Simple « chien de garde » de l'exécutif en 1958, le rôle du Conseil Constitutionnel s'est finalement révélé avoir une importance grandissante, en premier lieu par son auto-consécration de cour constitutionnelle en 1971, puis, par l'extension de la saisine en 1974, et finalement par la réforme de 2008, mettant en place le contrôle a posteriori. Cette dernière réforme, mise en application par la loi organique du 10 décembre 2009, permet à tout justiciable, à l'occasion d'une instance en cours, de remettre en cause la constitutionnalité d'une loi susceptible de lui être appliquée en posant une « question prioritaire » au Conseil Constitutionnel, qui dispose alors de trois mois pour statuer.
[...] Or, la procédure de la QPC instaure un ordre d'examen des moyens de constitutionnalité puis de conventionnalité. C'est pourquoi la Cour de cassation dans un arrêt du 16 avril 2010 a soulevé ce problème, en posant une question préjudicielle à la Cour de Justice de l'Union européenne. Le Conseil constitutionnel estime lui dans une décision du 12 mai 2010 Jeux de hasard que l'article 61-1 de la Constitution ne prive pas les juridictions administratives et judiciaires de la faculté de saisir de Cour de justice de l'Union européenne. [...]
[...] La mise en place de la question prioritaire de constitutionnalité a donc dans ce sens profité aux justiciables, mais a également étendu le domaine d'action du juge administratif. B/une nouvelle pratique pour le juge administratif L'avènement de la question prioritaire de constitutionnalité ne signe pas la mort de l'action du juge administratif, bien au contraire. Son champ d'action s'en trouve étendu. Déjà en charge de vérifier la conformité de la loi française aux engagements internationaux, conformément à l'article 55 de la Constitution, le juge administratif, avec l'introduction de la QPC, étend son domaine d'action. [...]
[...] Le Conseil d'État a également rappelé dans cet arrêt que le juge administratif peut à tout moment poser une question préjudicielle à la Cour de Justice de l'Union européenne. La Cour de Justice de l'Union Européenne a répondu à la question posée par la Cour de cassation, dans l'arrêt Melki Abdeli le 22 juin 2010, qu'une législation nationale qui instaure une procédure de contrôle de constitutionnalité des lois nationales ne viole pas le traité de l'Union Européenne dès lors que les juridictions nationales restent libres : de saisir la Cour de l'Union européenne à tout moment de la procédure, d'adopter toutes mesures nécessaires afin d'assurer la protection juridictionnelle provisoire des droits conférés par l'ordre juridique de l'Union et de laisser inappliquée, à l'issue d'une telle procédure, la disposition législative nationale en cause si elles la jugent contraire au droit de l'Union. [...]
[...] Cette obligation prévient toute digression arbitraire de la part du Conseil d'État et encadre ses pouvoirs. Tandis que le juge administratif est le juge suprême en matière de contrôle de conventionnalité, il doit rendre des comptes au juge constitutionnel en matière de contrôle de constitutionnalité. La naissance de la QPC a ainsi conféré au juge administratif un nouveau rôle d'intermédiaire, une plongée dans le champ constitutionnel. [...]
[...] Mais cette qualification de prioritaire peut tout de même être remise en question. En effet, alors que la question de constitutionnalité s'avère bien plus complexe que celle de conventionnalité, on peut imaginer que les justiciables ne choisissent pas de s'engager dans une procédure aussi complexe, alors que le choix de la remise en cause de la conventionnalité des lois, est plus rapide, et directement mise en oeuvre par le juge administratif depuis l'arrêt Nicolo rendu par le Conseil d'État en 1989 alors que le Conseil Constitutionnel s'était déchargé de cette responsabilité dans l'arrêt IVG en 1975. [...]
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