelle aux yeux des Sénateurs en ce qu'elle prévoit un concours ouvert à des catégories de personnes prédéfinies par avance qui verraient leur formation et leur classement diverger de celui originairement dispensé par l'ENA. [...]
[...] B L'Emergence d'un principe Constitutionnel : l'égale admissibilité à la fonction publique La motivation de la saisine est basée sur un élément : la fonction publique doit être ouverte de manière égale à tous les citoyens en fonction de leurs capacités, de leurs vertus et de leurs talents. C'est, selon les auteurs de la saisine, ce qu'il résulte de l'article 6 de la DDHC. Cet article s'est déjà vu reconnaître le principe d'égalité de traitement dans le déroulement de la carrière des fonctionnaires. La décision du 14 janvier 1983 lui adjoindra le principe d'égale admissibilité à la fonction publique. Le raisonnement du Conseil constitutionnel sur ce motif se fait en deux temps. En premier lieu, il se prononce sur l'égal accès aux emplois publics. [...]
[...] L'admission d'un tel principe pose deux conditions à respecter : il faut d'une part que les candidats soient sélectionnés selon une exigence de capacité et d'autre part que ces derniers ne subissent pas de discrimination quelconque. L'admission d'un tel principe en l'espèce semble avoir toute son importance et pourtant l'utilisation que va en faire le Conseil ne sera pas tout à fait celle que l'on pourrait attendre. II Une approche trop concrète de principe abstrait ? La décision du Conseil constitutionnel du 14 janvier 1983 montre une application très réaliste, voire matérielle de ces principes qui aura pour tendance de les dénaturaliser A Une application très concrète La saisine des sénateurs se base sur des considérations très pointues. [...]
[...] Et de fait le Conseil constitutionnel se voit poser la question de savoir si les diverses dispositions énoncées à travers l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme ont une influence dans le droit de la fonction publique. Autrement dit, face à une loi qui parait de prime abord discriminatoire, n'y a-t-il pas lieu de se demander si les dispositions de l'article 6 jouent un rôle ? Et si oui, dans quelle mesure ? Plus que de répondre à la question de savoir si oui ou non de telles normes sont à admettre en droit de la fonction publique, le Conseil constitutionnel ira outre en admettant non seulement l'existence de principe constitutionnel régissant le droit de la fonction publique mais aussi en fixant leur portée d'une manière assez lointaine de l'objectivité à laquelle ils se prêtent (II). [...]
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