L'originalité du système juridictionnel français réside dans sa dualité. En effet, depuis les lois des 16-24 août 1790, l'organisation juridictionnelle française repose sur le principe de séparation des autorités administrative et judiciaire et donc sur un principe de dualité des ordres de juridiction. Alors que dans beaucoup de pays les juges appartiennent au même ordre de juridiction et traitent aussi bien des litiges privés que de ceux impliquant l'administration, en France il existe ainsi une répartition de compétence entre des juges ressortissant de deux ordres de juridiction différents : le juge judiciaire (chargé en principe des litiges de droit privé) et le juge administratif (chargé des litiges administratifs, soumis par principe aux règles de droit public).
Le juge judiciaire est historiquement le juge de droit commun et son apparition précède de loin celle du juge administratif. Si le Conseil d'Etat et les conseils de préfecture (ancêtres des tribunaux administratifs) sont apparus à la fin du XIIIe siècle, ils ne constituaient pas à l'époque de véritables juridictions puisqu'ils n'étaient que de simples démembrements de l'administration, dépourvus d'indépendance vis-à-vis de celle-ci. Cette dépendance historique à l'administration fut à l'origine de la théorie de « l'administration-juge » en vertu de laquelle « juger l'administration c'est encore faire acte d'administration ». L'indépendance de la juridiction administrative n'est finalement consacrée qu'en 1872 par la loi Dufaure qui marque le passage de la « justice retenue » à la « justice déléguée ».
Bien qu'aujourd'hui indépendant de l'administration, le juge administratif lui reste cependant lié (ne serait-ce que du point de vue historique) et il continue souvent d'apparaître aux yeux des justiciables comme un juge plus favorable aux intérêts de l'administration qu'à ceux des particuliers, contrairement à son homologue judiciaire officiellement « gardien des libertés » en vertu de l'article 66 de la Constitution de 1958.
De plus, aujourd'hui, à l'heure de la « perméabilisation » des juges et des droits, l'utilité d'un juge spécifique pour les litiges de droit public est contestée par certains et la question du maintien d'un juge administratif revient à chaque réforme de la Justice en France.
Malgré cette remise en cause contemporaine de l'utilité du juge administratif (I), le maintien de cette juridiction semble être nécessaire à « la bonne administration de la justice » en France (II).
[...] En outre, toujours dans un souci de célérité, deux innovations procédurales sont intervenues pour permettre à la justice administrative d'être rendue dans de plus brefs délais. La première consiste en la mise en place d'un juge administratif unique dont la compétence est limitée en premier ressort et dans dix contentieux énumérés par la loi. Il s'agit de contentieux de moindre importance qui de ce fait ne nécessitent pas la mobilisation de trois magistrats. La deuxième innovation procédurale est plus large puisqu'elle concerne l'ensemble du contentieux. [...]
[...] La remise en cause contemporaine de l'utilité du juge administratif. Sur le plan théorique, l'utilité du juge administratif est parfois remise en cause par la doctrine et sur le plan pratique, il faut bien reconnaître que la dualité juridictionnelle n'est pas sans présenter certains inconvénients Les contestations doctrinales de l'utilité du juge administratif Deux types de critiques théoriques sont dirigés à l'encontre du juge administratif. La première tient à la défaillance statutaire originelle de ce juge et la seconde consiste à dénoncer l'application par celui-ci d'un droit de privilège Critique relative à la défaillance statutaire originelle du juge administratif. [...]
[...] L'une des plus célèbres décisions du tribunal des conflits est l'arrêt Blanco rendu en 1873 par lequel compétence est reconnue à la juridiction administrative pour connaître des actions en indemnisation dirigées contre l'Etat du fait d'un dommage causé par un service public. A cette première difficulté technique découlant de la dualité juridictionnelle française s'ajoute le problème d'un risque de divergences jurisprudentielles. Le risque de divergences jurisprudentielles. Pour une question similaire, il arrive que les solutions données par le juge administratif et le juge judiciaire soient en opposition. [...]
[...] Au contraire, la Constitution de 1958 n'évoque pas l'existence du juge administratif. Si certaines dispositions constitutionnelles se réfèrent au Conseil d'Etat ou à la Cour des comptes, ce n'est qu'en leur qualité d'assistants juridiques du gouvernement et non en qualité de juges. Ainsi, à l'origine, seul le juge judiciaire bénéficiait d'une consécration constitutionnelle alors que le juge administratif n'était consacré que par une simple loi (ce qui impliquait que la juridiction administrative aurait pu être supprimée par un texte législatif ordinaire Bien que l'existence et l'indépendance du juge administratif fussent plus tard consacrées par le Conseil constitutionnel au titre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (DC 22/07/1980), certains tirent argument de sa défaillance statutaire originelle pour contester l'utilité de l'existence du juge administratif. [...]
[...] Cependant, et paradoxalement, cette même évolution pourrait se retourner contre le juge administratif lui-même. En effet, tout en constituant un progrès juridique indéniable, l'évolution de l'office du juge administratif pourrait servir d'arguments à ses détracteurs, car en s'immisçant ainsi dans des domaines traditionnellement réservés au juge judiciaire ne prend-il pas le risque d'être accusé de faire doublon avec ce dernier ? C'est tout le problème de la perméabilisation contemporaine des droits et des juges générés par la fondamentalisation du droit (c'est-à-dire la place croissante accordée aux droits fondamentaux) qui pour sa part constitue une avancée en matière démocratique Bibliographie - Ouvrages généraux Droit administratif, droit de l'environnement, Edition 2007- 2008, CNED, Concours Fonction publique catégories A et FOUCHER. [...]
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