Au cours des siècles et des évolutions, le droit administratif s'est construit autour de quelques notions clefs. Dans l'histoire de la discipline, deux notions apparaissent alors en premier plan, à savoir celle de puissance publique et celle de service public. Léon Duguit relie étroitement ces deux notions, définissant alors la notion de service public comme étant « toute activité d'intérêt général prise en charge par la puissance publique pour satisfaire les besoins de la population ».
Cette notion de service public fut en effet la plus étudiée, la plus discutée et de surcroit la plus incertaine en matière administrative. Désigné comme étant commodément et communément, un ensemble de biens et de personnels chargés de réaliser certaines missions d'intérêt général au nom de l'état ou des collectivités territoriales, le service public s'avère être à la fois l'une des plus importantes notions du droit administratif, mais également l'une des plus controversées. Certains s'en feront l'écho, comme notamment le professeur Léon Duguit qui, dans la première moitié du 20e siècle, utilisa cette théorie jusqu'à affirmer que le pouvoir étatique n'est justifié que s'il est mis en œuvre dans le but de rendre un service à la collectivité nationale. Cependant, si Jèze, Bonnard, de Laubadère et Duguit, purent perfectionner cette théorie, ils furent confrontés à un paradoxe souvent mis en avant et dénoncé par leurs adversaires ou leurs critiques : le service public confère une certaine légitimité à l'action de l'état et donc à ses pouvoirs. Il confirme et renforce ainsi la puissance publique, notion à laquelle il s'oppose, en même temps qu'il ne peut s'en passer puisque celle-ci est un « faisceau de prérogatives » dites de puissance publique, prérogatives qui sont les moyens d'assurer l'organisation et le fonctionnement des services.
[...] Cela concerne également le critère d'octroi de prérogatives de puissance publique. En effet, l'année 2007 fut une année de profonds bouleversements en la matière. Le Conseil d'État, par une série de trois arrêts, va reconsidérer de manière générale le lien organique entre personne publique et activité de service public (CE section 22 février 2007, Association du personnel relevant des établissements pour inadaptés, CE section 6 avril, commune d'Aix-en-Provence, CE 5 octobre 2007, Société UGC-Ciné-Cité). A travers ces arrêts, le Conseil d'État développe trois hypothèses permettant l'identification d'un de service public. [...]
[...] En plus de cette définition binaire du service public, la doctrine ajoute parfois la condition que l'activité de service public soit exécutée dans le cadre des règles de droit public (professeur Guédon), critère partageant la jurisprudence. Cependant, face à ces éléments semblant tous fondamentaux dans la caractérisation de service public, et malgré les décisions de 2007, les critères principaux restent la mission d'intérêt général et les prérogatives de puissance publique. [...]
[...] C'est ainsi que le Conseil d'État a considéré comme étant une activité d'intérêt général l'organisation de représentations cinématographiques en plein air (CE section 12 juin 1959, syndicats des exploitants de cinématographie de l'Auranie). Par contre, dans le silence de la loi, le juge administratif s'avère livré à lui-même quant à l'appréciation de l'intérêt général. Il se déterminera au cas par cas, selon sa raison, et selon les attentes sociales qu'il constate. On retrouve ainsi parfois des éléments de réflexions économiques dans certains arrêts (CE section 17 décembre 1997, Ordre des avocats à la Cour de Paris), ainsi que dans certaines conclusions de commissaires du gouvernement (CE section 27 octobre 1999, Rolin). [...]
[...] Le critère de mission d'intérêt général devient alors un critère sans lequel la qualification de service public est impossible. Originellement, l'intérêt général ne pouvait être rattaché qu'aux missions dites strictement régaliennes de l'état, à savoir celle de police, de justice, d'impôt . On parlait alors d'état gendarme ou de conception stricte du service public, dont Maurice Hauriou fut un fidèle défenseur dans sa note commentant un arrêt de 1899, Association syndicale du canal de Gignac. Cependant, une extension de l'intérêt général eut lieu, la définition de celui-ci dépendant directement de la volonté politique et devenant dès plus incertaine. [...]
[...] Il confirme et renforce ainsi la puissance publique, notion à laquelle il s'oppose, en même temps qu'il ne peut s'en passer puisque celle-ci est un faisceau de prérogatives dites de puissance publique, prérogatives qui sont les moyens d'assurer l'organisation et le fonctionnement des services. Le Préambule de la Constitution de 1946, en se référant à la notion de service public, donne à celle-ci une valeur extrêmement forte au-delà du droit administratif. Malgré cette consécration constitutionnelle, cette expression apparut avec éclat, comme d'autres notions importantes du droit administratif français, dans le célébrissime arrêt Blanco rendu par le tribunal administratif le 8 février 1873. [...]
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