Juge administratif, juge constitutionnel, légicentrisme, article 4 du Code civil, normes juridiques, arrêt Arrighi, arrêt Sarran, arrêt Dame Lamotte, arrêt Eky, article L100-2 du Code de relation entre le public et l'administration, contrôle de légalité, théorie de la loi-écran, question prioritaire de constitutionnalité (QPC)
La Révolution française a créé une distance entre les juges et les normes juridiques. En effet, c'était l'âge d'or du légicentrisme, la loi représentait la volonté générale alors elle ne pouvait pas être contestée ou interprétée, il y avait aussi une méfiance vis-à-vis des juges. Alors les juges étaient cantonnés à l'unique rôle de bouche de la loi, ils ne pouvaient pas interpréter celle-ci pour l'appliquer au litige. Au fil du temps, les choses ont changé, les juges ne sont plus limités au rôle de bouche de la loi, ils doivent désormais l'interpréter pour l'appliquer au mieux. Ce phénomène est aussi dû à l'inflation législative qui a créé alors des textes lacunaires voire obscurs, le juge ne peut pas appliquer un texte comportant de tels défauts et il ne peut pas refuser de juger selon l'article 4 du Code civil, il se doit donc de l'interpréter.
Au fil du temps, les juges se sont vu confier le devoir de protéger la légalité. L'ordre administratif et judiciaire qui a été séparé durant la Révolution française va se rapprocher grâce à ce phénomène de constitutionnalisation. En effet, ils vont partager la prérogative d'exercer un contrôle de légalité et donc de constitutionnalité. Toutefois, ils vont avoir des compétences propres. Un conseil constitutionnel va être créé pour que les juges constitutionnels veillent à ce que les normes juridiques, en particulier la loi, respectent la Constitution. Les juges constitutionnels doivent donc interpréter la Constitution. Quant aux juges administratifs, ils vont veiller à ce que leurs actes administratifs respectent la Constitution.
[...] Ainsi un décret administratif inconstitutionnel n'est pas annulé s'il est conforme à une loi, car cela reviendrait à juger de la constitutionnalité d'une loi et le juge administratif se refuse à être compétent dans ce domaine, car celui-ci relève du juge constitutionnel. En effet, seuls le Conseil constitutionnel et donc le juge constitutionnel peuvent apprécier de la constitutionnalité d'une loi, selon l'article 61 de la constitution. Ce principe a été posé pour la première fois dans des arrêts du 6 novembre 1963, Arrighi et Couvert, et depuis il ne cesse d'être réaffirmé. [...]
[...] Il doit donc quand deux normes se contredisent, effectuer une interprétation pour que la norme inférieure soit en accord avec la norme suprême, la constitution. L'arrêt Arcelor du Conseil d'État rendu le 8 février 2007 illustre ce phénomène. Ici, le juge administratif a dû concilier la norme constitutionnelle avec le droit de l'union européen. Dans l'arrêt Kherouaa du Conseil d'État datant du 2 novembre 1992, le juge administratif a dû concilier deux normes constitutionnelles, deux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Il a concilié le principe de laïcité de la constitution avec la liberté d'expression protégée par la DDHC. [...]
[...] Alors le juge administratif se fait donc juge de la constitutionnalité vu qu'il interprète pleinement la constitution. Enfin, lorsque le juge administratif refuse de renvoyer une question prioritaire de constitutionnalité au juge constitutionnel il exerce un contrôle de constitutionnalité, car en interprétant la constitution il considère que la norme qui pose problème n'est pas en désaccord avec la constitution. Néanmoins, il n'y a que le juge constitutionnel qui a le pouvoir d'abroger une loi au motif que celle-ci est inconstitutionnelle. [...]
[...] Ce nouvel aspect du contrôle de légalité du juge administratif augmente donc ses prérogatives et continue sa mutation vers un juge constitutionnel. Enfin, le juge administratif admet de constater qu'une loi a été implicitement abrogée du fait d'un changement constitutionnel. Le juge constitutionnel peut donc écarter une loi qui est contraire à un principe constitutionnel qui est postérieur à celle-ci. En faisant cela, il opère un contrôle de constitutionnalité des lois, rôle qui est normalement réservé au juge constitutionnel. Ce principe a été affirmé lors de l'arrêt de 2005, syndicat national des huissiers de France, du Conseil d'État. [...]
[...] Toutefois, le juge administratif ne peut pas renvoyer directement cette question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, il doit d'abord déterminer si la question est nouvelle, c'est-à-dire qu'elle n'a pas déjà été traitée par le Conseil constitutionnel, si elle est sérieuse et si elle est applicable au contentieux. En faisant cela, le juge administratif exerce une sorte de précontrôle de constitutionnalité, il sert de filtre. Lors d'une question prioritaire de constitutionnalité, le juge administratif peut interpréter la loi de manière qu'elle soit conforme à la norme suprême, c'est ce qu'on appelle une interprétation conforme. [...]
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