Il y a voie de fait lorsqu'une autorité administrative commet une action ou prend une mesure « manifestement insusceptible de se rattacher à un texte législatif ou réglementaire » et qui porte atteinte au droit de propriété ou à une liberté fondamentale. On relève deux catégories de voie de fait :
- la voie de fait résultant d'une décision grossièrement illégale (même si l'exécution fut légale). TC. 2 décembre 1902, Société immobilière de Saint-Just ;
- et la voie de fait résultant de l'exécution grossièrement irrégulière d'une décision administrative (même régulière).
Maurice Hauriou parlait de voie de fait par « manque de droit » pour la première et de voie de fait par « manque de procédure » pour la seconde. Il arrive également que la voie de fait résulte à la fois de la décision elle-même et de son exécution irrégulière. TC, 8 avril 1935, Action française.
Les réformes récentes intervenues dans la procédure administrative contentieuse ont remis en question les justifications traditionnelles de la théorie de la voie de fait. Ont-elles conduit à son abandon ?
[...] B Le maintien malgré tout de la théorie de la voie de fait La loi du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives n'a pas conduit pas à l'abandon de la notion de voie fait. L'objectif de cette réforme n'était d'ailleurs pas de sonner le glas de la théorie jurisprudentielle de la voie de fait3, mais simplement d'en réduire l'application abusive. Le Tribunal des conflits dans une décision du 23 octobre 2000, M. Boussadar Min. des Aff. Etrangères, est venu confirmer cette interprétation en affirmant que la loi du 30 juin 2000 relative aux procédures d'urgence ne conduisait pas à un abandon de la notion de voie de fait4. [...]
[...] On voit donc qu'ont disparu les justifications pratiques à l'existence de la théorie de la voie de fait : l'existence d'un véritable juge des référés en matière administrative permettait de penser que la notion de la voie de fait allait disparaître. Les commentateurs ont affirmé que le référé-liberté aurait pour conséquence de canaliser la folle du logis de sorte que ne pourraient être générateurs de voie de fait que les actes résultant, selon les termes de Jean-Bernard Auby, d'une incompétence absolue de l'administration. Mais les décisions rendues depuis 2001 en la matière permettent de douter de la réalité de cette canalisation. [...]
[...] Il arrive également que la voie de fait résulte à la fois de la décision elle-même et de son exécution irrégulière. TC avril 1935, Action française. Les réformes récentes intervenues dans la procédure administrative contentieuse ont remis en question les justifications traditionnelles de la théorie de la voie de fait. Ont-elles conduit à son abandon ? I La justification traditionnelle de la théorie de la voie de fait : rétablir au plus vite les individus dans leurs droits et libertés gravement lésés A De larges pouvoirs donnés au juge judiciaire, gardien de la propriété privée et de la liberté individuelle Parce que l'acte ou l'action sont dénaturés l'administration est déchue de sa qualité d'administration. [...]
[...] Des décisions plus récentes du Tribunal des conflits permettent ainsi d'affirmer que la voie de fait n'a pas été domptée TC novembre 2001, Mlle Mohamed Ministre de l'Intérieur ; TC mai 2005, Haut Commissaire de la République en Polynésie française. Conclusion La théorie de la voie de fait n'a donc pas disparu pas même si ses justifications théorique et pratiques paraissent aujourd'hui bien faibles. Mais gageons que la victime d'une atteinte portée à une liberté fondamentale qui verra sa situation réglée en urgence, avec une 3 Comme en témoigne l'insertion, dans l'article L. [...]
[...] des Aff. Etrangères Sur la compétence : Considérant qu'il n'y a voie de fait justifiant, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, que dans la mesure où l'administration soit a procédé à l'exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d'une décision, même régulière, portant une atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, soit a pris une décision ayant l'un ou l'autre de ces effets à la condition toutefois que cette dernière décision soit elle-même manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative ; Considérant qu'à supposer même que le refus de visa opposé à M. [...]
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