Deux interrogations président à l'analyse du Conseil Constitutionnel : Tout d'abord, la question de savoir s'il est compétent pour opérer un contrôle de constitutionnalité de la loi de transposition par rapport à une directive communautaire. Puis, s'il peut contrôler, par ailleurs, la compatibilité des dispositions d'une loi à celles de la directive qu'elle a pour objet de transposer.
Le Conseil Constitutionnel répond clairement à ces deux interrogations en l'espèce, en considérant qu'il lui appartient de contrôler, après avoir été saisi sur le fondement de l'article 61 de la Constitution, le respect de l'exigence de transposition en droit interne d'une directive communautaire (posée à l'article 88-1 de la Constitution), sauf si cette transposition va à l'encontre de « principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France ». De plus, il considère qu'il ne pourrait déclarer une disposition législative incompatible avec la directive que si cette incompatibilité est « manifeste ».
Au-delà de ses aspects techniques et spécifiques relatifs au droit de la propriété intellectuelle et industrielle, cette décision du Conseil constitutionnel vient donc clarifier les rapports entre le droit constitutionnel et le droit communautaire dérivé tout en confirmant la prévalence de la Constitution (I). Le Conseil Constitutionnel admet pour la première fois clairement de contrôler une directive communautaire à l'occasion de l'examen d'une loi de transposition, en créant ainsi une « cohabitation » des ordres juridiques national et communautaire (II).
[...] De plus, il invite de nouveau implicitement les juges nationaux à se prononcer en la matière : ( ) Devant statuer avant la promulgation de la loi dans le délai prévu par l'article 61 de la Constitution, le Conseil constitutionnel ne peut saisir la Cour de justice des Communautés européennes de la question préjudicielle prévue par l'article 234 du traité instituant la Communauté européenne - La décision du 27 juillet 2006 a connu tout récemment connu un prolongement au sein des juridictions nationales : Il s'agit de l'arrêt Arcelor et autres rendu le 8 Février 2007 par le Conseil d'Etat réuni en assemblée du contentieux. La question posée au CE est celle judicieusement rappelée par le Commissaire du Gouvernement, Mattias Guyomar, de manière liminaire dans ses conclusions : Dans quelle mesure vous appartient-il de contrôler la constitutionnalité des actes réglementaires de transposition d'une directive ? ( ) - Le CE s'inscrit tout à fait dans la même logique que le CC, dans sa décision du 27 juillet 2006. [...]
[...] Le projet de loi tendait essentiellement à se conformer au droit communautaire en transposant la directive n°2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil sur " l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information " et c'est bien là la particularité de la loi déférée au contrôle du Conseil Constitutionnel. Dès lors, le Conseil Constitutionnel est venu préciser les modalités selon lesquelles il opère un contrôle sur les lois de transposition des directives communautaires. [...]
[...] Cette décision ouvre la voie à une nouvelle politique jurisprudentielle, déjà suivie par le Conseil d'Etat récemment (la Cour de Cassation se prononcera certainement dés qu'elle en aura l'occasion), illustrant ainsi un véritable travail collaboratif entre les juges. Certainement, l'article I-6 du Traité établissant une Constitution pour l'Europe, rejetée par référendum, n'y est pas étranger, car il disposait : La Constitution et le droit adopté par les institutions de l'Union, dans l'exercice des compétences qui sont attribuées à celle- ci, priment le droit des États membres. [...]
[...] Si tel est le cas, il contrôle la conformité de la directive à ces principes et renvoie l'affaire devant la Cour de justice en cas de difficultés sérieuses. Ainsi, le CE se fait, en quelque sorte, juge de la légalité du droit communautaire dérivé La décision du Conseil Constitutionnel rendue le 27 juillet 2006 (qui est le dernier état de sa jurisprudence en la matière, excepté la décision du 30 novembre 2006 qui la reprend), attendue depuis l'été 2004, constitue une grande décision et vient assurément renouveler les rapports entre le droit constitutionnel et le droit communautaire dérivé. [...]
[...] De plus, il pose clairement une sorte de réserve de constitutionnalité à l'exigence communautaire de transposition et ne parle plus, comme en 2004, des dispositions expresses et spécifiques de la Constitution (expression qui avait fait beaucoup gloser), mais parle en l'espèce pour la première fois des règles et principes inhérents à l'identité constitutionnelle de la France Cette notion (directement influencée par le feu Traité établissant une Constitution pour l'Europe en son article est plus large que la précédente en ce qu'elle incluse tant les dispositions expresses qu'implicites. - Des incertitudes : Le CC a le souci d'établir une conciliation entre les deux ordres juridiques, mais réaffirme parallèlement la prévalence de la Constitution sur le droit communautaire. [...]
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