A l'origine, le Conseil d'État était avant tout gouvernant avant d'être juge, cet héritage du passé s'est perpétué, ces valeurs ont été sauvegardées. La preuve est telle qu'aujourd'hui le Conseil d'État rend quelques 15000 avis par an, matérialisant sa compétence consultative et de conseil.
Enfin, le troisième élément de la devise proposée, définissant plus précisément les compétences du Conseil d'État, fait état du service. C'est le fait de s'acquitter de certains devoirs, certaines fonctions envers quelqu'un. Le service se ressent toujours à travers le respect des justiciables, qui peuvent légitimement s'attendre à ce que le Conseil d'État satisfasse aux deux premières obligations.
Mais, la question se pose à l'égard d'un éventuel cumul, les juges du Conseil d'État remplissant deux fonctions distinctes peuvent-ils être les mêmes ?
À la fois, la juridiction suprême de l'ordre administratif, soucieuse de se conformer à une règle de conduite, ne peut s'émanciper sans prendre conscience de l'existence d'un droit supérieur qui la sanctionne dès que l'exigence d'un procès équitable n'est pas satisfaite, telle l'image de l'épée de Damoclès. La justice administrative française est singulière, référentielle, dogmatique. Le Conseil d'État à l'image de cette devise doit prôner la qualité technique non seulement dans la rédaction des arrêts, mais aussi dans la pertinence des avis.
[...] Un conseiller d'Etat peut siéger dans une section du contentieux alors que par le passé, il avait donné un avis sur le texte controversé. II. Vers une progressive cohérence de cette devise définissant pertinemment le rôle des membres du Conseil d'Etat L'ambiguïté ressort de ces avancées normatives car les mêmes avis reviennent au consultatif et au juridictionnel, l'impartialité juridictionnelle peut s'en trouver affectée. C'est ainsi que la Cour européenne des droits de l'homme intervient depuis quelques années pour sanctionner des pratiques portant atteinte au procès équitable soutenu par l'article 6 paragraphe 1 de la Convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales De plus, conformément à cette jurisprudence policière de la cour européenne, la France s'est mise à la page avec le décret du 6 mars 2008 optant pour la séparation des fonctions juridictionnelles et consultatives du Conseil d'Etat A. [...]
[...] Comment pourrait-on admettre que le Conseil d'Etat répugne ce qu'il avait par le passé conseillé Une devise tripartite au service de l'impartialité imposée par l'article 6 paragraphe 1 de la CEDH : Les juges du Conseil d'Etat ne doivent pas avoir de lien avec une décision donnée sous forme d'avis. Ce principe a été énoncé dans la jurisprudence de la Cour de Strasbourg du 6 mai 2006 Kley contre Pays Bas. Le lien est établi en complément de la jurisprudence Procola, et cette jurisprudence a vraisemblablement permis à la cour d'affiner son avis sur la question. Il était question de statuer sur le Conseil d'Etat néerlandais. [...]
[...] "Juger, conseiller, servir", une devise pertinente pour le Conseil d'État ? Justice must not only be done signifie que la justice doit donner l'apparence d'être rendue. Le Conseil d'Etat trouve sa légitimité à travers ses fonctions juridictionnelles qui le place avant tout, au sommet de la pyramide de l'ordre administratif. Le doyen Hauriou, illustre figure de la faculté de droit de Toulouse, avait personnifié le Conseil d'Etat comme le soleil de l'ordre juridique administratif Cette image avait permis d'opposer le Conseil d'Etat à la Cour de Cassation de l'ordre judiciaire, mais qui tous deux présentent la caractéristique commune de juridiction suprême de leurs ordres juridiques respectifs. [...]
[...] L'affaire Procola contre Luxembourg du 28 septembre 1995 a permis de s'interroger sur le cumul des fonctions consultatives et contentieuses propre à la juridiction de l'ordre administratif. Selon la cour européenne, la juridiction du Conseil d'Etat n'était pas, par ses actions, en conformité avec les exigences du procès équitable. Le Conseil d'Etat luxembourgeois n'avait pas pu successivement approuver un texte puis rejeter le recours intenté à son encontre. Son impartialité objective avait été mise à mal. L'indépendance pourtant constitutionnalisée et l'impartialité faisaient défaut à la juridiction. [...]
[...] Le Conseil constitutionnel est intervenu pour constitutionnaliser la compétence du juge administratif dans le cadre d'annulation ou de réformation des décisions prises dans l'exercice des prérogatives de puissance publique. Cette solution est issue de la décision de 1987 Conseil de la concurrence. En conséquence, un changement de base constitutionnelle survient car la valeur législative régnait avant 1987 grâce aux lois de 1790. De plus, cette décision marque le retour à la conception de Montesquieu. Enfin, cette constitutionnalisation vaut pour les recours objectifs contre les actes administratifs (contentieux, excès de pouvoir, pleine juridiction). [...]
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