Action administrative, période de crise, état d'urgence, théorie des circonstances exceptionnelle, libertés fondamentales, arrêt Heyriès, sécurité publique, Conseil d'État, Maurice Hauriou, Pierre Devolvé, Jean Waline, arrêt Rubin de Servens, régime d'exception, liberté de circulation, régime exceptionnel, article 16 de la Constitution, Michel Troper
La théorie des circonstances exceptionnelles, élaborée par la jurisprudence du Conseil d'État, dans un premier arrêt rendu en date du 28 juin 1918 Heyriès puis dans un deuxième arrêt rendu en date du 28 février 1919 Dames Dol et Laurent qui ont reconnu la possibilité d'assouplir le cadre juridique normal lorsque la situation l'exige pour des raisons impérieuses. Cette théorie permet à l'administration de prendre des mesures dérogatoires en période de crise grave, notamment en période de guerre, catastrophe naturelle, crise sanitaire, afin d'assurer la continuité de l'État ainsi que de la sécurité publique.
[...] La théorie des circonstances exceptionnelles demeure essentielle aujourd'hui, car elle offre un cadre juridique flexible pour répondre aux crises tout en nécessitant des garanties pour protéger les droits fondamentaux des citoyens. Ainsi, la théorie des circonstances exceptionnelles, tout en se révélant essentielle pour assurer l'efficacité de l'action administrative en période de crise nécessite un encadrement rigoureux pour prévenir toute dérive et garantir la protection des libertés fondamentales (II). I - Une théorie essentielle pour l'efficacité de l'action administrative en période de crise Cette théorie repose sur un fondement juridique permettant une adaptation rapide aux urgences et constitue un levier efficace face aux exigences des crises A - Un fondement juridique d'adaptation aux urgences La théorie des circonstances exceptionnelles est une construction jurisprudentielle permettant une dérogation au principe de légalité pour faire face à des situations de crise. [...]
[...] Jean Rivero insiste sur le fait qu'il « est impératif que la théorie des circonstances exceptionnelles ne serve pas à légitimer des atteintes durables aux libertés individuelles ; elle doit être circonscrite et ajustée aux nécessités ponctuelles de la crise27 ». Le développement de régimes d'exception, comme l'état d'urgence sanitaire de 2020, a montré que les mesures exceptionnelles pourraient être mieux encadrées par des textes législatifs spécifiques. Le Conseil d'État a démontré, à travers ses décisions, la possibilité de combiner la théorie jurisprudentielle des circonstances exceptionnelles avec des cadres législatifs, comme l'a fait le Conseil d'Etat, réf., en date du 26 juillet 2021 sur le pass sanitaire, qui marque l'évolution vers une application réglementée des circonstances exceptionnelles. [...]
[...] Selon le professeur André de Laubadère « le pouvoir exécutif est investi temporairement d'une prérogative exceptionnelle, au prix d'une dérogation au droit commun, dès lors que la sécurité nationale est en jeu12 ». Le juge administratif encadre cependant cette théorie par un contrôle sur l'existence des circonstances exceptionnelles et sur la proportionnalité des mesures adoptées. Dans l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat, ass., en date du 24 mars 2006 Rolin et Boisvert, le Conseil d'État vérifie que les assignations à résidence imposées lors de l'état d'urgence de 2005 sont proportionnées aux troubles publics constatés. [...]
[...] Didier Truchet confirme cette évolution, en expliquant que « la codification des mesures d'exception renforce la prévisibilité et la cohérence des décisions prises en temps de crise, contribuant à une meilleure transparence et conformité au droit28 ». Ainsi, la jurisprudence et la doctrine administrative s'accordent sur la nécessité de moderniser la théorie des circonstances exceptionnelles. Bien que cette théorie permette de répondre aux crises, sa mise en ?uvre doit être restreinte par des critères stricts de transparence, proportionnalité et contrôle judiciaire. Le Conseil d'État et le législateur tendent ainsi vers une meilleure conciliation entre les impératifs de l'ordre public en période de crise et le respect des principes fondamentaux de l'État de droit. [...]
[...] Yves Gaudemet souligne ici la continuité du contrôle juridictionnel « en situation de crise, la théorie des circonstances exceptionnelles ne doit pas se transformer en exception permanente. Le rôle du juge est alors de s'assurer que les libertés fondamentales sont respectées dans les limites du raisonnable24 ». En somme, la théorie des circonstances exceptionnelles et les régimes d'exception ont été développés pour permettre à l'administration d'agir en temps de crise, mais cette latitude est toujours sous le contrôle de la nécessité, de la proportionnalité, et d'une exigence de protection des droits individuels. [...]
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