Jusqu'en 1987, l'ouverture de plein droit du pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat n'était pas synonyme d'agitation fiévreuse pour celui-ci puisqu'il ne connaissait que des pourvois dirigés contre les décisions de juridictions administratives spécialisées. Mais, de par la loi du 31 décembre 1987, portant réforme du contentieux administratif, l'activité de cassation du Conseil d'Etat, marginale, devint une de ses activités principales. En créant les Cours Administratives d'Appel rendant des arrêts susceptibles de pourvois en cassation, la loi du 31 décembre 1987 a induit un développement quantitatif du recours en cassation. D'ailleurs, le volume des pourvois en cassation dirigés contre les arrêts des Cours Administratives d'Appel a rendu minoritaire le contentieux traditionnel de cassation du Conseil d'Etat portant sur l'activité des juridictions administratives spécialisées.
Mais la réforme du contentieux administratif de 1987 qui avait été réalisée dans le souci de désengorger le Conseil d'Etat en tant que juge d'appel ne devait pas produire un tel effet devant la cassation. Ainsi, l'article 11 alinéa premier de la loi du 31 décembre 1987 a organisé une procédure préalable d'admission des pourvois en cassation.
Jusqu'en 1997, ce filtrage des pourvois en cassation était l'œuvre de la Commission d'admission des pourvois en cassation qui était une formation juridictionnelle collégiale relevant de la Section du Contentieux du Conseil d'Etat. Ainsi, tout pourvoi en cassation qui était enregistré au secrétariat du greffe de la Section du Contentieux du Conseil d'Etat était transmis pour examen au Président de la Commission d'admission des pourvois en cassation. L'admission du pourvoi était prononcée par le Président de la Commission, et, sa décision n'avait pas de caractère juridictionnel. Par contre, les décisions refusant l'admission du pourvoi étaient rendues par la Commission statuant en formation collégiale et avaient ainsi un caractère juridictionnel. Avec le décret du 24 décembre 1997, la fonction de filtrage des pourvois en cassation a été redistribuée aux sous sections de la Section du Contentieux du Conseil d'Etat.
Le recours est examiné en premier lieu par le Président de la sous section à laquelle il a été distribué. Soit il conclut à la recevabilité du recours et il renvoie l'affaire à l'instruction, soit il n'est pas favorable à la recevabilité de l'affaire et il saisit la sous section afin qu'elle se prononce. Le dossier est transmis au commissaire du gouvernement qui conclut en audience publique devant la sous section. Soit la sous-section est favorable à l'admission du recours et l'affaire sera instruite dans les conditions ordinaires, soit la sous-section refuse l'admission du pourvoi dans un arrêt motivé. Arrêt susceptible de recours en rectification d'erreur matérielle et de recours en révision.
Il convient de souligner que dans l'exercice de leur mission, les diverses "formations de filtrage" ont assuré, et assurent encore quant au pourvoi en cassation, le respect de l'obligation faite au juge administratif d'inviter les parties à régulariser, le cas échéant, une requête ne remplissant pas ou ne remplissant qu'imparfaitement les conditions de sa recevabilité. De l'article R 612-1 du code de justice administrative, il ressort que l'invitation à régulariser ne constitue une obligation pour le juge que lorsque l'irrecevabilité est susceptible de régularisation après l'expiration du délai de recours. Dans les autres cas l'invitation à régularisation ne constituerait qu'une faculté pour le juge.
Les successives formations de filtrage du pourvoi en cassation ont arrêté leurs décisions en fonctions de critères posés par les textes mais aussi en fonction de critères qu'elles ont elles-mêmes dégagés au travers de leur oeuvre jurisprudentielle. Et, si elles se sont basées sur des critères de recevabilité spécifique au pourvoi en cassation prévus par l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret-loi du 30 septembre 1953, elles ont également eu recours aux conditions générales d'admission de toute requête devant le Conseil d'Etat. Aussi, nous nous proposons d'exposer les diverses catégories de conditions de recevabilité du pourvoi en cassation en procédant à la distinction entre conditions générales de forme et de délai de recevabilité et conditions de fond de recevabilité.
[...] Le pourvoi en cassation ne peut avoir pour but que de remettre en cause une décision juridictionnelle non encore passée en force de chose jugée. La décision doit, pour relever de la compétence du Conseil d'Etat, émaner d'une part d'une juridiction administrative et d'autre part avoir un caractère juridictionnel. En effet, les décisions attaquées devant le Conseil d'Etat par la voie de cassation doivent émaner de juridictions administratives notamment les Cours administratives d'appel, la Commission des recours des réfugiés, la Commission centrale d'aide sociale, les commissions départementales de travailleurs handicapés, la Commission de la tarification sanitaire et sociale, les juridictions des ordres professionnels relevant de l'ordre administratif, la Commission supérieure des soins gratuits, la juridiction disciplinaire de l'enseignement supérieur. [...]
[...] p Voir CE avril 1994, Leclercq, Rec. p. T Voir CE juin 1961, Procureur Général près de la Cour des comptes Mazer, RDP 1961, p concl. Bernard Voir CE décembre 1993, Commissaire du Gouvernement près du Conseil supérieur de l'Ordre des expert-comptables agréés, Rec. p ; voir, CE, Section décembre 1959, Commissaire du Gouvernement près de la Commission de la répartition de l'indemnité de nationalisation tchécoslovaque, Rec. p Voir CE, Section janvier 1992, Université de Dijon, RFDA 1992, p concl. B. [...]
[...] Sect juillet 1967, Office HLM du Mans, Rec ; Sect mars 1989, Lambert, p AJ 1989, Rec CE. Sect juillet 1985, Soc. nlle Clinique Beausoleil, Rec AJ 1985, p obs. JC CE mai 1967, Ministre de l'intérieur et Gasc, Rec ; 21 avril 1972, Synd. Autonome conchylicole du Médoc maritime, Rec CE. Sect octobre 1962, Dubost, Rec AJ 1962, p chron. M. Gentot et J. Fourré ; 7 octobre 1981, Combe, Rec RDP 1982 p CE. Sect avril 1996, Syndicat des avocats de France CE. [...]
[...] Néanmoins, cette motivation sommaire doit être tout de même suffisamment précise. Ainsi, elle ne peut pas consister en la simple mention d'un texte sans indication de la disposition précisément reconnue ou en la simple référence à la motivation des juges du fond sans préciser en quoi celle-ci est défaillante5. Ce qui n'exclut pas la motivation par références. Ainsi, il a été admis que le requérant se réfère à des moyens développés par lui dans un recours antérieur à la saisine du conseil d'Etat, qu'il annexe la copie de ces moyens à sa requête1 ou qu'il les adresse au juge après dépôt de la requête dans la mesure où le délai de recours n'est pas expiré2. [...]
[...] Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat : conditions de forme et conditions de fond Jusqu'en 1987, l'ouverture de plein droit du pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat n'était pas synonyme d'agitation fiévreuse pour celui-ci puisqu'il ne connaissait que des pourvois dirigés contre les décisions de juridictions administratives spécialisées. Mais, de par la loi du 31 décembre 1987, portant réforme du contentieux administratif, l'activité de cassation du Conseil d'Etat, marginale, devint une de ses activités principales. En créant les Cours Administratives d'Appel rendant des arrêts susceptibles de pourvois en cassation, la loi du 31 décembre 1987 a induit un développement quantitatif du recours en cassation. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture