Selon le Code civil, toute faute, même légère, suffit à engager la responsabilité du fait personnel (art. 1382 et 1383) ou du fait d'autrui (art. 1384). Pourtant, l'engagement de la responsabilité administrative peut, de longue date, être subordonné à l'exigence d'une faute d'une certaine gravité. Ceci s'explique notamment par la difficulté d'exercice de certaines activités qui relèvent de l'État. On peut citer les activités médicales, les activités de secours ou bien encore, le service public pénitentiaire.
Ce service public pénitentiaire, qui nous intéresse aujourd'hui, est défini comme étant le service qui "participe à l'exécution des décisions et sentences pénales et au maintien de la sécurité publique" (selon la loi du 22 juin 1987).
La délicatesse de cette mission a justifié le fait pour le juge d'exiger une "faute manifeste et d'une particulière gravité" pour engager la responsabilité de l'État (CE, 1918, Mineurs Zulemaro). Puis, le juge a subordonné cet engagement à une faute "lourde" (CE, 1958, Rakotoarinovy).
[...] En effet, la faute lourde conduisait le JA à ne pas contrôler les activités pénitentiaires. Cette plus grande protection des détenus est un mouvement qui a été initié par la CEDH. La CEDH par les condamnations qu'elle prononce à l'encontre de la France, la pousse à prendre davantage en considération les droits des détenus. Illustration récente : Dans une décision Renolde contre France du 16 octobre 2008, la CEDH a condamné la France, pour manquement à son obligation de protéger le droit à la vie d'un détenu qui s'était donné la mort dans sa cellule. [...]
[...] Moreau J., La responsabilité de l'État peut être engagée pour faute simple, JCP ACT 1er septembre 2003, p Pastor J.-M., Suicide des détenus : la CEDH condamne la France, AJDA 2008, p (Note sous arrêt CE mai 2003, Mme Chabba). [...]
[...] A la suite de ces 2 arrêts rendus par le CE, Chabba et Delorme interprétations sont possibles. Soit, on considère que la décision Delorme consacre une faute simple et qu'elle constitue le prolongement de la décision Chabba. Soit, on considère que ces 2 décisions doivent être lues conjointement comme le propose Hervé Arbousset. Il propose de distinguer selon que l'administration avait ou non connaissance des tendances suicidaires du détenu. Lorsque l'administration avait connaissance des tendances suicidaires comme dans l'arrêt Delorme, sa responsabilité pourrait être engagée pour faute simple. [...]
[...] Autrement dit, par crainte de mal faire, les agents publics chargés de missions difficiles pourraient décider de ne pas faire. Ceci étant, ces justifications, notamment avancées par R. Chapus sont de moins en moins tenables. Le maintien dorénavant injustifié de cette tradition D'une part, au vu du mouvement général d'abandon de la faute lourde en responsabilité administrative, et d'autre part, au regard du mouvement de réduction du champ de la faute lourde propre à la responsabilité du service pénitentiaire. Un mouvement général d'abandon de la faute lourde en matière de services publics complexes Les services publics complexes, ce sont ceux dont l'activité révèle une particulière difficulté ou technicité. [...]
[...] Le régime de responsabilité de l'État du fait du service pénitentiaire n'est donc plus uniforme. Si l'on ajoute à cela la responsabilité sans faute applicable aux dommages causés aux tiers par les détenus bénéficiant de méthodes libérales, on obtient des solutions juridiques relativement obscures. C'est pourquoi la doctrine voit dans la jurisprudence récente du CE une remise en cause généralisée de la faute lourde en matière pénitentiaire. II/ L'abandon prévisible de la faute lourde en matière pénitentiaire Cet abandon était prévisible en matière de SP pénitentiaire dans la mesure où la faute lourde était en net recul dans l'ensemble de la responsabilité administrative, et ce bien que JA fut longtemps récalcitrant à abandonner l'exigence d'une faute lourde. [...]
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