La place du juge dans les politiques publiques : le principe de précaution

Extraits

[...] Le principe de précaution: réponse à l'effondrement du mythe du progrès scientifique Rompant avec la vieille conception scientiste du progrès selon laquelle les techniques sauront toujours remédier aux inconvénients qu'elles engendrent, le principe de précaution suppose une autre approche de la civilisation techno-scientifique. D. Bourg et JL. Schlegel La politique entretient avec la science une relation paradoxale. En effet, alors qu'on accuse cette dernière d'être en grande partie responsable de certaines atteintes, l'on compte pourtant sur elle pour qu'elle parvienne à identifier les maux qu'elle suscite et à prescrire les remèdes qui s'imposent. La science joue aujourd'hui un rôle incontournable entre l'homme et la nature. Elle se pose comme le problème et sa solution. [...]

[...] Dans l'Affaire dite de la Vache folle, la CJCE a précisé que l'annulation n'aurait pu intervenir que si le demandeur avait prouvé une erreur manifeste, un détournement de pouvoir ou un dépassement patent des limites du pouvoir d'appréciation de l'autorité qui avait pris la décision. Cette motivation caractérise donc un contrôle léger laissant à l'Administration une marge d'appréciation importante. Quant à l'avenir du contrôle du bien fondé de la décision, on invoque généralement la nécessité de laisser à l'Administration une marge de manœuvre par rapport au juge qui ne doit pas se substituer à elle. Cet espace de liberté dans l'appréciation du juge apparaît très utile étant donné l'insuffisance des preuves scientifiques, comme démontrée dans la première partie de cet exposé. [...]

[...] Il faut constater que la France est le premier pays à avoir inscrit le principe de précaution dans son droit. Les domaines concernés sont apparemment des plus divers : Changement climatique planétaire, menaces sur la biodiversité, organismes génétiquement modifiés, vache folle, téléphones cellulaires, vaccination contre l'hépatite etc . Selon les cas, les intervenants en appellent à la précaution raisonnée ou à la précaution absolue maximum, ou bien y voient encore un piège à con selon Claude Allègre, la signature d'un retour de l'obscurantisme selon Jean-Pierre Chevènement, et enfin la fin du règne du doit selon Henri Lepage. [...]

[...] philo p.395 Le principe de précaution comporte trop d'incertitude. La défiance vient de ce que ces normes indéterminées offriraient une trop grande marge d'appréciation à l'interprète, ce qui pourrait ouvrir la voie à un gouvernement des juges. De plus, ce principe pourrait perturber la cohérence de l'ordonnancement des normes en vigueur. La position de la doctrine réside dans la crainte de voir le juge usurper la place qui revient au législateur ou à l'administrateur. Par exemple, lorsque le juge estime une mesure de police environnementale excessive, le juge se rapproche très près d'une appréciation d'opportunité. [...]

[...] Il a acquis une place considérable en matière de politiques publiques par le biais de ce principe, manifesté d'une part par l'intensité de son contrôle et d'autre part, par l'utilisation du principe comme nouvel instrument d'interprétation à son service A. L'intensité du contrôle du juge Les litiges portant sur le principe de précaution restent peu nombreux, mais on relève cependant une augmentation des décisions rendues tant par les juridictions administratives françaises que par la CJCE à propos des recours dirigés contre des actes administratifs. [...]