L'arrêt Anguet occupe une place importante dans la tradition juridique française en général et dans la jurisprudence française en particulier. Voici les faits de cet arrêt qui va permettre au Conseil de rendre une décision de principe.
Le sieur Anguet était entré à 8 heures et demie du soir, le 11 janvier 1908, dans le bureau de poste de la rue des Filles-du-Calvaire pour y encaisser un mandat. Lorsqu'il voulut sortir, la porte destinée au passage du public était fermée et, sur les indications d'un employé, il traversa les locaux réservés au personnel pour gagner une autre issue. Deux employés occupés à classer les valeurs postales, trouvant sans doute qu'il n'évacuait pas assez vite les lieux et le prenant peut-être pour un malfaiteur, le poussèrent si brutalement dans la rue qu'il se cassa la jambe.
A la demande d'indemnité formée par le requérant devant le Conseil d'Etat, le ministre des postes et télégraphes répliqua que, si les agents coupables des brutalités exercées sur le sieur Anguet avaient engagé à son égard leur responsabilité personnelle, les conséquences de leur faute ne devaient pas être mises à la charge de l'Etat.
La doctrine pensait à cette époque que « la responsabilité de l'administration et celle de l'agent ne se cumulent pas ; non seulement ils ne sont pas responsables solidairement, mais ils ne le sont pas en même temps et à raison du même fait » .
L'arrêt Anguet apporte à ce principe un éclairage particulier qui préfigurera la jurisprudence Lemonnier et la théorie du « cumul de responsabilités ».
Le Conseil d'Etat admet en effet que si la cause directe et matérielle de l'accident était la faute personnelle des agents (II), cette faute n'avait été rendue possible que par une faute de service (I).
[...] Dans le premier cas, la règle ne souffre que peu d'exceptions : même personnelle, la faute sera en quelque sorte recouverte par la faute de service qu'elle présuppose nécessairement. Ainsi en va-t-il de la faute commise par un gardien du Muséum d'histoire naturelle qui laisse échapper des chimpanzés dont l'un mord un passant[3] ou de la gifle donnée par un enseignant à un élève[4]. Dans le second cas, le lien instrumental se révèle par le fait que le service a été l'occasion ou le moyen de la commission du dommage. [...]
[...] La notion de faute personnelle et de faute de service dans la jurisprudence Anguet L'arrêt Anguet occupe une place importante dans la tradition juridique française en général et dans la jurisprudence française en particulier. Voici les faits de cet arrêt qui va permettre au Conseil de rendre une décision de principe. Le sieur Anguet était entré à 8 heures et demie du soir, le 11 janvier 1908, dans le bureau de poste de la rue des Filles-du-Calvaire pour y encaisser un mandat. [...]
[...] En revanche, si l'acte dommageable révèle l'homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences alors la faute est imputable au fonctionnaire et l'acte, perdant son caractère administratif, ne fait plus obstacle à la compétence judiciaire Comme déjà mentionné, la jurisprudence a donné à la faute de service un champ d'application le plus large possible (et a réduit de ce fait celui de la faute personnelle), à la fois dans le but évident de garantir au mieux le droit à réparation des victimes (l'administration étant plus sûrement solvable que ses agents) mais aussi pour ne pas gêner outre mesure l'initiative des agents et le fonctionnement normal de l'administration. D'un point de vue pratique, seules les hypothèses de faute personnelle peuvent identifiées et répertoriées (tant le champ d'application de la faute de service est large). On peut donc en déduire que les fautes qui n'entrent pas dans ces hypothèses sont des fautes de service. [...]
[...] Ceux-ci ne peuvent en aucun cas prononcer de condamnation à l'encontre de l'administration (principe de la séparation des autorités). Ajoutons que s'il existe un doute sur le point s'il y a faute personnelle ou faute de service, l'administration élève le conflit devant le Tribunal des conflits. Si la faute personnelle a été commise contre l'administration, l'agent ne peut être poursuivi que devant les tribunaux administratifs. [...]
[...] La faute personnelle type résulte de l'accident provoqué par un chauffeur qui a détourné le véhicule (administratif ou militaire) du trajet de sa mission normale à des fins personnelles (aller rendre sa visite à sa fiancée ou à sa famille, faire une course personnelle Enfin, les fautes commises par l'agent dans l'exercice de son service mais qui s'en détachent intellectuellement, psychologiquement, par leur particulière gravité. La faute personnelle peut résulter d'un comportement excessif de l'agent, en particulier de violences et de brutalités à l'égard d'un usager[9]. La faute personnelle peut aussi résulter d'un comportement qui traduit l'intention de nuire ou la malveillance. Enfin, elle peut manifester la rechercher d'un intérêt personnel[10]. Les conséquences de la faute personnelle La faute personnelle rend possible l'engagement de poursuites devant les tribunaux judiciaires contre l'agent responsable. [...]
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