En 1948 lors de l'élaboration de la Constitution de 1848 l'assemblée constituante se trouva face à la question de l'utilité d'inscrire une déclaration des droits et des devoirs en préambule de la Constitution. Aussi si certains hommes politiques étaient favorables à cette inscription, A. de Lamartine notamment, en revanche d'autres tels que Fresneau (député républicain) déclarait à cette occasion : « Si l'on a présenté ces droits de l'Etat et ces droits de l'individu, a-t-on fait quelque chose de bien remarquable, de bien utile au peuple ? On a tout simplement posé un problème, l'éternel problème de le conciliation du droit de l'individu avec le droit de la société, de la conciliation de l'ordre avec la liberté ».
Selon l'article 4 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 Août 1789, « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. Ainsi l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi ». Aussi est-on toujours en présence de la nécessaire conciliation entre l'ordre public nécessaire à la protection de tous et la liberté de chacun.
Dans cet arrêt du 15 Décembre 2006 étaient ainsi confrontés la liberté religieuse et l'ordre public. En effet la section du contentieux du Conseil d'Etat statuait sur l'interdiction de poser avec un turban sur des photos d'identité destinées à être apposées sur un permis de conduire.
En l'espèce était en cause M. Shingara pratiquant la sikhisme, religion monothéiste dont les adeptes se reconnaissent à raison de leur apparence physique, notamment par le port du turban arboré en permanence. Cette communauté nombreuse, dont l'intégration en France ne soulève aucun problème, a néanmoins donné lieu à certains contentieux liés à l'application de la législation sur l'interdiction des signes religieux dans les établissements scolaires publics.
Cependant en l'espèce le requérant invoquait le refus du préfet d'accepter des photos où il apparaissait avec un turban, refus motivé par le fait qu'il n'apparaissait pas tête nue sur ces photos. Le requérant ayant alors formé un recours pour excès de pouvoir a été débouté de ses demandes, c'est pourquoi il a formé un pourvoi en cassation. Par une décision du 5 Décembre 2005 le CE a fait droit à cette demande au motif que le ministre de l'intérieur n'était pas compétent pour fixer de telles conditions. En réponse à cela le ministre des transports par une circulaire du 6 Décembre 2005 a réaffirmé les conditions requises pour les photos sur le permis de conduire, confirmant l'exigence d'apparaître tête nue. C'est contre cette circulaire que le requérant et l'association United Sikhs, ont formé un recours en excès de pouvoir.
Le pourvoi se fondait ainsi sur les articles 9 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en invoquant l'atteinte portée à la liberté religieuse estimant être en présence d'une mesure discriminatoire au regard de l'origine ethnique.
Le CE était alors confronté au problème de droit suivant : le ministre des transports était-il en mesure d'imposer à un individu le retrait d'un signe religieux dans le cadre de la photo nécessaire à une pièce d'identité ?
Le CE nous donne une réponse affirmative, dès lors que l'intérêt de la sécurité publique et de la protection de l'ordre est en cause. Aussi en l'espèce ces mesures visent à limiter les risques de fraude ou de falsification des permis de conduire. De fait même si par le passé les photos avec turban ont pu être tolérées, l'augmentation du nombre de falsifications justifie la mesure et l'atteinte portée aux exigences de la religion, mesure qui par conséquent n'est ni inadaptée ni disproportionnée au regard de l'objectif à atteindre.
En l'occurrence la sauvegarde de l'ordre public nécessite certaines limitations aux libertés fondamentales (I). Néanmoins ces atteintes ne seront jamais ni absolues, ni illimitées, c'est la nécessaire conciliation des libertés et de l'ordre publique (II)
[...] Le CE nous donne une réponse affirmative, dès lors que l'intérêt de la sécurité publique et de la protection de l'ordre est en cause. Aussi en l'espèce ces mesures visent à limiter les risques de fraude ou de falsification des permis de conduire. De fait même si par le passé les photos avec turban ont pu être tolérées, l'augmentation du nombre de falsifications justifie la mesure et l'atteinte portée aux exigences de la religion, mesure qui par conséquent n'est ni inadaptée ni disproportionnée au regard de l'objectif à atteindre. [...]
[...] Dès lors l'ordre public va pouvoir légitimer certaines restrictions aux libertés, c'est ce qu'admet la CE en l'espèce mais cette solution n'est pas isolée puisque la CE l'a admis diverses fois, non seulement concernant la liberté religieuse (précédents que nous évoquerons en 2e partie) mais aussi à l'occasion d'atteintes à d'autres libertés : légalité de l'interdiction préventive d'une réunion si les circonstances le justifient (CE 21 mars 1990, Commune de la Roque-d'Andhéron ; interdiction de manifestations religieuses ou culturelles (CE mai 1982, Association internationale pour la conscience de Krishna ; restriction à la liberté d'aller et venir (concernant le couvre-feu des mineurs, voir Ville d'Etampes CE juillet 2001). Toutefois ces atteintes restent exceptionnelles et sont légitimées par la nécessité de sauvegarde de l'ordre public. B. Les restrictions aux libertés : l'exception Ainsi la prise en compte de considérations d'intérêt général va atténuer la portée de certaines règles, même constitutionnelles, consacrant des droits et libertés. En l'espèce la liberté religieuse est confrontée à l'augmentation inéluctable de la fraude est falsification des permis de conduire. [...]
[...] Selon les conclusions du commissaire du gouvernement il faut noter que le requérant soutenait la relative efficacité de la mesure puisqu'il faisait valoir que même tête nue il est possible de modifier son apparence par des moyens élémentaires (coupe de cheveux par exemple). D'autre part cette exigence concernant les Sikhs en particulier est paradoxale puisque lors d'un contrôle ceux-ci se présenteront systématiquement avec un turban. De plus la mesure serait disproportionnée par son caractère général et absolu. Enfin le requérant soulevait que leur situation objectivement différente justifiait une dérogation. En effet s'il est possible de parvenir au but recherché par des mesures moins radicales la disposition sera illégale. [...]
[...] Ce droit implique [ . ] la liberté de manifester sa religion individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l‘accomplissement des rites ; et l'article 14 qui dispose que la jouissance des droits et libertés doive être assurée sans distinction de sexe, de race, de couleur, de langue, de religion, d'origine nationale ou sociale ou fondée sur quelconque opinion. Selon le pourvoi la mesure portait atteinte à la liberté religieuse, en particulier à la liberté de manifester ses convictions religieuses. [...]
[...] Cette mesure est justifiée par le risque d'atteinte à l'ordre public. Le principe a était fixé par la DDHC dont l'article 10 établit que nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre établi par la loi L'ordre public est l'un des premiers objectifs qu'a dégagé le Conseil Constitutionnel, en 1981 la liberté individuelle et celle d'aller et venir devaient ainsi se concilier avec ce qui est nécessaire pour la sauvegarde des fins d'intérêt général ayant valeur constitutionnelle, comme le maintient de l'ordre public. [...]
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