Le recours pour excès de pouvoir est souvent présenté comme « La » garantie des administrés face à l'Administration. C'est un recours contentieux par lequel tout intéressé peut demander au juge administratif de reconnaître qu'une décision administrative est illégale et d'en prononcer l'annulation. Il peut être ouvert de plein droit contre tous les actes faisant grief même s'il n'est prévu par aucun texte (CE Ass., 17 février 1950, Ministre de l'Agriculture contre Dame Lamotte). Le recours pour excès de pouvoir est la sanction du principe de légalité. On peut douter à première vue de l'efficacité du recours pour excès de pouvoir. En effet, il faut que l'administré connaisse cette possibilité qui lui est offerte ce qui n'est pas aisé : même si le droit se veut le plus accessible possible à tous, il reste technique et demande à la fois une volonté d'information (les textes n'étant pas toujours assez accessibles à tous) et une capacité à le comprendre. En outre, le justiciable peut hésiter à y recourir pour des raisons techniques ou financières. Mais, dans la pratique, le recours pour excès de pouvoir surmonte ces obstacles. Ainsi, il est largement utilisé par les administrés comme en témoigne le nombre important de ces recours présentés chaque année devant le juge.
Sa valeur en tant que moyen de sanctionner l'illégalité des actes administratifs apparaît lorsqu'on le compare aux autres procédés juridiques qui partagent les mêmes buts que lui. Ainsi, les recours administratifs, qu'ils soient gracieux ou hiérarchiques, peuvent se fonder sur des motivations d'opportunité ou d'équité, mais ils ne tendent pas forcément à assurer le respect de la légalité par l'administration. Il existe néanmoins quelques recours en annulation pour illégalité, mais le champ d'application de ces recours est très étroit. Au contraire, le recours pour excès de pouvoir a une portée générale : il est ouvert contre toutes les décisions exécutoires ce qui en fait déjà un recours bien plus ouvert aux justiciables que les autres voies contentieuses. La question de l'illégalité d'une décision administrative peut ainsi être soumise au juge par la voie d'un recours en annulation, mais par la voie incidente qui est celle de l'exception d'illégalité. Cependant, même par cette voie, la constatation de l'illégalité n'emporte pas annulation de l'acte : le juge la prive simplement d'effet dans le litige concerné. Par contre, cette constatation d'illégalité peut alors être effectuée à toute époque alors que le recours pour excès de pouvoir ne peut être exercé que dans un délai assez court de deux mois. Le recours pour excès de pouvoir conserve l'avantage de tendre à faire disparaître l'acte illégal de façon rétroactive et à l'égard de tous.
Le recours pour excès de pouvoir est donc la seule voie de recours permettant aux administrés d'obtenir l'annulation de toute décision exécutoire entachée d'illégalité. C'est pourquoi l'enjeu posé par la question de son accessibilité aux justiciables est important. Le Conseil constitutionnel fait même de son existence un principe général du droit : seul le législateur peut l'écarter pour une catégorie d'actes. Ainsi, une disposition excluant « tout recours » contre les décisions auxquelles elle se rapporte est interprétée par le Conseil d'Etat comme ne visant pas le recours pour excès de pouvoir faute de le mentionner de façon expresse (CE, 17 février 1950, Dame Lamotte).
Se poser la question de savoir si le recours pour excès de pouvoir est ou non assez largement ouvert aux justiciables revient à analyser deux typologies juridiques. D'une part, les conditions de recevabilité de ce recours, c'est-à-dire l'accessibilité d'un tel recours pour n'importe quel justiciable. Mais également, d'autre part et dans une moindre mesure, les nombreuses ouvertures du recours pour excès de pouvoir, définies ici comme les griefs que l'on peut articuler à l'encontre d'une décision pour en démontrer l'illégalité, autant de moyen pour le justiciable d'avoir gain de cause lorsque l'Administration est en faute et donc de l'inciter à ouvrir un tel recours puisqu'il peut invoquer contre elle des motifs juridiques définis.
Le recours pour excès de pouvoir a une double fonction : protéger les administrés contre l'arbitraire et contrôler la régularité des décisions administratives. Cela exigeait donc qu'il soit accessible au plus grand nombre possible de particuliers. Il doit permettre de créer un équilibre entre l'efficacité de la justice administrative et le caractère démocratique de l'accès au recours. Afin de savoir si le recours pour excès de pouvoir est ou non assez largement ouvert aux justiciables, il est nécessaire d'étudier les limites à la recevabilité d'un tel recours, à nuancer très fortement, (I-) puis les éléments qui en font un recours ouvert et démocratique (II-).
[...] Cependant, cette brièveté évite de rester longuement incertain sur la validité d'une décision administrative. [...]
[...] Cependant, cela ne vaut que pour les autorités décentralisées : les agents hiérarchisés ne peuvent pas attaquer les décisions de leur supérieur hiérarchique par la voie du recours pour excès de pouvoir sauf lorsqu'elles concernent leur carrière. On peut poser néanmoins une réserve : l'intérêt doit être suffisamment important. Ainsi, l'incidence des dépenses illégales décidées par les autorités locales sur la situation des contribuables de la commune ou du département est assez directe pour qu'ils aient intérêt à agir et donc à les attaquer. [...]
[...] Le recours pour excès de pouvoir est même recevable lorsque la mesure qui porte atteinte aux intérêts collectifs présente un caractère individuel. Néanmoins, l'arrêt Mme Raud-Lefèvre et Syndicat de la magistrature du Conseil d'Etat (19 mars 1997) montre que les groupements ne peuvent pas se substituer à un de leurs membres pour attaquer une décision individuelle qui porte atteinte à ce membre, mais pas aux intérêts collectifs. On peut trouver ici une limite au recours pour excès de pouvoir, car cette distinction est subjective et difficile à faire. [...]
[...] Ainsi, l'option est laissée ouverte au requérant entre recours pour excès de pouvoir et recours de pleine juridiction lorsqu'il se limite à demander l'annulation d'une mesure à caractère pécuniaire. Cette solution est admise par le Conseil d'Etat pour les litiges relatifs aux traitements de la fonction publique, car ils portent fréquemment sur des sommes trop peu élevées pour être en rapport avec les frais d'avocat que devrait supporter le requérant dans le cadre d'un recours en plein contentieux (CE mars 1912, Lafage). [...]
[...] Il dispose donc de nombreux arguments qui lui permettront d'obtenir l'annulation de l'acte qu'il conteste ce qui l'incite à former un recours, disposant de nombreux arguments invocables. Le recours pour excès de pouvoir comme recours le plus démocratique de par la gratuité, les procédures et formes simples, mais une limite apportée par les délais 1. La gratuité donne un accès au recours pour excès de pouvoir à tous les justiciables Le recours pour excès de pouvoir dispense le justiciable à la fois du recours à un avocat et des frais d'enregistrement ce qui le rend accessible à tous. [...]
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