Les directives, actes de droit communautaire dérivé, ont une valeur supérieure à la loi et aux règlements nationaux (CJCE, Costa c/ Enel, 1964). En revanche, contrairement aux autres actes de droit dérivé, elles n'ont pas d'effet direct en droit interne. Elles doivent être transposées par une loi ou un règlement de transposition.
Lorsque la directive est précise et inconditionnelle, c'est-à-dire qu'elle ne laisse pas de marge d'appréciation à l'autorité nationale compétente qui doit la transposer, la loi ou le règlement de transposition n'est que le décalque de cette directive. Mais il arrive que la constitutionnalité du règlement de transposition soit contestée, et donc indirectement la constitutionnalité de la directive. La Constitution de 1958 est en effet la norme suprême de l'ordre juridique interne français, et cette suprématie peut entrer en conflit avec l'obligation constitutionnelle de transposition d'une directive.
C'est le cas dans la décision Arcelor du 8 février 2007 du Conseil d'Etat. En l'espèce, la société Arcelor avait demandé aux autorités françaises compétentes l'abrogation de 1er d'un décret du 19 août 2004 transposant une directive du 13 octobre 2003. Leurs demandes ayant été laissées sans suite, la société forma devant le Conseil d'Eta un recours en annulation pour excès de pouvoir contre les décisions implicites de rejet de ces demandes et demanda aux autorités de procéder à l'abrogation. A l'appui de son recours, elle a invoqué la violation de plusieurs principes de valeur constitutionnelle, notamment le droit de propriété, la liberté d'entreprendre et le principe d'égalité. Le Conseil d'Etat écarta les moyens soulevés par la requérante, excepté celui tiré d'une violation du principe constitutionnel d'égalité. Il a alors décidé de surseoir à statuer et a posé à la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) une question préjudicielle.
Celle-ci, dans un arrêt du 16 décembre 2008, a estimé qu'il n'y avait pas d'incompatibilité entre la directive et le principe d'égalité, qui est aussi un principe communautaire. Quelles sont les modalités de contrôle de constitutionnalité des actes réglementaires de transposition des dispositions des directives précises et inconditionnelles par le juge administratif français ?
[...] En effet, estimer que le décret de transposition est contraire à la Constitution revient à dire que la directive est contraire à ce principe communautaire correspondant. Dans l'affirmative, le Conseil d'Etat pourra écarter les moyens invoqués par les requérants. En revanche, le Conseil d'Etat souligne qu'en cas de difficulté sérieuse, il devra surseoir à statuer et renvoyer la question préjudicielle à la CJCE en vertu de l'article 234 du Traité CE. Lorsque la Conseil d'Etat contrôle la conformité de la directive au principe communautaire, il contrôle en fait par ricochet la conformité de la directive à la Constitution. [...]
[...] Saisie de la question préjudicielle, la CJCE a rendu sa décision le 16 décembre 2008, laquelle va déterminer la solution du Conseil d'Etat. La solution retenue par la CJCE et ses conséquences sur celle du Conseil d'Etat Saisie de la question de savoir si la directive était valide au regard du principe d'égalité en tant que principe général du droit communautaire, la CJCE a répondu de manière affirmative en considérant que le législateur communautaire n'a pas violé le principe d'égalité et que l'examen de la directive au regard du principe d'égalité de traitement n'a pas révélé d'éléments de nature à affecter sa validité Ainsi, d'après la CJCE, la directive est conforme au principe communautaire d'égalité. [...]
[...] En l'espèce, il écartera le moyen tiré de la violation par le règlement de transposition de la directive précise et inconditionnelle du principe à valeur constitutionnelle d'égalité. Si à l'avenir une juridiction souveraine d'un autre pays est confrontée à la même situation, elle n'aura pas besoin de saisir la CJCE puisque celle- ci aura déjà statué sur la question. La décision Arcelor sera suivie d'une décision Conseil National des Barreaux un an plus tard qui étendra le contrôle du juge administratif aux droits fondamentaux (la différence est que dans ce dernier arrêt, il n'y a pas eu de question préjudicielle). [...]
[...] Lorsque la directive est précise et inconditionnelle, c'est-à-dire qu'elle ne laisse pas de marge d'appréciation à l'autorité nationale compétente qui doit la transposer, la loi ou le règlement de transposition n'est que le décalque de cette directive. Mais il arrive que la constitutionnalité du règlement de transposition soit contestée, et donc indirectement la constitutionnalité de la directive. La Constitution de 1958 est en effet la norme suprême de l'ordre juridique interne français, et cette suprématie peut entrer en conflit avec l'obligation constitutionnelle de transposition d'une directive. [...]
[...] Or la Conseil d'Etat n'est pas compétent pour contrôler la constitutionnalité d'une directive. Ainsi, pour parvenir à concilier l'obligation constitutionnelle de transposition des directives et la suprématie de la Constitution, le Conseil d'Etat va opérer un contrôle très spécifique de l'acte de transposition : un contrôle en deux temps. Le choix du Conseil d'Etat d'un contrôle en deux temps Le juge administratif, s'inspirant de la décision du Conseil Constitutionnel rendu le 10 juin 2004, va se reconnaître compétent pour contrôler la constitutionnalité du règlement de transposition d'une directive inconditionnelle et précise. [...]
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